Courts Martial

Decision Information

Summary:

Date of commencement of trial: 8 January 2018

Location: Asticou Centre, block 2600, room 2601, courtroom, 241 de la Cité-des-Jeunes Boulevard, Gatineau, QC

Charges:

Charge 1: S. 93 NDA, drunkenness.
Charges 2, 3: S. 129 NDA, conduct to the prejudice of good order and discipline.
Charge 4 (alternate to charge 5): S. 95 NDA, ill-treated a person who by reason of rank was subordinate to him.
Charge 5 (alternate to charge 4): S. 130 NDA, assault (s. 266 CCC).
Charge 6 (alternate to charge 5): S. 95 NDA, struck a person who by reason of rank was subordinate to him.
Charge 7 (alternate to charge 4): S. 130 NDA, assault (s. 266 CCC).

Results:

FINDINGS: Charges 1, 2, 3, 5, 7: Not guilty. Charges 4, 6: Guilty.
SENTENCE: A severe reprimand and a fine in the amount of $2000.

Decision Content

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COUR MARTIALE

 

Référence: R. c. Matte, 2018 CM 4001

 

Date : 20180108

Dossier : 201739

 

Cour martiale permanente

 

Centre Asticou

Gatineau (Québec) Canada

 

Entre :

 

Sa Majesté la Reine

 

- et -

 

Capitaine J.J.Y. Matte, contrevenant

 

 

En présence du : Capitaine de frégate J.B.M. Pelletier, J.M.


 

MOTIFS DE LA SENTENCE

 

(Oralement)

 

Introduction

 

[1]               Capitaine Matte, la Cour a accepté et enregistré votre plaidoyer de culpabilité sur deux chefs à l’acte d’accusation et vous déclare donc coupable de ces deux chefs en vertu de l’article 95 de la Loi sur la défense nationale (LDN), pour avoir maltraité le caporal Brisbane-Babin, une personne qui vous était subordonnée en raison de son grade, en le poussant dans les escaliers et pour avoir frappé le caporal Currie, une autre personne qui en raison de son grade vous était subordonnée. en lui donnant un coup de poing au visage.

 

Une recommandation conjointe est présentée à la Cour

 

[2]               Il est maintenant de mon devoir d’imposer la sentence. La poursuite et la défense ont présenté une recommandation conjointe à la Cour en ce qui concerne la peine à être imposée. Les avocats recommandent que cette Cour impose une sentence composée d’un blâme et d’une amende de 2 000 dollars.

 

[3]               Le juge militaire, à qui on propose une recommandation conjointe sur la peine à imposer, est sévèrement limité dans l’exercice de sa discrétion sur sentence. Bien qu’ultimement je dois seul exercer le pouvoir discrétionnaire de déterminer la peine, je ne peux écarter une recommandation conjointe que si j’ai de sérieux motifs de le faire. La Cour suprême du Canada a précisé récemment dans l’arrêt R. c. Anthony-Cook, 2016 CSC 43, (Anthony-Cook) qu’un juge présidant un procès :

 

[n]e devrait pas écarter une recommandation conjointe relative à la peine, à moins que la peine proposée soit susceptible de déconsidérer l’administration de la justice ou qu’elle soit, par ailleurs, contraire à l’intérêt public.

 

[4]               Bien qu’il soit de mon devoir d’évaluer si la recommandation conjointe qui m’est présentée est acceptable, le seuil que cette recommandation doit atteindre pour que je la rejette est indéniablement élevé, considérant les multiples considérations d’intérêt public qui appuient l’imposition de toute peine conjointement recommandée. En effet, dans ces cas, la poursuite accepte de recommander une peine que l’accusé est disposé à accepter, minimisant ainsi le stress et les frais liés aux procès. De plus, pour ceux qui éprouvent des remords sincères, un plaidoyer de culpabilité offre une occasion de commencer à reconnaître leurs torts. Le plus important avantage est la certitude qu’offrent les ententes menant à des recommandations conjointes, autant pour l’accusé que pour la poursuite qui désire obtenir ce que le procureur estime être un règlement approprié de l’affaire dans l’intérêt public.

 

[5]               Ceci étant dit, même si la certitude quant au résultat est importante pour les parties, ce n’est pas l’objectif ultime du processus de détermination de la peine. Je dois également garder à l’esprit les objectifs disciplinaires du code de discipline militaire en m’acquittant de mes responsabilités. Tel que mentionné par la Cour suprême du Canada dans l’arrêt R. c. Généreux, [1992] 1 R.C.S. 259, la raison d’être d’une cour martiale, en tant que tribunal militaire, est entre autres de permettre aux Forces armées canadiennes (FAC) de s'occuper des questions qui touchent directement le maintien de la discipline, l'efficacité et le moral des troupes. Les cours martiales permettent de faire respecter la discipline efficacement. La sentence est le point culminant du processus disciplinaire suite à un procès ou un plaidoyer. C’est la seule occasion pour la cour de traiter des besoins disciplinaires générés par la conduite du contrevenant, et ce, sur un établissement militaire, devant public incluant plusieurs membres de l’unité actuelle ou antérieure du contrevenant ainsi que, de plus en plus, en présence de victimes.

 

[6]               La détermination de la peine dans le cadre d’un procès en cour martiale comporte donc un aspect disciplinaire important. Lorsqu’une recommandation conjointe est soumise à la cour, le juge militaire doit s’assurer, au minimum, que les faits pertinents à la situation du contrevenant et à la perpétration de l’infraction soient non seulement considérés, mais également expliqués adéquatement dans ses motifs relatifs à la sentence, et ce, dans une mesure qui peut ne pas être toujours nécessaires pour une cour civile siégeant en matière criminelle. Ces exigences propres à l’imposition de la peine ne s’écartent pas des balises fixées par la Cour suprême du Canada en ce qui concerne les recommandations conjointes, tel qu’il appert du paragraphe 54 de l’arrêt Anthony-Cook.

 

Faits considérés

 

[7]               Lors de l’audience, le procureur a lu à voix haute un sommaire des circonstances en plus de déposer les documents prévus à l’article 112.51 des Ordonnances et règlements royaux applicables aux Forces canadiennes (ORFC). Pour sa part, l’avocat de la défense a lu et déposé un sommaire conjoint des faits principalement pour informer la Cour sur la situation personnelle du capitaine Matte au moment et depuis la commission des infractions, surtout en lien avec sa situation financière. En plus de la preuve, la Cour a également considéré les plaidoiries des avocats au soutien de leur recommandation conjointe sur la peine ainsi que des précédents en semblable matière devant des cours martiales, illustrés par un tableau soumis par le procureur de la poursuite dans le cadre de sa plaidoirie. Je suis d’avis que dans le contexte d’une soumission conjointe des procureurs, ces représentations, ainsi que la preuve, me permettent d’être suffisamment informé pour rencontrer les exigences des ORFC voulant que je tienne compte de toute conséquence indirecte de la sentence et que j’impose une peine qui soit proportionnelle à la gravité de l'infraction et au degré de responsabilité du contrevenant.

 

Les infractions

 

[8]               Pour apprécier le caractère acceptable de la recommandation conjointe, la Cour a tenu compte de la gravité objective des infractions qui, comme prévu à l’article 95 de la LDN, sont passibles au maximum d’une peine d’emprisonnement de moins de deux ans.

 

[9]               Les faits relatifs à la perpétration des infractions sont révélés par le sommaire des circonstances lu par le procureur de la poursuite et acceptés comme étant véridiques par le capitaine Matte. Les circonstances des infractions sont les suivantes :

 

a)                  Alors qu’il était affecté au Groupe de la police militaire de l’Armée et déployé comme membre de l’équipe de protection rapprochée de l’ambassade canadienne à Kaboul, Afghanistan, le capitaine Matte a été impliqué dans deux incidents lors d’une activité à l’ambassade canadienne à Kaboul, Afghanistan, le soir du 1er décembre 2016.

 

b)                  Le premier incident a débuté par une altercation verbale entre le capitaine Matte et le caporal Brisbane-Babin au cours de l’activité de l’ambassade et en présence des invités de celle-ci. Après que le caporal Brisbane-Babin ait invité le capitaine Matte à poursuivre la discussion à l’extérieur, le capitaine Matte a poussé et donné des coups de pied au caporal Brisbane-Babin à plusieurs reprises en descendant l’escalier à la sortie du centre récréatif.

 

c)                  Suite au premier incident, le caporal Currie, qui faisait partie d’un groupe de personnes étant venu s’interposer pour mettre fin à l’altercation, a alors invité le capitaine Matte à le suivre dans la salle de bain du centre récréatif afin de désamorcer la situation. Une fois dans la salle de bain, le capitaine Matte a placé ses mains sur les épaules du caporal Currie, l’a poussé contre le mur et l’a ensuite frappé au visage.

 

d)                  Le capitaine Matte connaissait le caporal Brisbane-Babin ainsi que le caporal Currie. Il est allé s’excuser auprès du caporal Currie pour sa conduite le lendemain de l’incident.

 

e)                  Le capitaine Matte fut rapatrié au Canada à la suite des deux incidents. Suivant la communication de la preuve, il a tôt fait de mandater son avocat de négocier l’enregistrement de plaidoyers de culpabilité afin de résoudre ce dossier.

 

Le contrevenant

 

[10]           La Cour tient compte du fait que le capitaine Matte est âgé de 35ans. Il s’est joint à la Force régulière dès sa graduation de l’école secondaire en juillet 2000 comme fantassin au sein du Royal 22e Régiment avec lequel il a été déployé à deux reprises à l’étranger, en Bosnie en 2001-2002 et à Kaboul, Afghanistan en 2004. Il est devenu officier en 2007 et, après des études subventionnées pour l’obtention d’un baccalauréat en criminologie de l’Université d’Ottawa, il a servi en tant qu’officier au sein de la police militaire. À ce titre, il a servi principalement en soutien à l’Armée entre autres au sein du 5e Régiment à Valcartier, mais également en déploiement à Kaboul pour presque neuf mois en 2012-2013 et, par la suite, en étant déployé à l’ambassade, déploiement durant lequel les infractions ont été commises en 2016. Depuis son rapatriement de ce déploiement en décembre 2016, le capitaine Matte a été employé dans des fonctions d’état-major au Quartier générale de la Défense nationale à Ottawa après avoir été suspendu de toute fonction de policier militaire en mars 2017. Il n’a pas obtenu de nomination comme policier militaire au sens de l’article 156 de la LDN à ce jour. La fiche de conduite du capitaine Matte indique qu’il a été reconnu coupable en juillet 2012 d’une infraction d’ivresse, en lien avec des évènements s’étant déroulés à la garnison Valcartier en novembre 2011.

 

[11]           Lors de la présentation de sa dernière évaluation de rendement avant les évènements supportant les accusations, le capitaine Matte était considéré comme ayant un potentiel permettant une recommandation immédiate de promotion au grade de major de manière à ce qu’il puisse obtenir des défis à la hauteur de ses talents et aptitudes. Par contre, suite aux incidents, l’appréciation de son rendement lors de son déploiement a fait état de son incapacité à performer au niveau attendu d’un capitaine au sein de la police militaire. On y mentionne des lacunes au niveau de son leadership et de ses aptitudes d’administrateur ainsi que des conflits interpersonnels qui ont généré une perte de confiance de ses supérieurs à son endroit, justifiant son rapatriement hâtif du théâtre d’opérations. L’évaluation conclut que le capitaine Matte n’a pas démontré le potentiel pour être affecté dans des rôles de responsabilités accrus.

 

[12]           Le capitaine Matte entend procéder à une demande de libération administrative des FAC au cours des prochains mois. Il a procédé à son inscription au programme de diplôme d’études professionnelles en charpenterie-menuiserie offert au Centre de formation professionnelle de l’Outaouais, une formation devant débuter en août 2018.

 

[13]           Le capitaine Matte a témoigné lors des observations sur la peine, de manière à discuter de sa situation financière qu’il a qualifiée de précaire. Il est père de trois enfants étant issues de la même relation conjugale qui s’est terminée en novembre 2008. Il exerce des droits d’accès une fin de semaine sur deux, et a la garde des enfants pour un total de deux semaines durant les périodes de congés scolaires. Il doit verser une pension alimentaire mensuelle de 1 114,10 dollars à son ex-conjointe. La défense a déposé des documents, entre autres un budget, au soutien du témoignage du capitaine Matte à l’effet qu’il ne lui reste que 315 dollars sur sa solde de mi-mois et 135 dollars sur sa solde de fin de mois pour défrayer les dépenses courantes, une fois qu’il a payé les frais mentionnés à son budget, qui incluent entre autres les paiements qu’il fait sur ses cartes de crédit (1 100 dollars) pour limiter les frais d’intérêt ainsi que les paiements de 600 dollars mensuellement à sa conjointe actuelle qui l’héberge dans son condo. Le capitaine Matte mentionne à son budget qu’il ne serait capable de rembourser que 200 à 300 dollars par mois pour son amende. Son avocat plaide pour une amende payable en 10 versements de 200 dollars ou, au pire, huit versements de 250 dollars.

 

Facteurs aggravants

 

[14]           La Cour considère comme aggravant, dans les circonstances de cette affaire, le fait que les infractions se soient déroulées lors d’une opération internationale, dans le cadre d’une activité à laquelle des membres du corps diplomatique participaient. L’altercation verbale qui a semblé mettre le feu aux poudres avait le potentiel de donner une impression négative des membres des FAC impliqués, ce qui est manifestement contraire à l’impression que l’équipe de protection rapprochée déployée dans nos ambassades doit donner. De plus, je suis d’accord avec l’énoncé du procureur voulant que le grade du capitaine Matte est un facteur aggravant, considérant surtout qu’il s’est engagé dans une altercation avec deux militaires du grade de caporal. Malgré le différentiel de grade, il appert que c’est le caporal Currie, entre autres, qui a tenté de désamorcer la situation, ce qui lui a valu d’être agressé à son tour. On s’attend à beaucoup mieux de la part d’un capitaine, membre de la police militaire de surcroît, un autre facteur aggravant selon moi. La présence d’une fiche de conduite au dossier du capitaine Matte est aussi considérée comme un facteur aggravant quoiqu’atténué par le fait que l’absence de détails relativement à l’infraction de novembre 2011 ne permet pas de confirmer qu’il s’agisse d’une conduite similaire à celles pour lesquelles il doit être sanctionné dans la présente affaire.

 

Facteurs atténuants

 

[15]           La Cour a également considéré les facteurs atténuants suivants :

 

a)                  Premièrement, le plaidoyer de culpabilité du contrevenant, que la Cour considère comme étant une indication de ses remords et la preuve qu’il accepte la responsabilité pour ses gestes.

 

b)                  Deuxièmement, le fait que le capitaine Matte s’est excusé à l’une de ses victimes dès le lendemain des évènements.

 

c)                  Troisièmement, les conséquences des infractions sur la progression de carrière du capitaine Matte et son futur au sein des FAC.

 

d)                  Et finalement, le fait que le capitaine Matte a un parcours de vie qui n’est aucunement celui d’un criminel et qu’il a rendu dans le passé de fiers services aux FAC, entre autres dans le cadre de nombreux déploiements à l’étranger. L’ayant entendu témoigner il est clair pour moi qu’il possède des capacités et des aptitudes qui révèlent un fort potentiel de réhabilitation et une excellente capacité à contribuer de manière positive à la société canadienne dans le futur, peu importe que ce soit en uniforme ou dans la vie civile.

 

Objectifs devant être privilégiés dans cette affaire

 

[16]           Je suis venu à conclure que, dans les circonstances de la présente affaire, l’imposition de la sentence devrait cibler des objectifs de dénonciation et de dissuasion. De plus, considérant la situation du capitane Matte, l’imposition de la sentence ne doit pas compromettre la réhabilitation du contrevenant.

 

Évaluation de la recommandation conjointe

 

[17]           Comme mentionné précédemment, pour établir la peine appropriée dans la présente affaire, je dois en tout premier lieu évaluer la recommandation conjointe des avocats et son impact. En effet, la poursuite et la défense ont conjointement recommandé que cette Cour impose un blâme et une amende de 2 000 dollars, de manière à répondre aux exigences d’administration de la justice.

 

[18]           Pour apprécier le caractère acceptable de la recommandation conjointe, je dois appliquer le critère promulgué par la Cour suprême du Canada à l’effet qu’un juge du procès ne devrait pas écarter une recommandation conjointe relative à la peine, à moins que la peine proposée soit susceptible de déconsidérer l’administration de la justice ou qu’elle soit, par ailleurs, contraire à l’intérêt public.

 

[19]           En tant que juge militaire, la question que je dois déterminer n’est pas si j’aime la peine qui m’est conjointement recommandée ou si je peux arriver à quelque chose de mieux. En effet, le seuil que cette recommandation doit atteindre pour que je la rejette fait en sorte que toute opinion autre que je pourrais avoir sur ce qui constituerait une sentence adéquate n’est pas suffisante pour me permettre de rejeter la recommandation conjointe qui m’a été faite.

 

[20]           La Cour suprême du Canada a fixé un seuil aussi élevé pour écarter des recommandations conjointes de manière à ce que leurs indéniables avantages ne soient pas compromis. Les avocats de la poursuite et de la défense sont bien placés pour en arriver à une recommandation conjointe qui reflète tant les intérêts du public que ceux de l’accusé. En principe, ils connaîtront très bien la situation du contrevenant et les circonstances de l’infraction, ainsi que les forces et les faiblesses de leurs positions respectives. Le procureur militaire est chargé de représenter les intérêts des autorités militaires et de la collectivité civile pour faire en sorte que justice soit rendue. On exige de l’avocat de la défense qu’il agisse dans l’intérêt supérieur de l’accusé et il doit notamment s’assurer que le plaidoyer de celui-ci soit donné de façon volontaire et éclairée. Les avocats représentant les deux parties sont tenus, sur le plan professionnel et éthique, de ne pas induire la Cour en erreur. Bref, ils sont entièrement capables d’arriver à des règlements équitables et conformes à l’intérêt public.

 

[21]           Pour décider si une recommandation conjointe déconsidérerait l’administration de la justice ou serait contraire à l’intérêt public, je dois me demander si, malgré les considérations d’intérêt public qui appuient l’imposition de la peine recommandée, elle correspond si peu aux attentes des personnes raisonnables instruites des circonstances de l’affaire que ces dernières estimeraient qu’elle fait échec au bon fonctionnement du système de justice pénale. En effet, comme tout juge devant examiner une recommandation conjointe, je dois éviter de rendre une décision qui fait perdre au public renseigné et raisonnable, incluant les membres des FAC, sa confiance dans l’institution des tribunaux, incluant la cour martiale.

 

[22]           Je suis d’avis qu’une personne raisonnable et renseignée sur les circonstances de ce dossier s’attendrait à ce qu’un contrevenant admettant sa culpabilité à des accusations pour avoir frappé et maltraité deux subordonnés soit sanctionné par une peine qui exprime la désapprobation pour le manquement reflété par les infractions, en plus d’avoir un impact personnel direct sur le contrevenant. L’imposition d’un blâme et d’une amende est cohérente avec ces attentes légitimes.

 

[23]           En considérant la nature des infractions, les circonstances dans lesquelles elles ont été commises, les principes d’imposition de la peine applicable et les facteurs aggravants et atténuants mentionnés précédemment, je ne suis pas en mesure de conclure que la sentence recommandée conjointement par les procureurs est déraisonnable ou de nature à déconsidérer l'administration de la justice. Je vais donc accepter de l’entériner.

 

[24]           La poursuite n’a pas cru bon de soumettre de représentations en ce qui concerne une ordonnance d’interdiction sous l’article 147.1 de la LDN. J’en conclus que malgré que le capitaine Matte ait admis sa responsabilité en lien avec une infraction perpétrée avec usage de violence contre autrui, la poursuite est d’avis qu’il n’est pas souhaitable, pour la sécurité du contrevenant ou pour celle d’autrui, de rendre une ordonnance interdisant au contrevenant d’avoir en sa possession des armes à feu, armes prohibées ou autres dispositifs similaires. Selon la preuve que j’ai entendue sur les circonstances des infractions et du contrevenant, la Cour en vient aux mêmes conclusions. De plus, aucune demande n’a été formulée sous la section 6.1 de la LDN en ce qui a trait à l’analyse génétique à des fins médicolégales.

 

[25]           En vertu du paragraphe 145(2) de la LDN, les modalités de paiement d’une amende sont laissées à l’appréciation du tribunal militaire qui l’inflige. À l’audition sur la peine, le procureur de la poursuite s’est opposé à la demande de la défense pour que l’amende soit payée en versements mensuels égaux de 200 ou 250 dollars, proposant plutôt que l’amende de 2 000 dollars soit payée en versements mensuels de 500 dollars. Ayant considéré la preuve documentaire et testimoniale fort complète présentée par la défense, les arguments du procureur du capitaine Matte ainsi que la jurisprudence de la Cour d’appel du Québec dans R. c. Crowder, 2010 QCCA 1378, je demeure incapable de considérer que le capitaine Matte, bénéficiant d’une solde mensuelle de 7  590 dollars, est dans un état de pauvreté nécessitant que je considère des mesures exceptionnelles en ce qui a trait au paiement de l’amende pour éviter que le contrevenant soit placé dans une situation d’échec ou que la peine devienne disproportionnelle. Sur la base du budget qu’il a produit, je conclus que les sorties de fonds mensuelles du capitaine Matte comportent des items discrétionnaires lui permettant largement de débourser les 500 dollars par mois offerts dans l’échéancier de paiement suggéré par la poursuite.

 

[26]           Capitaine Matte, les circonstances des infractions auxquelles vous avez reconnu votre culpabilité révèlent un comportement qui ne peut être accepté en société et encore moins au sein des FAC. Considérant votre plaidoyer et les conséquences des infractions sur vos fonctions et votre progression de carrière, je présume que vous avez eu amplement l’occasion de réfléchir sur votre comportement inacceptable de décembre 2016. Je souhaite que suite à cette audience vous soyez en mesure de tourner la page tout en gardant à l’esprit l’importance de toujours agir dans le respect des responsabilités qui viennent avec votre statut en tant que membre des FAC, en tant qu’officier, en tant que représentant de l’ordre et en tant que citoyen. Le fait que vous soyez encore en uniforme aujourd’hui me porte à vous encourager à continuer à servir les FAC honorablement, quelles que soient les décisions que vous ou d’autres pourrez prendre en ce qui concerne votre futur. Peu importe la voie que vous prendrez, vous n’avez rien à perdre en vous comportant comme une personne respectueuse des autres.

 

POUR CES MOTIFS, LA COUR :

 

[27]           VOUS CONDAMNE à un blâme et à une amende de 2 000 dollars, payable en quatre versements égaux de 500 dollars, commençant au plus tard le 1er février 2018 et se terminant au plus tard le 1er mai 2018. Si vous deviez être libéré des FAC pour quelque raison avant d’avoir payé la totalité de l’amende, le solde sera dû au jour de votre libération.


 

Avocats :

 

Le directeur des poursuites militaires, tel que représenté par le major S.J.P. Poitras

 

Major B.L.J. Tremblay, service d’avocats de la défense, avocat du capitaine J.J.Y. Matte

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