Courts Martial

Decision Information

Summary:

Date of commencement of trial: 9 December 2020

Location: Canadian Forces Base Esquimalt, building 30-N, 30 Nelles Street, Victoria, BC

Language of the trial: French

Charge:

Charge 1: S. 129 NDA, conduct to the prejudice of good order and discipline.

Results:

FINDING: Charge 1: Guilty.
SENTENCE: A fine in the amount of $1500.

Decision Content

Warning : this document is available in French only.

 

COUR MARTIALE

 

Référence :  R. c. Demers, 2020 CM 5017

 

Date :  20201209

Dossier :  202048

 

Cour martiale permanente

 

Base des Forces canadiennes Esquimalt

Victoria (Colombie-Britannique) Canada

 

Entre :

 

Sa Majesté la Reine

 

- et -

 

Enseigne de vaisseau de 2e classe A.A. Demers, contrevenante

 

 

En présence du :  Capitaine de frégate C.J. Deschênes, J.M.


 

MOTIFS DE LA SENTENCE

 

(Oralement)

 

Introduction

 

[1]               L’enseigne de vaisseau de 2e classe Demers a plaidé coupable à une accusation portée aux termes de l’article 129 de la Loi sur la défense nationale (LDN), soit de s’être servie d’un document « Programme FORCE Program » entre le 21 octobre et le 25 octobre 2019 à Esquimalt, Colombie-Britannique, sachant que ledit document était contrefait. La Cour a accepté et enregistré son plaidoyer de culpabilité. Dans le cadre de la procédure de la détermination de la peine, les parties ont présenté à la Cour une recommandation conjointe pour l’imposition d’une amende de 1 500 $. La Cour doit maintenant examiner la peine suggérée par les parties afin de déterminer si celle-ci satisfait aux critères applicables.

 

Circonstances entourant la commission de l’infraction

 

[2]               Lorsqu’elle détermine le bien-fondé de la recommandation conjointe, la Cour doit tenir compte des circonstances qui entourent la commission de l’infraction, circonstances se résumant ainsi :

 

a)                  Pendant son service à l’unité de l’École de la flotte des Forces canadiennes Esquimalt en tant qu’officier de guerre navale, l’enseigne de vaisseau de 2e classe Demers présente une demande de reclassement volontaire – sans instruction (RV-SI) en octobre 2019 pour un changement de métier;

 

b)                  L’ordre qui gouverne ce processus, le CANFORGEN 055-19, prévoit que tous les candidats au RV-SI doivent, à la date de clôture de la campagne, entre autres exigences, avoir une évaluation de la forme opérationnelle requise dans le cadre de l’emploi (FORCE) valide ou rencontrer la norme d’aptitude physique des Forces armées canadiennes (FAC);

 

c)                  À l’examen de la demande de l’enseigne de vaisseau de 2e classe Demers, l’enseigne de vaisseau de 1re classe Glen qui s’occupe de l’administration de ce type de demande à Esquimalt, l’informe le 18 octobre 2019 par courriel que son évaluation FORCE est expirée, et que cette dernière doit être valide pour que la demande de RV-SI puisse être considérée;

 

d)                  Le 21 octobre 2019, l’enseigne de vaisseau de 2e classe Demers écrit dans un courriel à l’enseigne de vaisseau de 1re classe Glen qu’elle a réussi son évaluation FORCE à l’été 2019. Dans le même courriel, elle lui demande de fournir la date butoir pour présenter une demande RV-SI conforme aux exigences du CANFORGEN 055-19;

 

e)                  L’enseigne de vaisseau de 1re classe Glen lui répond que la date limite est le 25 octobre 2019;

 

f)                   L’échange de courriels se poursuit le même jour, soit le 21 octobre 2019 où, vers la fin de l’échange, l’enseigne de vaisseau de 2e classe Demers indique qu’elle a en sa possession le document prouvant qu’elle a réussi son évaluation FORCE, qu’elle espérait que le tout était conforme, enjoignant une pièce apparaissant dans le courriel avec le nom « FORCES test 2019.jpg »;

 

g)                  La pièce en question est un document intitulé « Programme FORCE Program » qui semble démontrer que l’enseigne de vaisseau de 2e classe Demers a satisfait à la norme de l’évaluation FORCE le 13 août 2019. Ce document est signé par Madame Evelyn Gohier à titre d’évaluatrice;

 

h)                  À la suite de la réception du document en question, l’enseigne de vaisseau de 1re classe Glen constate que les dates indiquées sur celui-ci semblent avoir été falsifiées. En conséquence, elle contacte madame Katherine Andrews, employée du programme de soutien du personnel (PSP), afin de s’assurer de la validité de l’évaluation en question;

 

i)                   Le même jour, soit le 21 octobre 2019, l’enseigne de vaisseau de 1re classe Glen écrit un courriel à l’enseigne de vaisseau de 2e classe Demers pour lui demander d’apporter le document en personne, à son bureau;

 

j)                   Le ou vers le 25 octobre 2019, en l’absence de l’enseigne de vaisseau de 1re classe Glen, madame Gail Whicroft, adjointe administrative, reçoit en son nom le document « Programme FORCE Program » d’une personne qui s’identifie comme étant l’enseigne de vaisseau de 2e classe Demers;

 

k)                  Quelques jours plus tard, soit le 31 octobre 2019, l’enseigne de vaisseau de 1re classe Glen contacte de nouveau madame Andrews pour lui indiquer qu’elle a trouvé une copie carbone de l’évaluation FORCE de l’enseigne de vaisseau de 2e classe Demers datée de 2015;

 

l)                   Les résultats de cette évaluation FORCE sont identiques à ceux de son évaluation FORCE datée du 13 août 2019;

 

m)               De plus, son certificat de service indique que la contrevenante était en mer à bord du Navire canadien de Sa Majesté (NCSM) Edmonton entre le 10 août et le 9 septembre 2019;

 

n)                  Le NCSM Edmonton n’a procédé à aucune évaluation FORCE pendant cette période;

 

o)                  Une enquête a également permis d’apprendre que madame Evelyn Gohier a quitté PSP en 2016;

 

p)                  L’enseigne de vaisseau de 2e classe Demers a utilisé son évaluation FORCE de 2015 pour refléter faussement qu’elle avait réussi son évaluation FORCE en 2019.

 

[3]               La contrevenante a formellement admis en cour la véracité des faits tels que décrits dans le sommaire des circonstances.

 

Question en litige

 

[4]               La Cour doit maintenant déterminer si la peine proposée, soit une amende au montant de 1 500 $, serait susceptible de déconsidérer l’administration de la justice, ou serait par ailleurs contraire à l’intérêt public.

 

Position des parties

 

Poursuite

 

[5]               Le procureur de la poursuite soumet que la suggestion commune satisfait au critère de l’intérêt public puisque le comportement en lien à la commission de l’infraction constitue non seulement une violation au code de discipline militaire, mais également au Code de valeurs et d’éthique du Ministère de la Défense nationale et des Forces armées canadiennes. Il réfère à la lettre du commandant de la contrevenante (pièce 7) qui explique qu’un commandant doit pouvoir se fier au jugement et à l’intégrité de ses officiers pour prendre les bonnes décisions et doit donc avoir la confiance nécessaire en eux, afin de les laisser seuls sur la passerelle. C’est cette confiance qui permet à un commandant de prendre des rapports en toute confiance et de prendre des décisions pendant la nuit.

 

[6]               La poursuite soumet que les objectifs qui doivent avoir préséance dans le cas présent sont les objectifs de dénonciation ainsi que les objectifs de dissuasion générale et spécifique. La poursuite affirme que l’objectif lié à promouvoir l’efficacité opérationnelle des FAC doit aussi être considéré. Elle explique la raison d’être de l’évaluation FORCE, en particulier qu’elle sert à évaluer la capacité des membres des FAC à remplir les tâches militaires et à satisfaire aux critères de l’universalité de service afin de promouvoir l’efficacité opérationnelle des FAC.

 

[7]               À titre de facteurs aggravants, elle énumère le manque d’intégrité dont l’enseigne de vaisseau de 2e classe Demers a fait preuve. La contrevenante a priorisé ses intérêts personnels au détriment de ceux des FAC. Il y avait également un degré de préméditation impliqué dans la commission de l’infraction. De plus, la contrevenante est officier depuis 2014, et en tant qu’officier elle se doit de montrer l’exemple. Qu’elle soit détentrice de la commission d’officier aggrave sa peine.

 

[8]               À titre de facteurs atténuants, la poursuite note le plaidoyer de culpabilité, l’absence de fiche de conduite ainsi que la situation personnelle de la contrevenante, en particulier les troubles de santé mentale dont elle est affectée. La poursuite a aussi expliqué que ces troubles n’atténuaient en rien l’intention coupable requise pour prouver hors de tout doute que l’enseigne de vaisseau de 2e classe Demers a commis l’infraction.

 

[9]               Le procureur a passé en revue cinq décisions qu’il jugeait applicables en l’espèce, afin de démontrer que la suggestion commune est conforme au principe de l’harmonisation des peines. Dans un premier temps, R. c. Buckley, 2016 CM 1001, où le contrevenant, l’adjudant-maître Buckley, avait admis sa culpabilité à deux chefs d’accusation portés en vertu de l’article 125 de la LDN. En plus de faire face à des accusations objectivement plus graves, d’autres facteurs aggravants avaient été prouvés lors de l’audition de la sentence qui était contestée. Un blâme et une amende au montant de 3 000 $ étaient imposés comme peine.

 

[10]           Dans R c Lewis, 2012 CM 2006, le contrevenant, un colonel, était aussi dans une situation jugée plus sérieuse. Après avoir plaidé coupable à une accusation au terme de l’article 125 de la LDN, il était condamné au paiement d’une amende au montant de 5 000 $.

 

[11]           La poursuite a aussi référé à l’arrêt R c Collins, 2012 CM 4017. Le maître de 2e classe Collins avait plaidé coupable à une accusation portée en vertu de l’alinéa 125a) de la LDN pour s’être fait passer pour l’un de ses amis qui était aussi un membre des FAC, afin de prétendre que ce dernier avait réussi le test EXPRES. La suggestion commune des parties, soit une réprimande et une amende de 1 200 $, étaient acceptée et imposée par la Cour.

 

[12]           Dans une autre décision, R. c. Chabot-Leroux, 2017 CM 4015, le contrevenant avait plaidé coupable à deux chefs d’accusation en vertu de l’article 130 de la LDN, pour avoir fait un faux document d’une part, et pour avoir employé un document contrefait d’autre part, contrairement respectivement aux alinéas 366(1)a) et 368(1)a) du Code criminel. La recommandation conjointe, soit un blâme et une amende de 1 750 $, était acceptée par la Cour.

 

[13]           Et finalement, R. c. Derival, 2018 CM 4009, un matelot de 1re classe avait utilisé un formulaire de congé contrefait, lui autorisant trente-trois jours de congé de maladie. Dans cette cause, une réprimande et une amende au montant de 1 800 $ étaient imposées comme peine.

 

Défense

 

[14]           La défense appuie les prétentions de la poursuite quant aux objectifs visés pour la peine à imposer, c’est-à-dire de dénoncer le comportement et de dissuader les autres qui pourraient considérer commettre une infraction. La défense précise toutefois que la recommandation conjointe servira aussi à encourager les efforts de réhabilitation de la contrevenante.

 

[15]           La défense énumère à titre de facteurs atténuants que la contrevenante n’a aucun antécédent. De surcroît, puisqu’elle est jeune et n’a que six années d’expérience dans les FAC, elle a le potentiel d’offrir de nombreuses années de service. L’enseigne de vaisseau de 2e classe Demers a accepté publiquement ses torts. Elle a amorcé son processus de réhabilitation. La défense soumet que ce procès a déjà exercé un effet dissuasif sur la contrevenante. Cette dernière a vécu beaucoup de difficultés dans son métier, et elle a conséquemment demandé un reclassement volontaire dans l’espoir de se soustraire à la détresse que ces difficultés lui causent. Elle a subi un diagnostic de trouble dissociatif, et souffre de dépression depuis 2018. La défense plaide que les problèmes liés à la santé mentale de la contrevenante constituent un facteur atténuant dont la Cour devrait tenir compte dans le cadre de l’examen de la recommandation conjointe.

 

[16]           En conséquence, l’imposition comme peine d’une amende de 1 500 $ permet de satisfaire aux objectifs de dénonciation et dissuasion tout en permettant la réhabilitation de l’enseigne de vaisseau de 2e classe Demers. Puisque la peine satisfait au critère de l’intérêt public, la Cour devrait accepter la recommandation conjointe et ordonner le paiement de l’amende en trois versements mensuels de 500 $.

 

La preuve

 

[17]           La poursuite a déposé en preuve la documentation énumérée à l’article 111.17 des Ordonnances et règlements royaux applicables aux Forces canadiennes, soit un sommaire des circonstance, les Points pertinents des états de service de l’accusé en date du 30 novembre 2020, une copie certifiée du Sommaire des dossiers personnels des militaires, datée du 30 novembre 2020, ainsi qu’une copie certifiée de son guide de solde en date du 30 novembre 2020. Elle a aussi déposé une lettre intitulée « Déclaration d’impact » signée par le capitaine de frégate Fortin, datée du 21 septembre 2020. La défense a déposé de consentement, quant à elle, un sommaire des faits.

 

L’analyse

 

[18]           Dans le cadre de la détermination de la peine, le juge doit appliquer les principes que l’on retrouve dans la LDN, en particulier le principe fondamental qui établit que la peine doit être proportionnelle à la gravité de l’infraction et au degré de responsabilité du contrevenant. Une sanction juste doit viser un ou plusieurs objectifs énumérés dans la LDN, notamment la dénonciation des comportements illégaux, la dissuasion tant générale que spécifique, et la réinsertion sociale des contrevenants. La peine doit refléter les circonstances aggravantes ou atténuantes liées à la perpétration de l’infraction et à la situation du contrevenant. Elle doit aussi être semblable à celles infligées à des contrevenants pour des infractions semblables commises dans des circonstances semblables. Elle se doit d’être la peine la moins sévère possible qui permette de maintenir la discipline, l’efficacité et le moral des FAC. Finalement, les conséquences indirectes du verdict de culpabilité ou de la sentence doivent être prises en considération lors de la détermination de la peine.

 

[19]           Dans un système adversaire tel que le nôtre, les avocats de la poursuite et de la défense protègent les intérêts de la partie qu’ils représentent et défendent ceux-ci face à la partie qu’ils opposent. Lorsque les parties conviennent de recommander conjointement une peine, il est présumé qu’elles ont considéré les principes applicables à la détermination de la peine tout en veillant aux intérêts de leur client respectif. En effet, les parties ont une connaissance approfondie des faits pertinents de la cause, ainsi que des forces et des faiblesses de la preuve. La preuve soumise, ainsi que les plaidoiries des avocats, doivent faire état des éléments que les parties ont considérés afin de justifier leur position en fonction des faits de la cause, car le critère que le juge doit appliquer lors de l’appréciation de la recommandation conjointe a pour effet de limiter grandement sa discrétion dans ce contexte particulier.

 

[20]           Selon ce critère appelé critère de l’« intérêt public » établi par la Cour suprême dans sa décision R. c. Anthony-Cook, 2016 CSC 43, le juge du procès ne devrait rejeter la recommandation conjointe que si la peine proposée est susceptible de déconsidérer l’administration de la justice ou si elle n’est pas, par ailleurs, dans l’intérêt public. Afin de déterminer si la peine satisfait au critère de l’intérêt public, la Cour doit examiner la recommandation conjointe à la lumière des circonstances entourant la commission de l’infraction, la situation du contrevenant, ce qui inclut la considération des facteurs aggravants et atténuants, et ce, en considération des principes de la détermination de la peine, tel qu’expliqué plus tôt.

 

Facteurs aggravants

 

[21]           Dans le cas présent, la Cour a accepté et considéré les facteurs aggravants suivants :

 

a)                  La contrevenante est un officier des FAC. En plus de devoir obéir aux attentes qu’entraîne l’obtention de sa commission d’officier, elle est dans une position de leadership, et se doit donc de montrer l’exemple. Quel message sa conduite envoie-t-elle à l’équipage? Comment peut-elle remplir son rôle disciplinaire pour ce type de conduite?

 

b)                  La conduite démontre un manque d’intégrité, qui risque d’avoir comme conséquence de miner la confiance que les supérieurs, les pairs et les subalternes doivent avoir en elle. Pour un officier de guerre navale, ce bris de confiance est lourd de conséquences, tel que le démontre la lettre du commandant de la contrevenante, où il indique que, puisqu’un doute risque de subsister quant à la véracité de l’information fournie par la contrevenante, l’information en question devrait être revérifiée, situation qui pourrait s’avérer critique en temps d’urgence. Il serait erroné de minimiser ou banaliser la gravité du comportement en question. Cette infraction est objectivement grave, prévoyant comme peine maximale la destitution ignominieuse du service de Sa Majesté;

 

c)                  Il y avait aussi un degré de sophistication dans la commission de l’infraction.

 

Facteurs atténuants

 

[22]           La Cour a aussi considéré les facteurs atténuants suivants :

 

a)                  L’enseigne de vaisseau de 2e classe Demers a avoué sa culpabilité, ce qui constitue un facteur significatif dans le cadre de la mitigation de sa peine;

 

b)                  Il n’y a pas eu de conséquence en lien avec l’utilisation du document qui a été intercepté à temps;

 

c)                  La contrevenante n’a aucun antécédent criminel ou disciplinaire.

 

Situation de la contrevenante

 

[23]           Il n’y a pas eu de preuve présentée quant à la cause spécifique qui a poussé la contrevenante à commettre l’infraction, à savoir si elle était physiquement capable de réussir l’évaluation, mais qu’elle s’est vu manquer de temps pour être évaluée avant la date butoir, ou si elle n’était tout simplement pas apte à réussir l’évaluation pour l’année 2019. La Cour ne peut donc tirer aucune conclusion à cet égard. Néanmoins, la Cour a tenu compte de la situation de la contrevenante au niveau de sa santé mentale et de la raison qui l’a poussée à commettre l’infraction, c’est-à-dire d’échapper à une profession militaire qui l’accablait.

 

[24]           Au niveau de sa situation personnelle, l’enseigne de vaisseau de 2e classe Demers s’est enrôlée dans les FAC le 10 juillet 2014. Elle a 23 ans et a effectivement de nombreuses années de service à offrir.

 

Harmonisation des peines

 

[25]           En plus de considérer les facteurs aggravants et atténuants ainsi que la situation personnelle de la contrevenante dans le cadre de l’examen de la recommandation conjointe, la Cour doit aussi tenir compte du principe de l’harmonisation des peines, c’est-à-dire de considérer les peines octroyées pour ce type d’infraction commise dans des circonstances semblables. À ce titre, en plus des décisions soumises par la poursuite, la Cour a aussi examiné les décisions suivantes.

 

[26]           Premièrement, dans la cause R c Miller, 2012 CM 2014, une lieutenant-colonel plaidait coupable à trois accusations similaires pour avoir remis à un commis une photocopie du formulaire « Programme EXPRES FC » dans lequel elle affirmait faussement avoir réussi le test d’aptitude physique des FAC. Plus tard, elle a de nouveau soutenu qu’elle avait réussi le test et a demandé que l’échec consigné dans son dossier d’appréciation soit supprimé. L’une des infractions était objectivement plus grave que dans le cas présent. La recommandation conjointe des parties, soit un blâme et une amende au montant de 3 000 $, était acceptée par la Cour.

 

[27]           Dans R c Lacroix, 2013 CM 1008, le capitaine Lacroix avait fait disparaître un document intitulé « Revue de développement personnel » parce que le document comportait des mentions défavorables à son égard. Lorsque questionné par sa chaîne de commandement, le contrevenant avait reproduit une nouvelle version plus flatteuse du document. Il plaidait coupable à trois accusations similaires dont l’une était objectivement plus grave qu’en l’espèce. Considérant les délais importants dans cette affaire, la Cour acceptait la suggestion commune, soit un blâme et une amende au montant de 2 000 $.

 

[28]           Dans une troisième affaire, R. c. Élève-Officier A.D. Sullivan, 2006 CM 72, un plaidoyer de culpabilité relativement à deux accusations, dont l’une était objectivement plus grave que dans le cas présent, était accepté par la Cour. Un blâme et une amende au montant de 2 000 $ avaient été imposés par le juge militaire.

 

[29]           Dans R. c. ex-Soldat C. Bordeleau, 2005 CM 2019, le soldat Bordeleau avait porté un insigne et une décoration militaire lors d’une parade, et après avoir été questionné à ce sujet, il avait utilisé un document contrefait indiquant faussement qu’il s’était mérité l’insigne. Le contrevenant avait été libéré au moment de son procès. Une réprimande et une amende au montant de 300 $ lui ont été imposées par la Cour.

 

[30]           Plus récemment, dans R. c. Soudri, 2015 CM 3008, une cause contestée où l’accusation similaire du Code criminel avait été portée, le sous-lieutenant Soudri était trouvé coupable pour avoir utilisé à neuf reprises des attestations de visites médicales contrefaites. La Cour lui imposait un blâme avec une amende de 2 000 $.

 

[31]           À l’examen des causes ci-haut mentionnées qui comportent toutes des éléments aggravants non existants dans le cas présent, ce qui explique en partie et à juste titre la raison pour laquelle la recommandation conjointe présentée en l’espèce ne comprend ni réprimande, ni blâme, mais une amende relativement onéreuse, la Cour se déclare satisfaite que la recommandation conjointe est conforme au principe de l’harmonisation des peines.

 

[32]           Eu égard aux considérations particulières qui s’appliquent lors de l’appréciation du caractère acceptable d’une recommandation conjointe, la Cour conclut que cette dernière est conforme au critère de l’intérêt public. Une peine constituée d’une amende de 1 500 $ permet de satisfaire aux objectifs de dénonciation et dissuasion tout en permettant la réhabilitation de la contrevenante.

 

[33]           Bien que la conduite de l’enseigne de vaisseau de 2e classe Demers risque d’entacher sa carrière et sa réputation pour un certain temps, notamment parce que sa conduite a miné la confiance que sa chaîne de commandement avait en elle, il est loisible à la contrevenante, en déployant les efforts nécessaires, de démontrer, si c’est bien le cas, qu’il s’agissait d’une erreur de parcours. Il lui revient également de démontrer qu’elle est taillée dans la même étoffe que font les bons leaders.

 

POUR CES RAISONS, LA COUR:

 

[34]           DÉCLARE l’enseigne de vaisseau de 2e classe Demers coupable d’une infraction au terme de l’article 129 de la LDN soit comportement préjudiciable au bon ordre et à la discipline.

 

[35]           LA CONDAMNE à une amende d’un montant de 1 500 $, payable en trois versements mensuels de 500 $, le premier étant dû pour le 15 janvier 2021.


 

Avocats :

 

Le directeur des poursuites militaires, tel que représenté par le major M.-A. Ferron

 

Major A. Gélinas-Proulx, service d’avocats de la défense, avocat de l’enseigne de vaisseau de 2e classe Demers

 

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