Courts Martial

Decision Information

Summary:

Date of commencement of trial: 8 November 2021

Location: 2 Canadian Division Support Base Valcartier, the Academy, building 534, room 227, Courcelette, QC

Language of the trial: French

Charges:

Charge 1: S. 130 NDA, assault causing bodily harm to a person (para. 267b) CCC).
Charge 2: S. 130 NDA, assault (para. 266a) CCC).
Charge 3: S. 86 NDA, fought with a person subject to the Code of Service Discipline.
Charge 4: S. 97 NDA, drunkenness.

Results:

FINDINGS: Charge 1: Guilty of the lesser and included offence of assault (S. 266 CCC). Charges 2, 4: Withdrawn. Charge 3: Guilty.
SENTENCE: A severe reprimand and a fine in the amount of $3000.

Decision Content

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COUR MARTIALE

 

Référence : R. c. Bruyère, 2021 CM 5015

 

Date : 20210921

Dossier : 202033

 

Procédure préliminaire

 

Centre Asticou

Gatineau (Québec) Canada

 

Entre :

 

Soldat A. Bruyère, requérant

 

- et -

 

Sa Majesté la Reine, intimée

 

 

En présence du : Capitaine de frégate C.J. Deschênes, J.M.


 

DÉCISION CONCERNANT LA REQUÊTE EN IRRECEVABILITÉ DE LA DEMANDE DE DÉCLARATION D’INCONSTITUTIONNALITÉ DE L’ARTICLE 33.1 DU CODE CRIMINEL 

 

Introduction

 

[1]               Le soldat Bruyère fait face à quatre chefs d’accusation, étant respectivement de s’être livré à des voies de fait causant des lésions corporelles, de s’être livré à des voies de fait simple, de s’être battu avec un justiciable du code de discipline militaire et d’avoir été ivre. Ces infractions auraient été commises le ou vers le 18 décembre 2018 à Cayo Santa Maria, à Cuba.

 

[2]               La défense présente maintenant une requête demandant une déclaration en vertu du paragraphe 52(1) de la Loi constitutionnelle de 1982 selon laquelle l’article 33.1 du Code criminel viole les principes constitutionnels protégés par l’article 7 et l’alinéa 11d) de la Charte canadienne des droits et libertés, et est donc inopérant. En réponse, la poursuite a soumis une requête en irrecevabilité. Voici les raisons au soutien de ma décision affectant ces deux requêtes.

 

Contexte

 

[3]               Par ordre de convocation datée du 9 novembre 2020, l’accusé devait comparaître pour être jugé par une cour martiale le 12 avril 2021. Le 24 février 2021, l’accusé déposait une requête alléguant la violation de son droit d’être jugé par un tribunal indépendant et impartial et demandait l’arrêt des procédures contre lui. Il demandait également une déclaration en vertu du paragraphe 52(1) de la Loi constitutionnelle de 1982 selon laquelle les articles 12, 17, 18 et 60 de la Loi sur la défense nationale sont sans effet dans la mesure où ils violent les principes constitutionnels de l’indépendance judiciaire protégés par l’alinéa 11d) de la Charte.

 

[4]               Le 1er mars 2021, l’accusé présentait une requête en changement de date.  Au soutien de sa demande, il alléguait que la tenue de son procès avant que la décision finale de la Cour d’appel de la cour martiale (CACM) dans le dossier Cloutier soit rendue pourrait violer ses droits constitutionnels, notamment celui d’être jugé par un tribunal impartial et indépendant. Dans la même volée, il mentionnait son intention de signifier une requête demandant que cette Cour conclue que l’article 33.1 du Code criminel viole les droits garantis par la Charte, spécifiquement l’article 7 et l’alinéa 11d). Faisant droit à cette demande en changement de date, et ordonnant que l’accusé soumette son avis de requête portant sur l’inconstitutionnalité de l’article 33.1 ainsi que l’avis constitutionnel à ce titre au plus tard le 10 août 2021, le procès était fixé au 8 novembre 2021.

 

[5]               Le 10 août 2021, l’accusé présentait son avis de requête ainsi que l’avis constitutionnel requis. En réponse, la poursuite déposait le 8 septembre 2021 sa requête en irrecevabilité, alléguant que la demande de déclaration d’inconstitutionnalité de l’article 33.1 du Code criminel était futile, car le requérant n’a pas établi la vraisemblance d’une défense d’intoxication volontaire extrême. À la suite d’une conférence téléphonique avec les parties, l’accusé présentait une requête amendée en date du 15 septembre 2021 avec pièces en onglet.

 

[6]               Étant donné la décision de la CACM dans le dossier Cloutier, la requête de l’accusé alléguant la violation de son droit d’être jugé par un tribunal indépendant et impartial a été sommairement rejetée lors de l’audition tenue le 16 septembre 2021. Lors de cette même audition, j’ai demandé aux avocats du soldat Bruyère de présenter un résumé de la preuve et de leurs prétentions au soutien de leur requête contestant la constitutionnalité de l’article 33.1 du Code criminel. La poursuite a, par la suite, présenté sa requête en irrecevabilité. La défense a eu l’opportunité d’y répondre lors de la même audition.

 

Question en litige

 

[7]               Afin de déterminer si la requête en irrecevabilité de la poursuite doit être accueillie, je dois me demander s’il existe un fondement factuel suffisant qui supporte la contestation constitutionnelle de l’article 33.1 tel que soumise par l’accusé, en particulier si ses prétentions et la preuve fournies par ce dernier quant à sa prétendue ivresse lors de la commission alléguée des infractions sont suffisantes pour établir un fondement factuel.

 

Position des parties

 

[8]               L’accusé explique que, dans les circonstances, la défense qu’il entend invoquer est composée d’une procédure en deux temps :

 

a)                  étant donné que la défense d’intoxication volontaire extrême fait présentement l’objet d’une prohibition statutaire au terme de l’article 33.1 du Code criminel, cette Cour doit tout d’abord se pencher sur la question de la déclaration d’inconstitutionnalité de cet article. A titre de fondement factuel au soutien de sa requête, l’accusé n’a qu’à établir l’hypothèse qu’il pourrait soulever ce moyen de défense au procès;

 

b)                  advenant que sa requête soit accueillie et qu’une déclaration d’inconstitutionnalité de l’article 33.1 soit prononcée, la deuxième étape consiste à la détermination de l’admissibilité de cette défense par le biais d’un voir-dire. C’est à cette deuxième étape que le critère de la vraisemblance entre en jeu.

 

[9]               Il soumet qu’à la première étape de la procédure, l’accusation d’ivresse à laquelle il devra répondre établit en grande partie un fondement factuel satisfaisant au soutien de sa requête. Il soumet également que la divulgation de la preuve révèle qu’un ou des témoins l’ont vu en état d’ébriété lors de la commission alléguée des trois autres infractions. En d’autres termes, les éléments présents dans le dossier ainsi que ceux fournis au soutien de sa requête amendée sont suffisants pour établir un fondement factuel. Il prétend donc que la requête en irrecevabilité, qu’il s’explique mal, est prématurée. S’appuyant sur l’arrêt R. c. Mills, 2019 CSC 22 de la Cour suprême du Canada (CSC) ainsi que sur les arrêts de la cour martiale dans les dossiers Tait et Stewart qui ont rejeté des requêtes similaires en irrecevabilité sur la question de la constitutionnalité de la procédure établie aux articles 278.93 et 278.94 du Code criminel (décisions non publiées), il soutient qu’il n’a pas à démontrer une trame factuelle pour appuyer sa requête en inconstitutionnalité de l’article 33.1 du Code criminel.

 

[10]           La défense confirme que sa contestation constitutionnelle ne concerne évidemment pas le quatrième chef d’accusation. Elle soumet qu’elle devra au procès, si sa requête est accueillie, admettre l’actus reus des infractions concernées pour appuyer cette défense et prouver, par preuve d’expertise, l’intoxication de l’accusé.

 

[11]           La poursuite quant à elle soumet que même prouvé, le degré d’intoxication de l’accusé lors de la perpétration alléguée des infractions ne permettrait pas, de toute façon, que ce moyen de défense soit soulevé. La défense d’intoxication volontaire extrême, qui prend son origine dans la common law, pourrait être considérée seulement dans les rares cas où il y a preuve d’automatisme ou d’aliénation mentale découlant de l’intoxication. La poursuite affirme que pour établir un fondement factuel au soutien de la requête de la défense, cette dernière doit satisfaire au critère de la vraisemblance. Les principes de l’arrêt Mills sont donc facilement distinguables. Puisque l’accusé a fait défaut d’établir la vraisemblance de cette défense dans le cas en l’espèce, la poursuite soumet que la requête de l’accusé est frivole. En application des préceptes établis dans l’arrêt R. c. Cody, 2017 CSC 31, la poursuite demande en conséquence que je rejette sommairement la requête de la défense.

 

Preuve

 

[12]           À l’appui de sa demande, l’accusé a déposé sa requête originale datée du 10 août 2021 avec son avis au procureur général du Canada et aux provinces; son avis de requête amendée en date du 15 septembre 2021 avec au soutien de celle-ci, en liasse, le procès-verbal de procédure disciplinaire daté du 10 mars 2020, l’acte d’accusation en date du 24 juillet 2020 ainsi qu’un extrait d’un rapport de police militaire de 107 pages ayant pour titre « Imprimé d’évènement général (Voies de fait (Outcan)). L’extrait est composé de cinq pages largement caviardées et numérotées des pages 27, 31, 47, 49 et 84 du rapport. Il a aussi déposé en preuve le curriculum vitae de l’expert dont il entend obtenir l’expertise en expliquant que les formalités concernant la présentation de la preuve d’expert suivraient en temps opportun, le cas échéant.

 

Analyse

 

Le droit

 

[13]           L’article 33.1 du Code criminel prévoit que ne constitue pas un moyen de défense à une infraction dont les éléments constitutifs est l’atteinte ou la menace d’atteinte à l’intégrité physique d’une personne, le fait que l’accusé, en raison de son intoxication volontaire, n’avait pas l’intention générale ou la volonté requise pour la perpétration de l’infraction, dans les cas où il s’écarte de façon marquée de la norme de diligence. Cet article a été mis en œuvre en réponse à la réaction du public face à l’arrêt de la CSC R. c. Daviault, [1994] 3 RCS 63. Dans cet arrêt, la CSC avait établi que la défense d’intoxication volontaire extrême équivalant à l’automatisme ou l’aliénation mentale était recevable si la preuve supportait une telle défense.

 

[14]           Dans l'arrêt R. c. Cinous, 2002 CSC 29, la Cour suprême du Canada, reprenant ce qu'elle avait énoncé notamment dans les arrêts R. c. Osolin, [1993] 4 RCS 595 et R. c. Park, [1995] 2 RCS 836, a formulé le critère de la vraisemblance comme préalable à l’ouverture d’un tel moyen de défense :

 

82           Nous concluons que la jurisprudence subséquente à l’arrêt Pappajohn continue d’appuyer le recours à une question à deux volets pour déterminer si un moyen de défense a un fondement probant qui justifie de le soumettre à l’appréciation d’un jury : existe‑t‑il (1) une preuve (2) qui permettrait à un jury ayant reçu des directives appropriées et agissant raisonnablement de prononcer l’acquittement, s’il y ajoutait foi?  Le deuxième volet de la question peut être formulé comme suit : la preuve offerte est‑elle raisonnablement susceptible d’étayer les inférences requises pour acquitter l’accusé?

 

[15]           Dans le cadre d’une contestation constitutionnelle comme celle soulevée par le soldat Bruyère, un fondement factuel suffisant doit être fourni afin d’appuyer sa requête et ainsi permettre que la Cour évalue la question. En effet, un tribunal ne peut pas trancher une affaire en se fondant sur les hypothèses non étayées d’un avocat enthousiaste : voir MacKay c. Manitoba, [1989] 2 R.C.S. 357. La Cour peut donc demander à la défense de résumer le fondement en matière de preuve de la contestation (voir R. v. Kutynec, 1992 CanLII 7751 (ON CA)). A défaut de fournir un fondement factuel, la requête risque d’être rejetée sommairement sans la nécessité de tenir une audition (voir Cody, paragraphe 38).

 

Fondement factuel

 

[16]           Dans les circonstances spécifiques au soldat Bruyère, je n’accepte pas la prétention de la défense, s’appuyant sur l’arrêt Mills, qu’à la première étape de sa démarche en deux temps, il doit simplement établir l’hypothèse qu’il pourrait soulever ce moyen de défense au procès. En effet, la présente contestation est facilement distinguable de celle qui a été traitée dans l’arrêt Mills, pour plusieurs raisons, dont la nature de la contestation elle-même. Dans l’arrêt Mills, la CSC avait accepté l’existence de circonstances hypothétiques raisonnables à titre de fondement factuel puisque la contestation constitutionnelle s’appuyait davantage sur des faits législatifs, ce qui n’est pas le cas en l’espèce. De plus, le régime qui faisait l’objet du débat constitutionnel dans Mills n’exige pas au préalable que le critère de la vraisemblance ouvrant droit à un moyen de défense soit satisfait pour qu’un accusé puisse s’en prévaloir.  Dans le cadre d’une contestation constitutionnelle de l’article 33.1 du Code criminel qui prohibe comme moyen de défense l’intoxication volontaire pour contrer une accusation de crime contre la personne, les faits de la cause sont essentiels pour établir un fondement factuel suffisant; l’accusé se doit de démontrer, au préalable, la vraisemblance de son moyen de défense avant que celui-ci soit soumis à l’appréciation d’un jury. À défaut d’exiger que le critère de vraisemblance soit satisfait au préalable, la Cour risque d’examiner une question purement hypothétique dont le jugement n’aura pas d’impact sur la cause de l’accusé qui la soumet. Il serait inconcevable que la Cour se prononce sur la constitutionnalité d’une défense qui n’est possiblement pas offerte à l’accusé.

 

[17]           D’ailleurs, la nécessité de satisfaire au critère de la vraisemblance à titre de fondement factuel a été abordée spécifiquement dans le cadre de la contestation constitutionnelle de l’article 33.1 Code criminel dans l’arrêt R v Yag, 2021 ABQB 90. Dans cet arrêt, la Cour saisie de la question au procès à la suite de la contre-preuve de la poursuite a rappelé que c’est l’accusé qui a le fardeau de satisfaire au critère de la vraisemblance lorsque cette défense est soulevée. Il doit y avoir une preuve suffisante pour appuyer la vraisemblance de ce moyen de défense:

 

The defence must possess an air of reality, which means that a properly instructed jury acting reasonably could acquit based on the evidence on the record [citation omise].

 

[12]         Specifically in the context of the Daviault defence, the Supreme Court of Canada opined that an assertion of involuntariness on the part of the accused, supported by the logically probative opinion of a qualified expert, would normally provide a sufficient evidentiary foundation for putting the defence to the jury: R v Fontaine, 2004 SCC 27 at para 89.

 

[13]         In applying the air of reality test, a trial judge considers the totality of the evidence and assumes the evidence relied upon by the accused to be true. That said, the threshold determination by the trial judge is not aimed at deciding the substantive merits of the defence [citation omise].

 

[18]           Dans cet arrêt, la Cour avait conclu à la vraisemblance de la défense d'intoxication volontaire extrême s'apparentant à l'automatisme dans le cadre d'une requête en inconstitutionnalité de l'article 33.1 du Code criminel et déclarait l’article inconstitutionnel.

 

[19]           De même dans R. c. A.O., 2011 QCCQ 13290 (jugement sur la vraisemblance de la défense d'intoxication volontaire extrême s'apparentant à l'automatisme dans le cadre d'une requête en inconstitutionnalité de l'article 33.1 du Code criminel), les parties avaient admis que si le Tribunal en venait à la conclusion que la défense d'intoxication extrême s'apparentant à l'automatisme n'avait aucune vraisemblance considérant l'ensemble de la preuve au dossier, il n'y aurait pas lieu de poursuivre davantage l'analyse de la question constitutionnelle. Pour cette raison, la Cour avait entendu la preuve des parties sur les faits de la cause, particulièrement sur la consommation d'alcool de l'accusé ainsi que des témoins experts sur l'alcoolémie de l'accusé et l'état mental dans lequel il se serait trouvé au moment de la commission de l'infraction. Les parties avaient convenu que le Tribunal trancherait d'abord la question du test de la vraisemblance de la défense présentée (voir Dow c. R., 2010 QCCS 4276 et R. c. Gagnon, REJB 1997-07478).

 

Preuve

 

[20]           Dans le cas en l’espèce, le requérant a choisi d’être très succinct dans la présentation de sa preuve au soutien de sa requête au motif qu’il ne voulait pas risquer de teinter le juge du procès et de devoir présenter une demande en récusation. Cet argument sans fondement fait foi d’un manque de compréhension du rôle du juge en tant que gardien du droit, de la procédure et de la preuve. Que cette preuve soit présentée au soutien d’une requête préliminaire ou lors du procès n’importe peu quant à l’habilité du juge d’entendre la cause.  En effet, il fait partie du rôle fondamental du juge du procès de déterminer de l’admissibilité de la preuve et, à ce titre, il ou elle est fréquemment amené à examiner la preuve qui peut être jugée plus tard inadmissible, sans pour autant que cela le ou la disqualifie d’entendre la cause sur le fond.  De toute évidence, une partie qui allègue un fait, que ce soit au procès ou dans le cadre d’une requête préliminaire, doit en faire la preuve.

 

[21]           En l’espèce, la preuve soumise par la défense au soutien de sa requête est constituée des pages 27, 31, 47, 49 et 84 d’un rapport de police militaire de 107 pages. Ces cinq pages ont été largement caviardées; n’y restent que quelques lignes. Certaines pages semblent contenir un extrait d’une déclaration d’un témoin dont on ignore l’identité. Dans les extraits lisibles, l’auteur de la déclaration répète les paroles qu’il a entendu d’autres individus qui auraient observé l’état d’intoxication de l’accusé. Cette preuve constituée de ouï-dire et dépourvue de son contexte est de toute évidence peu fiable, et même si elle était acceptée comme vraie, est largement insuffisante pour donner au moyen de défense d’intoxication volontaire extrême une vraisemblance justifiant qu'il soit considéré. La preuve tend plutôt à démontrer que l’accusé était ivre, agressif et jaloux. La preuve révèle également, qu’en raison de son état d’ébriété, le soldat Bruyère avait été expulsé de l’endroit où il était par le personnel local, et qu’il n’a pas pris son vol le lendemain. Aucune preuve n’a été soumise quant à la quantité d’alcool consommée par l’accusé ce soir-là, ni comment son état d’intoxication l’affectait. Cette preuve aurait pu être soumise au moyen d’un affidavit de l’accusé. Qui plus est, il n’existe présentement aucune preuve d’expert quant à l’intoxication de l’accusé.

 

[22]           Finalement, le fait qu’une accusation d’ivresse ait été portée contre le soldat Bruyère n’est pas suffisant pour satisfaire au critère de la vraisemblance pour que la défense d’intoxication volontaire extrême équivalant à l’automatisme soit considérée. En effet, au terme de l’article 97 de la LDN qui crée l’infraction, pour prouver la commission d’une infraction d’ivresse, la poursuite doit démontrer que l’accusé était sous l’influence de l’alcool ou d’une drogue et n’était pas, en conséquence, en état d’accomplir la tâche qui lui incombait (ou pouvait lui être confiée), ou qu’il ait adopté une conduite répréhensible ou susceptible de jeter le discrédit sur le service de Sa Majesté.  Le niveau d’intoxication requis pour prouver une infraction d’ivresse est beaucoup moins élevé que l’état d’intoxication extrême s’apparentant à l’automatisme ou l’aliénation mentale.  La quatrième accusation ne constitue donc pas un fondement factuel suffisant pour supporter sa requête.

 

Conclusion

 

[23]           L’accusé doit, pour établir un fondement factuel au soutien de sa requête, démontrer la vraisemblance d’une défense d’intoxication volontaire extrême s’apparentant à l’automatisme ou l’aliénation mentale. La défense a choisi de ne pas révéler ou de ne pas obtenir des éléments cruciaux au soutien de sa contestation constitutionnelle au motif qu’elle n’avait pas à le faire pour démontrer un fondement factuel. Puisqu’elle a fait défaut d’établir que la défense d'intoxication extrême s'apparentant à l'automatisme avait une vraisemblance, considérant l'ensemble de la preuve au dossier, il n’y a pas lieu de tenir une audition sur sa requête. Néanmoins, l’accusé aura l’opportunité au procès, si la preuve est suffisante, de soumettre une nouvelle demande visant à obtenir une déclaration d’inconstitutionnalité de l’article 33.1 du Code criminel.

 

POUR CES RAISONS, LA COUR :

 

[24]           ACCUEILLE la requête en irrecevabilité de la poursuite.

 

[25]           REJETTE SOMMAIREMENT la requête de l’accusé demandant une déclaration d’inconstitutionnalité de l’article 33.1 du Code criminel.


 

Avocats :

 

Major M. Melbourne et Capitaine de corvette É. Léveillé, Service d’avocats de la défense, avocats du requérant, Soldat A. Bruyère

 

Le directeur des poursuites militaires, tel que représenté par le major H. Bernatchez, avocat de l’intimée

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