Courts Martial

Decision Information

Summary:

Date of commencement of the trial: 11 October 2017

Location: Canadian Forces Base Bagotville, building 81, room 202, Windsor Street, Alouette, QC

Charges:

Charge 1: S. 130 NDA, assault (s. 266 CCC).
Charge 2: S. 95 NDA, ill-treated a person who by reason of rank is subordinate to him.
Charge 3: S. 97 NDA, drunkenness.

Results:

FINDINGS: Charges 1, 3: Withdrawn. Charge 2: Guilty.
SENTENCE: A reprimand and a fine in the amount of $1500.

Decision Content

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COUR MARTIALE

 

Référence : R. c. Quirion, 2017 CM 3014

 

Date : 20171011

Dossier : 201719

 

Cour martiale permanente

 

Base des forces canadiennes Bagotville

Alouette (Québec) Canada

 

Entre :

 

Sa Majesté la Reine

 

- et -

 

Capitaine P.C.J.D. Quirion, contrevenant

 

 

En présence du : Lieutenant-colonel L.-V. d'Auteuil, J.M.


 

MOTIFS DE LA SENTENCE

 

(Oralement)

 

[1]               Le capitaine Quirion a avoué sa culpabilité à un chef d’accusation pour avoir maltraité une personne qui en raison de son grade lui est subordonnée selon l’article 95 de la Loi sur la défense nationale (LDN). Cette accusation se lit comme suit :

 

Art. 95 L.D.N.    A MALTRAITÉ UNE PERSONNE QUI EN RAISON DE SON GRADE LUI EST SUBORDONNÉE

 

Détails : En ce que, le ou vers le 13 novembre 2015, au Mess des Officiers, 4e Escadre Cold Lake, province d’Alberta, il a attrapé le visage et le bras du Lieutenant A.F., sans sa permission.

 

[2]               La Cour accepte et enregistre votre plaidoyer de culpabilité relativement à ce chef d’accusation apparaissant à l’acte d’accusation et par le fait même vous déclare donc coupable aujourd’hui de ce chef. Considérant que la poursuite a retiré les deux autres chefs d’accusation apparaissant à l’acte d’accusation, la Cour n’a plus aucune autre accusation à considérer.

 

[3]               Les avocats en présence aujourd’hui ont présenté une suggestion commune voulant que la Cour impose une réprimande au contrevenant ainsi qu’une amende de 1 500 dollars, payable immédiatement.

 

[4]               Il est maintenant de mon devoir de déterminer la peine qui doit vous être imposée.

 

[5]               Le système de justice militaire constitue l’ultime recours pour faire respecter la discipline qui est une dimension essentielle de l’activité militaire dans les Forces armées canadiennes (FAC). Ce système a pour but de prévenir toute inconduite ou d’une façon plus positive, de veiller à promouvoir la bonne conduite. C’est au moyen de la discipline que les FAC s’assurent que leurs membres rempliront leurs missions avec succès en toute confiance et fiabilité.

 

[6]               Le système de justice militaire veille également au maintien de l’ordre public et à s’assurer que les personnes assujetties au code de discipline militaire soient punies de la même façon que toute autre personne vivant au Canada.

 

[7]               La preuve déposée devant la Cour inclut un sommaire conjoint des faits et circonstances qui se lit comme suit :

 

« Sommaire conjoint des faits et circonstances

 

1.                  En tout temps pertinent, le Capitaine Quirion était membre de la Force régulière, affecté au 433e Escadre d’appui tactique de chasse, 3e Escadre, Base des Forces Canadiennes de Bagotville.

2.                  Le 13 novembre 2015, le Capitaine Quirion était à Cold Lake avec les autres pilotes de son escouade pour l’entraînement.

3.                  Vers 19h00 le 13 novembre 2015, le Capitaine Quirion a rejoint ses camarades au mess des officiers à Cold Lake.

4.                  Le 13-14 novembre 2015, le Lieutenant Fibich-Beaudoin était serveuse au mess des officiers à Cold Lake. Le Lieutenant Fibich-Beaudoin était vêtu en civil, mais le Capitaine Quirion a été informé de son grade.

5.                  Le Capitaine Quirion et les membres de son escouade ont versé de la bière au sol et sur une table comme toast à un absent, et ils ont jetés leurs écailles de cacahuètes par terre. Le Capitaine Quirion a informé  le Lieutenant Fibich-Beaudoin de ne pas s’inquiéter du ménage, car ils avaient l’habitude de nettoyer leurs dégâts, tel que c’est leur coutume.

6.                  Le Lieutenant Fibitch-Beaudoin a dû, à quelques reprises, aviser les Capitaine Quirion et Jakubaitis de quitter l’arrière du bar alors qu’elle ramassait des verres.  

7.                  Vers 23h00 le 13 novembre 2015 le Lieutenant Fibich-Beaudoin a annoncé le « last call ».

8.                  Les Capitaines Quirion et Jakubaitis ont répliqué de ne pas fermer le bar. Étant donné qu’il y avait plus que 10 clients présents au bar, le Lieutenant Fibich-Beaudoin a donc consenti à la demande des 2 capitaines.

9.                  Le Capitaine Quirion s’est une fois de plus introduit derrière le bar et se versait ses propres bières. Le Lieutenant Fibich-Beaudoin comptait les bières versées et les a facturées au Capitaine Quirion. Cette dernière a montré au Capitaine Quirion comment couler des bières sans trop faire de broue.

10.              Le Capitaine Quirion croyait que ses intentions étaient perçues comme étant amicales, et a interprété les directives du Lieutenant Fibich-Beaudoin de sortir de derrière le bar comme étant aussi amicales et conviviales.

11.              Durant la soirée, le Capitaine Quirion et le Lieutenant Fibich-Beaudoin ont parlé de plusieurs sujets anodins, étant tous les deux francophones dans un milieu anglophone.

12.              À un moment, le Capitaine Quirion a pris le visage du Lieutenant Fibich-Beaudoin entre ses mains pour lui faire une accolade. Le Lieutenant Fibich-Beaudoin a cru qu’il voulait l’embrasser sur la bouche, et l’a repoussé indiquant qu’elle n’avait pas d’intérêt.  

13.              Vers 01h30 le 14 novembre 2015, le Lieutenant Fibich-Beaudoin a fermé le mess. Seuls les Capitaines Quirion, Jakubaitis et Doig sont restés avec le Lieutenant Fibich-Beaudoin. Les Capitaines Quirion et Jakubaitis sont restés et ont aidé à faire le ménage du mess.

14.              Pendent que le Lieutenant Fibich-Beaudoin passait dans un corridor très sombre en fermant les lumières, le Capitaine Quirion l'a pris par le poignet. Le Lieutenant Fibich-Beaudoin a eu l'impression que le Capitaine Quirion tentait de la trainer dans le corridor non éclairé. Le Lieutenant Fibich-Beaudoin a réussi à repousser le Capitaine Quirion.

15.              Pendant que le Lieutenant Fibich-Beaudoin rangeait l'argent comptant, le Capitaine Quirion a encore essayé de la faire une accolade. Le Lieutenant Fibich-Beaudoin à encore cru qu'il voulait l'embrasser sur la bouche.

16.              Suite à ces événements, le Lieutenant Fibich-Beaudoin ne se sentait plus en sécurité.

17.              En aucun temps, le Capitaine Quirion n’a noté quelconque inconfort de la part du Lieutenant Fibich-Beaudoin.

18.              En aucun temps, le Capitaine Quirion n’a eu l’intention d’indisposer le Lieutenant Fibich-Beaudoin tant physiquement que psychologiquement.

19.              Suite aux évènements le Lieutenant Fibich-Beaudoin a démissionné de son emploi au mess, car elle craignait de se trouver encore seule avec un client dans des circonstances similaires ou pires.

20.              Suite aux évènements, le Capitaine Quirion a subi une mesure administrative, laquelle il a complétée avec succès.  Dû à cet évènement et par la même occasion, il a manqué des formations importantes.»

 

[8]               Lorsqu’un tribunal est en présence d’une suggestion commune relativement à la sentence qu’il devrait imposer à un contrevenant, le juge du procès doit appliquer le critère de l’intérêt public et il ne devrait pas écarter une recommandation conjointe à moins que ce qui est proposé soit susceptible de déconsidérer l’administration de la justice ou contraire à l’intérêt public.

 

[9]               La Cour peut s’écarter d’une recommandation faite par les avocats seulement « lorsque des personnes renseignées et raisonnables estimeraient que la peine proposée fait échec au bon fonctionnement du système de justice » tel que mentionné dans l’arrêt R. c. Anthony-Cook, 2016 CSC 43 au paragraphe 42. Faire « échec au bon fonctionnement du système de justice » est essentiellement le paramètre que doit considérer le juge lorsqu’il impose une sentence dans le cadre d’une suggestion commune.

 

[10]           Dans le même arrêt, la Cour suprême a reconnu que « [l]e fait, pour les avocats du ministère public et de la défense, de convenir d’une recommandation conjointe relative à la peine en échange d’un plaidoyer de culpabilité constitue une pratique acceptée et tout à fait souhaitable. Les ententes de cette nature sont monnaie courante, et elles sont essentielles au bon fonctionnement de notre système de justice pénale et de notre système de justice en général », y compris les procès devant la cour martiale.

 

[11]           Les avocats sont toutefois tenus de donner au tribunal un compte rendu complet de la situation du délinquant, des circonstances entourant la commission de l’infraction ainsi que de la recommandation conjointe sans attendre que le juge du procès en fasse la demande. Dans le contexte de cette affaire, la Cour se déclare satisfaite des explications et de l’information fournie par les avocats.

 

[12]           Le procureur de la poursuite a mis en lumière les principes et objectifs qui soutenaient la recommandation qui a été faite à la Cour et qui visaient essentiellement à dénoncer l’infraction retenue ainsi que la dissuasion spécifique et générale. Je crois que ces objectifs, dans le cadre de la suggestion, ont été atteints.

 

[13]           Ici, la Cour a devant elle le capitaine Quirion, qui est avec les FAC depuis environs dix ans; qui est pilote de chasse qualifié depuis environ quatre ans; qui a d’excellents états de services; qui représente un bon potentiel en termes de progression de carrière au sein des FAC. Les circonstances révèlent que l’incident qui fait l’objet de l’accusation devant la Cour serait un incident de nature plutôt isolé, ne reflétant pas le caractère du capitaine Quirion dans les circonstances. Donc c’est quelque chose qui se produit rarement ou jamais et je pense que c’est dans ce contexte que les parties en sont venues à une entente qui apparaît acceptable à la Cour.

 

[14]           Le capitaine Quirion a fait l’objet d’un suivi de nature administrative qui est, selon la Cour, l’une des mesures les plus efficaces dans les circonstances et dont les parties ont tenu compte dans le cadre de leurs discussions. La Cour ne peut que réitérer le fait que le respect des individus, qui est une valeur fondamentale au code d’éthique des membres des FAC et que le respect de l’intégrité physique et psychologique de tous et chacun, qu’il soit civil ou militaire, est une partie intégrante du fonctionnement des FAC. En fait, le capitaine Quirion a reconnu sa responsabilité et semble avoir fait amende honorable, particulièrement par la prise de conscience reflétée par le rapport faisant état du suivi administratif dont il a été l’objet. Il faut comprendre que la façon dont la poursuite a mené cette affaire visait à souligner qu’il n’y aurait aucune tolérance pour une telle chose dans le milieu militaire, autant que dans le milieu civil. Le mess est à la fois une résidence pour les militaires, un club, mais surtout un centre de vie sociale qui vise à favoriser l’interaction entre ces membres dans un contexte de détente et le respect des gens doit toujours y exister.

 

[15]           La Cour se déclare satisfaite que la suggestion commune, dans les circonstances, assure le maintien de la discipline, ne déconsidère pas l’administration de la justice et n’est pas contraire à l’intérêt public.

 

POUR CES MOTIFS, LA COUR :

 

[16]      DÉCLARE le capitaine Quirion coupable du deuxième chef d’accusation qui constitue l’infraction prévue à l’article 95 de la LDN pour avoir maltraité une personne qui, en raison de son grade, lui est subordonné.

 

[17]      CONDAMNE le capitaine Quirion à une réprimande et une amende de 1 500 dollars payable immédiatement.


 

Avocats :

 

Le directeur des poursuites militaires, tel que représenté par le Major A.J. van der Linde

 

Maître J.M. Fradette et Maître R. Bouchard Zee, 351 rue Labrecque, Chicoutimi, Québec

Avocats du capitaine P.C.J.D. Quirion

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