Courts Martial

Decision Information

Summary:

Date of commencement of trial: 26 July 2018

Location: 3rd Canadian Division Support Base Edmonton, Training Lecture Facility, building 407, Korea Road, Edmonton, AB

Charges:

Charge 1: S. 129 NDA, conduct to the prejudice of good order and discipline.
Charges 2, 3, 4, 5, 6, 7: S. 95 NDA, ill-treated a person who was subordinate.

Results:

FINDINGS: Charge 1: Guilty. Charges 2, 3, 4, 5, 6, 7: Not guilty.
SENTENCE: A reprimand and a fine in the amount of $700.

Decision Content

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COUR MARTIALE

 

Référence : R. c. Handfield, 2018 CM 3010

 

Date : 20180726

Dossier : 201802

 

Cour martiale permanente

 

Base de soutien de la 3e division du Canada Edmonton

Edmonton (Alberta) Canada

 

Entre :

 

Sa Majesté la Reine

 

- et –

 

Caporal A.J.A. Handfield, contrevenant

 

 

En présence du : Lieutenant-colonel L.-V. d’Auteuil, J.M.C.A.


 

MOTIFS DE LA SENTENCE

 

(Oralement)

 

[1]               Le caporal Handfield a avoué sa culpabilité au premier chef d’accusation apparaissant à l’acte d’accusation, soit un comportement préjudiciable au bon ordre et à la discipline, contrairement à l’article 129 de la Loi sur la défense nationale (LDN). Cette accusation se lit comme suit :

 

« Premier chef

d’accusation

Art. 129 L.D.N.

COMPORTEMENT PRÉJUDICIABLE AU BON ORDRE ET À LA DISCIPLINE

 

Détails : En ce que, autour du 5 au 7 octobre 2016, à la BFC Wainwright, Alberta, a tenu, envers des candidats sur un cours de PP-1, plusieurs propos de nature sexuelle, contrairement à la Directive et ordonnance administrative de la Défense 5012-0. »

 

[2]               La Cour accepte et enregistre votre plaidoyer de culpabilité relativement à ce chef d’accusation et, par le fait même, vous déclare donc coupable aujourd’hui de ce chef.

 

[3]               Les avocats ont présenté une suggestion commune voulant que la Cour impose une réprimande et une amende de 700 dollars, payable en deux versements mensuels de 350 dollars chacun.

 

[4]               Il est maintenant de mon devoir de déterminer la peine qui doit vous être imposée.

 

[5]               Le système de justice militaire constitue l’ultime recours pour faire respecter la discipline qui est une dimension essentielle de l’activité militaire dans les Forces armées canadiennes (FAC). Ce système a pour but de prévenir toute inconduite ou, d’une façon plus positive, de veiller à promouvoir la bonne conduite. C’est au moyen de la discipline que les FAC s’assurent que leurs membres rempliront leurs missions avec succès, en toute confiance et fiabilité.

 

[6]               Le système de justice militaire veille également au maintien de l’ordre public et à s’assurer que les personnes assujetties au code de discipline militaire soient punies de la même façon que toute autre personne vivant au Canada.

 

[7]               La preuve déposée devant la Cour inclut un sommaire des circonstances qui se lit comme suit :

 

« Énoncé des circonstances

 

1.         Au moment de faits sous-jacents, le caporal Handfield était membre des Forces armées canadiennes (FAC), force régulière, employé au sein du 3e bataillon, Princess Patricia Canadian Light Infantry.

 

2.         À l’automne 2016, le caporal Handfield était employé comme instructeur sur le cours d’infanterie DP1 à la BFC Wainwright, Alberta.

 

3.         Le 7 octobre 2016, alors que le soldat Kebrick, candidat sur le cours DP1, avait le torse nu, le caporal Handfield a touché brièvement le muscle pectoral de ce dernier en disant : « You have a nice chest » et, alors que le soldat Kebrick, offusqué, s’éloignait, le caporal Handfield a ajouté en blaguant et en croyant détendre l’atmosphère « I am going to rape you tonight » ou des paroles semblables.

 

4.         Le 7 octobre 2016, le caporal Handfield a tenu les propos suivants au soldat Linton, un autre candidat sur le cours DP1, alors que celui-ci mangeait : « Open your mouth wider » et « You like that white stuff » ou des paroles semblables.

 

5.         Le 7 octobre 2016, le caporal Handfield a demandé au soldat Linton d’ouvrir ses jambes pour permettre au soldat Kebrick d’y mettre la tête.

 

6.         Certaines des paroles et comportements du caporal Handfield ont pris place lorsqu’il n’y avait pas d’autres instructeurs présents.

 

7.         Les soldats Kebrick et Linton se sont sentis humiliés et embarrassés par les paroles et les comportements du caporal Handfield pendant le cours DP1.

 

8.         Au moment de tous ces incidents, le caporal Handfield connaissait le contenue de la Directive et ordonnance administrative de la Défense 5012-0 portant sur le harcèlement.

 

9.         Le caporal Handfield ne tirait aucune gratification sexuelle de son comportement, il croyait faire des blagues pour créer des liens avec les soldats, qu’il considèrerait comme futurs confrères. Pourtant il savait ou aurait raisonnablement dû savoir qu’un tel comportement pouvait offenser ou causer préjudice.  Et ce, spécialement en considération de sa relation hiérarchique envers les candidats sur le cours DP1. »

 

[8]               La preuve comprend aussi un sommaire conjoint des faits et qui se lit de la manière suivante :

 

« Énoncé conjoint des faits

 

1.         Le Sergent Randon Painchaud était le superviseur immédiat du Caporal Handfield au moment de la commission de l’infraction. Il affirme que le Caporal Handfield faisant un très bon travail en ce qui a trait à l’entrainement et au mentorat de ses subordonnés. Il affirme que le Caporal Handfield était très efficace comme instructeur, qu’il était un bon subordonné, qu’il a beaucoup d’expérience et qu’il était désireux d’apprendre. Il affirme qu’il a été impressionné à plusieurs reprises par la performance du Caporal Handfield. Il maintient que le Caporal Handfield était aimé et qu’il est un atout pour le 3PPCLI. Le Sergent Painchaud affirme que le Caporal Handfield a beaucoup de potentiel, qu’il sera un bon leadeur et qu’il a beaucoup à transmettre à ces subordonnés. Finalement, il affirme que le Caporal Handfield a une personnalité agréable, qu’il s’entendait bien avec tous ces pairs et qu’il n’est ni mesquin ni malicieux.

 

2.         Le Soldat Elie Leonard, victime alléguée du comportement du Caporal Handfield, le qualifie d’excellent leadeur, d’excellent supérieur, ainsi que de personne éthique. Il affirme que le Caporal Handfield traitait ses subordonnés justement et qu’il utilisait son temps personnel pour faire du mentorat auprès de ses subordonnés. Il considère que le Caporal Handfield excelle comme membre du 3PPCLI et il n’a en aucun temps considéré sa conduite comme problématique.

 

3.         Le Sergent Tyler Baldwin, superviseur immédiat actuel du Caporal Handfield, affirme que depuis qu’il est sous sa supervision, il a confié au Caporal Handfield toutes les responsabilités d’un Caporal-Chef. Il affirme pouvoir compter sur le Caporal Handfield et il apprécie son expérience et son éthique au travail. Il le décrit comme efficace, diligent, respectueux, responsable, résilient, professionnel, dévoué et capable d’effectuer ses devoirs sans supervision. Il conclut que le Caporal Handfield est un bon soldat, voué au succès, qui a grandement appris en conséquence des présentes procédures disciplinaires.

 

4.         La majorité des subordonnées du Caporal Handfield appréciaient grandement la personnalité et l’humour du caporal Handfield.

 

5.         Les maladresses du caporal Handfield sont en partie attribuable à la barrière linguistique puisque le caporal Handfield n’était pas très à l’aise en anglais et détenait un vocabulaire limité.

 

6.         En raison des accusations auxquelles le Caporal Handfield faisait face, sa promotion au grade de Caporal-Chef fut annulée et il fut assigné en dehors du 3PPCLI. On lui annonça également qu’il serait impossible pour lui de participer à des cours de carrière et d’être déployé jusqu’à la fin des procédures disciplinaires.

 

7.         Les rumeurs qui circulèrent relativement aux faits reprochés au Caporal Handfield de même que son exclusion du bataillon lui causèrent des problèmes de santé mentale pour lesquels il dû consulter et entrainèrent une perte de poids. »

 

[9]               Lorsqu’un tribunal est en présence d’une suggestion commune relativement à la sentence qu’il devrait imposer à un contrevenant, le juge du procès doit appliquer le critère de l’intérêt public et il ne devrait pas écarter une recommandation conjointe à moins que ce qui est proposé soit susceptible de déconsidérer l’administration de la justice ou contraire à l’intérêt public.

 

[10]           La Cour peut s’écarter d’une recommandation faite par les avocats seulement « lorsque des personnes renseignées et raisonnables estimeraient que la peine proposée fait échec au bon fonctionnement du système de justice » tel que mentionné dans l’arrêt R. c. Anthony-Cook, 2016 CSC 43 au paragraphe 42. Faire « échec au bon fonctionnement du système de justice » est essentiellement le paramètre que doit considérer le juge lorsqu’il impose une sentence dans le cadre d’une suggestion commune.

 

[11]           Dans le même arrêt, la Cour suprême a reconnu que « [l]e fait, pour les avocats du ministère public et de la défense, de convenir d’une recommandation conjointe relative à la peine en échange d’un plaidoyer de culpabilité constitue une pratique acceptée et tout à fait souhaitable. Les ententes de cette nature sont monnaie courante, et elles sont essentielles au bon fonctionnement de notre système de justice pénale et de notre système de justice en général », y compris les procès devant la cour martiale.

 

[12]           Les avocats sont toutefois tenus de donner au tribunal un compte rendu complet de la situation du délinquant, des circonstances entourant la commission de l’infraction ainsi que de la recommandation conjointe sans attendre que le juge du procès en fasse la demande. À cet égard, je me déclare satisfait des explications et de l’information fournie par les avocats.

 

[13]           Le procureur de la poursuite a mis en lumière les principes et objectifs qui soutenaient la recommandation qui a été faite à la Cour et qui visaient essentiellement à dénoncer la commission de l’infraction ainsi qu’à dissuader de manière spécifique et générale de la commettre. Je crois que ces objectifs, dans le cadre de la suggestion, ont été atteints.

 

[14]           Le caporal Handfield s’est enrôlé une première fois au sein des FAC en février 2007. Il a quitté en 2011-2012, pour revenir en 2013. Il exerce le métier de fantassin et, il a démontré une bonne performance et un très bon potentiel au point où il a été considéré pour être désigné caporal-chef, ce qui ne s’est pas produit en raison, en ce que je comprends, de l’incident qui fait l’objet de la présente cour. Le caporal Handfield agissait à titre d’instructeur à l’égard de candidats, donc il exerçait une autorité sur ces gens-là, il y avait une relation d’autorité. Il a fait des blagues à connotation sexuelle, mais qui ne comportaient pas d’intentions qui allaient plus loin que ça. Il n’a pas mesuré la portée de telles blagues pour différentes raisons. En tant que leader,  le respect de l’intégrité psychologique et physique des subordonnés est une valeur essentielle au sein des FAC, cela fait partie du code d’éthique. Je comprends qu’en procédant ainsi,  peut-être sans le savoir, mais vous vous êtes quand même attaqué à l’intégrité physique ou psychologique de ces personnes-là et c’est ce qui a mené  à l’accusation qui a été portée contre vous. D’autre part, vous en avez reconnu la teneur et vous avez pris une totale responsabilité par rapport à ces gestes. Je comprends que pour vous que c’est une leçon apprise et, jusqu’à un certain point, chère payée parce que vous vous êtes retrouvé à avoir une carrière mise sur la glace pendant un long moment. Peut-être plus long que vous l’auriez pensé. Et quand je dis « chère payée »,  ce n’est pas sur le plan disciplinaire, c’est sur le plan administratif. Vous comprendrez que quelque chose qui s’est produit en 2016 et qui est réglé en 2018, soit presque deux ans plus tard, est une chose qui me préoccupe. parce que c’est quelque chose qui aurait pu être fait probablement plus rapidement et, tout à l’heure, lorsque je parlais du rapport de la vérificatrice générale, je veux juste que, même si c’est quelque chose qui ne vous touche pas personnellement, l’institution militaire est au courant qu’on doit procéder rapidement en matière disciplinaire. C’est peut-être une leçon que vous devez retenir, vous, si un jour vous devenez chef. Vous comprendrez que s’il y a un écart de conduite au sein de votre propre organisation, vous serez peut-être le premier à dire « Oui, cette personne-là doit faire l’objet d’une mesure disciplinaire, » mais peut-être que vous voudrez vous assurer que c’est traité dans les délais requis pour éviter de faire subir à cette personne-là ce que vous vous avez subi en termes d’attente des autres conséquences que ça peut amener. Et c’était ça ma préoccupation. Mes commentaires n’excusent pas les gestes pour lesquels vous avez reconnu votre responsabilité, mais c’est une préoccupation que comme juge, j’ai. Moi, tout ce que j’ai c’est le résultat de tout ça et c’est important pour moi, parce que ça vous permet aujourd’hui, si je comprends bien, de tourner la page et de regarder sur le plan administratif à nouveau une possibilité de progression de carrière compte tenu de ce que j’ai entendu à votre égard, c’est-à-dire le fait que vous êtes quelqu’un avec un très bon potentiel et que, malgré les accusations, continuer à performer. Donc je veux lancer un message positif, continuez dans ce sens-là, tournez la page, la sentence va être prononcée, mais assurez-vous aussi que ça peut peut-être vous servir à l’égard des autres dans votre carrière lorsque vous aurez peut-être à agir comme chef, c’est quelque chose qui est important de garder à l’esprit.

 

[15]           Ceci dit, je me déclare satisfait que la suggestion commune assure le maintien de la discipline, ne déconsidère pas l’administration de la justice et n’est  pas contraire à l’intérêt public.

 

POUR CES MOTIFS, LA COUR :

 

[16]           DÉCLARE le caporal Handfield coupable du premier chef d’accusation, soit un comportement préjudiciable au bon ordre et à la discipline contrairement à l’article 129 de la LDN.

 

[17]           CONDAMNE le caporal Handfield à une réprimande et une amende au montant de 700 dollars. L’amende devra être payée en deux versements mensuels de 350 dollars. Le premier paiement devra être versé le 1er août et le second paiement, le 1er septembre.


 

Avocats :

 

Le directeur des poursuites militaires, tel que représenté par le major M.L.P.P. Germain

 

Major A. Gélinas-Proulx, service d’avocats de la défense, avocat du caporal A.J.A. Handfield

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