Cour martiale

Informations sur la décision

Résumé :

Date de l’ouverture du procès : 21 novembre 2006.
Endroit : BFC Petawawa, édifice L-106, Petawawa (ON).
Chefs d’accusation
•Chef d’accusation 1 : Art. 83 LDN, a désobéi à un ordre légitime d’un supérieur.
•Chefs d’accusation 2, 3 : Art. 90 LDN, s’est absenté sans permission.
Résultats
•VERDICTS : Chef d’accusation 1 : Non coupable. Chefs d’accusation 2, 3 : Coupable.
•SENTENCE : Une réprimande et une amende au montant de 1200$.

Contenu de la décision

Page 1 de 6 Référence : R. c. Artilleur V. Pejanovic, 2006 CM 20 Dossier : F200620 COUR MARTIALE PERMANENTE CANADA ONTARIO 2 e RÉGIMENT, ROYAL CANADIAN HORSE ARTILLERY BASE DES FORCES CANADIENNES PETAWAWA Date : 14 décembre 2006 SOUS LA PRÉSIDENCE DU LIEUTENANT-COLONEL J-G PERRON, J.M. SA MAJESTÉ LA REINE c. ARTILLEUR V. PEJANOVIC (Accusé) VERDICT (Prononcé oralement) TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE DÉCISION [1] Artilleur Pejanovic, la cour martiale permanente doit trancher deux accusations dabsence sans permission. Les détails du premier chef daccusation sont les suivants : En ce que à 2 h 30, le 6 juillet 2005, il sest absenté sans permission du 2 e Régiment, Royal Canadian Horse Artillery et est resté absent jusquà 8 h 45, le 6 juillet 2005. [2] Les détails du deuxième chef daccusation à instruire sont les suivants : En ce que à 7 h 30, le 7 juillet 2005, il sest absenté sans permission du 2 e Régiment, Royal Canadian Horse Artillery et est resté absent jusquà 21 h 30, le 12 juillet 2005. [3] La cour vous déclare coupable sous ces deux chefs daccusation. Je vais maintenant vous exposer mes motifs pour ce verdict de culpabilité. MOTIFS
Page 2 de 6 [4] La décision R. c. Gauthier de la Cour dappel de la cour martiale nous fournit au paragraphe 14 les éléments de linfraction que constitue le fait dêtre absent sans permission. La Cour dappel de la cour martiale précise que : [TRADUCTION] ...il sagit dune infraction de responsabilité stricte composées des éléments suivants : a) une obligation pour laccusé dêtre présent à un endroit déterminé à un moment précis; b) une omission de sa part d'y être; c) une absence d'autorisation pour cette omission; et d) un élément mental, à savoir la connaissance par l'accusé de son obligation d'être présent à un endroit déterminé à un moment précis. [5] Au paragraphe 15, la cour ordonne quil revient au procureur détablir hors de tout doute raisonnable que laccusé était tenu de se trouver sur les lieux, quil avait connaissance de cette obligation et quil sest absenté des lieux sans avoir reçu dautorisation ou de permission de le faire. [6] Enfin, une fois ces éléments établis par le procureur, il incombe à laccusé de fournir une excuse ou une justification raisonnable pour avoir omis de se trouver à lendroit ou il devait être au moment exigé ou détablir quil ou elle a fait preuve de diligence raisonnable en tentant de sacquitter de son devoir. [7] Au début de son exposé, la poursuite a présenté un exposé conjoint des faits. Le procureur a lu cet exposé conjoint des faits à la cour et la fait verser en pièce au dossier. Laccusé ne sest pas opposé à ce cet exposé conjoint des faits soit versé en pièce et a aussi confirmé y avoir consenti du fait des aveux conformément à lalinéa 37b) des Règles militaires de la preuve . Lalinéa 37 b) des Règles militaires de la preuve se lit comme suit : 37. Lorsque, dans le cours de son procès, laccusé choisit de faire une admission complète ou partielle de faits incriminants à légard dune infraction pour laquelle il subit un procès, il peut faire des aveux judiciaires . . . b) après avoir nié sa culpabilité, sans égard au fait quil décide aussi de déposer ou non comme témoin sous serment, en admettant personnellement ou par lintermédiaire de son procureur ou de lofficier qui le défend, aux fins de se dispen­ser de la preuve, un fait que le procureur à charge doit prou­ver...
Page 3 de 6 Chef daccusation n o 3 [8] En ce qui concerne le chef daccusation n o 3, lexposé conjoint des faits fournit à la cour une preuve hors de tout doute raisonnable sur chaque élément de linfraction. Bien que laccusé ait donné certains éléments de preuve contradictoires quant à savoir qui lui avait donné lordre au sujet du devoir exact dont il devait sacquitter et à lheure et à lemplacement il était censé sen acquitter, il ne fait pas de doute quil avait reçu lordre de se présenter en service et quil a délibérément décidé de quitter la BFC Petawawa en sachant très bien quil navait pas la permission de le faire. [9] Dans son témoignage, laccusé na pas tenté de fournir une excuse ou une justification raisonnable à la cour pour avoir omis de se trouver il devait être au moment exigé ou détablir quil avait fait preuve de diligence raisonnable en tentant de sacquitter de son devoir. Dans ses conclusions finales, lavocat de la défense na pas tenté dexpliquer ou de justifier son absence. Chef daccusation n o 1 [10] En ce qui concerne le chef daccusation n o 1, soit le premier chef daccusation pour absence sans permission, lexposé des faits fournit une preuve hors de tout doute raisonnable que laccusé avait le devoir dêtre à un endroit donné à un moment précis; autrement dit, il devait se trouver au bâtiment Z-120 de la BFC Petawawa, à 2 h 30, le 6 juillet 2005. Artilleur Pejanovic, vous navez pas contesté avoir reçu cet ordre le 2 juillet 2005. Vous avez confirmé que vous compreniez limportance de ce rendez-vous. [11] Il nexiste aussi aucun doute quant au fait que vous ne vous trouviez pas au bâtiment Z-120, à 2 h 30, le 6 juillet 2005. [12] La question est maintenant la suivante : laccusé avait-il la permission de ne pas y être? [13] Comme je lai dit, il est clair selon votre témoignage que vous saviez que vous deviez être à Petawawa à 2 h 30 le 6 juillet 2005 avec le reste de léquipe de la Course au canon de lArmée de terre pour prendre lautobus pour Ottawa. Vous avez déclaré que vous connaissiez limportance de ce rendez-vous. Le 5 juillet, vous avez néanmoins choisi dattendre jusqu’« au dernier moment possible », dites-vous, pour appeler un militaire occupant un poste dautorité pour linformer de votre situation. [14] Étant confronté à ces renseignements de dernière minute, le bombardier-chef Dalton a demandé des directives à son supérieur et vous a transmis cette directive. Votre nouvel ordre était de veiller à être à lheure pour prendre le vol à laéroport dOttawa. Comme la déclaré le bombardier-chef Dalton dans son témoignage, il était alors trop tard pour que vous arriviez à temps à Petawawa pour le rendez-vous de 2 h 30.
Page 4 de 6 Maintenant, la mission cruciale à exécuter était de [TRADUCTION] « faire en sorte quau moins un de vous monte dans lavion ». [15] Cet ordre ne modifiait pas lordre dorigine qui vous avait été donné le 2 juillet. Cet ordre vous était donné pour réduire au minimum le préjudice éventuel causé à léquipe de la Course au canon de lArmée de terre par les actes de lartilleur Thompson et les vôtres. [16] Au cours du réinterrogatoire, vous avez de nouveau déclaré que vous aviez [TRADUCTION] « attendu jusquau dernier moment possible, à peu près » pour appeler quelquun à Petawawa parce que vous pensiez que vous [TRADUCTION] « pouviez causer des ennuis à Thompson ». [17] Vous avez aussi déclaré avoir appelé le bombardier-chef Dalton pour lui dire que vous aviez un problème et lui demander quoi faire. Vous avez ensuite déclaré que vous pensiez pouvoir être à temps à Petawawa, [TRADUCTION] « si cest ce que vous voulez que je fasse, si vous me dites que je serai déclaré absent sans permission si je ny suis pas à 2 h 30 ». [18] Artilleur Pejanovic, il me semble, à la lumière de votre témoignage, que vous ne comprenez pas clairement la notion de lobéissance aux ordres. Le 2 juillet 2005, vous aviez reçu un ordre clair de vous présenter au bâtiment Z-120 à 2 h 30, le 6 juillet 2005. Vous dites maintenant à la cour que vous attendiez à ce que le bombardier-chef Dalton répète cet ordre. [19] À combien de reprises vous attendez-vous à recevoir un ordre de la part de vos supérieurs avant de devoir y obéir? Vous auriez pu quitter Toronto au cours de la soirée du 5 juillet de manière à arriver à Petawawa à temps, ou vous auriez pu appeler plus tôt au cours de la soirée. Le 5 juillet, vous avez plutôt choisi de faire ce que vous vouliez et, au tout dernier moment possible, vous avez appelé vos supérieurs pour les informer dun problème. [20] Vous êtes à lartisan de vos propres malheurs. Vous ne mavez pas fourni dexcuse ou de justification raisonnables pour avoir omis de vous trouver à lendroit exigé, à savoir au bâtiment Z-120 de la BFC Petawawa, à 2 h 30, le 6 juillet 2005. Vous navez pas non plus fait la preuve dune diligence raisonnable lorsque vous avez tenté de vous acquitter de ce devoir. En appelant vos supérieurs de Toronto vers 23 h 00 le 5 juillet, vous les informiez essentiellement que vous ne pourriez pas raisonnablement être attendu à Petawawa pour 2 h 30, le 6 juillet. Le fait dattendre le dernier moment possible pour appeler nest pas faire preuve la diligence raisonnable en tentant de vous acquitter de votre devoir. [21] Je dirai quelques mots au sujet de votre premier appel au bombardier-chef Dalton. Au cours de votre interrogatoire principal, vous avez déclaré avoir appelé
Page 5 de 6 entre 22 h 35 et 22 h 40 et avoir ensuite rappelé environ une demi-heure plus tard. Vous avez aussi déclaré que votre deuxième appel au bombardier-chef Dalton a pris fin vers 23 h 30. [22] Le bombardier-chef Dalton a déclaré dans son témoignage que le premier appel est survenu vers 23 h 00 et le deuxième appel, vers 23 h 30. Même en labsence de description claire quant à la durée de ces appels, il serait logique de penser quil nont duré que quelques minutes. Par conséquent, je conclus que votre premier appel au bombardier-chef Dalton a eu lieu plus près de 23 h 00 que de 22 h 35. [24] Je retiens de votre témoignage que vous semblez ne pas comprendre clairement deux notions fondamentales liées entre elles et qui sont au coeur même de toute force militaire. Je parle de la discipline et de lobéissance aux ordres. [25] Le fait que le service militaire ait des normes spéciales de discipline est accepté au Canada. Dans son arrêt R. v. Généreux en 1992, la Cour suprême du Canada la confirmé et a déclaré ce qui suit au paragraphe 60 : Sans code de discipline militaire, les Forces armées ne pourraient accomplir la fonction pour laquelle elles ont été créées. Vraisemblable­ment ceux qui s'enrôlent dans les Forces armées le font, en temps de guerre, par patriotisme et, en temps de paix, pour prévenir la guerre. Pour qu'une force armée soit efficace, il faut qu'il y ait prompte obéissance à tous les ordres licites des supérieurs, respect des camara­des, encouragement mutuel et action concertée; il faut aussi respecter les traditions du service et en être fier. Tous les membres des Forces armées se soumettent à un entraînement rigoureux pour être à même, physique­ment et moralement, de remplir le rôle qu'ils ont choisi et, en cela, le respect strict de la discipline est d'une importance capitale. [26] Vous affirmez, par lentremise de votre avocat, que votre respect pour le jumelage constitue la justification de votre absence. Autant commencer dès maintenant à apprendre ce quest la discipline, quel est le sens véritable du jumelage et comment il sintègre dans la discipline des Forces canadiennes. Le jumelage est important, il sert à assurer ce que nous nous soucions des nôtres. Le jumelage sinscrit dans la cohésion et lesprit de corps dont les militaires ont besoin. Ce sont des caractéristiques dune forces militaire qui aideront chacun des nous à survive et à sacquitter de ses missions. [27] Je vous dirai maintenant ce que le jumelage nest pas. Le jumelage nest pas un motif ou une excuse pour décider à quel moment on veut obéir aux ordres. Vous étiez un membre de léquipe de la Course au canon de lArmée de terre, vous occupiez un poste important au sein de cette équipe, et cette équipe de la Course au canon représentait un important exercice de relations publiques pour lArmée canadienne. Vous connaissiez limportance de ce voyage à Calgary.
Page 6 de 6 [28] Vous avez simplement pris la mauvaise décision, la mauvaise décision le 5 juillet 2005. Vous auriez pu appeler vos supérieurs plus tôt et leur demander des directives; vous avez choisi de ne pas le faire. Vous vous êtes mis dans une situation difficile et les avez aussi mis dans une situation difficile en les appelant à la dernière minute. Lartilleur Thompson sest mis dans une situation difficile. Vos supérieurs tentaient datténuer les problèmes que lartilleur Thompson et vous aviez créés; ils voulaient sassurer que vous seriez sur ce vol à destination de Calgary puisquon ne savait pas était lartilleur Thompson au moment de cet appel de dernière minute. [29] La discipline et lobéissance aux ordres constituent la clé de la réussite dune opération, quil sagisse dopérations de combat en Afghanistan ou de la réalisation dun événement de relations publiques planifié auquel participe léquipe de la Course au canon de lArmée de terre. [30] Je suppose que lon vous a enseigné, dès vos tout premiers jours dans les Forces canadiennes, que lobéissance aux ordres est fondamentale chez les militaires. Larticle 19.015 des Ordonnances et règlements royaux applicables aux Forces canadiennes énonce ce qui suit, et je cite : Tout officier et militaire du rang doit obéir aux commandements et aux ordres légitimes dun supérieur. [31] Je ne peux pas dire que votre attitude à légard de lobéissance aux ordres et de la discipline mimpressionne. Je recommande fortement que vous y réfléchissiez si vous souhaitez réussir dans votre carrière dans les Forces canadiennes. LIEUTENANT-COLONEL J-G PERRON, J.M. AVOCATS : Le Major A.M. Tamburro, directeur des poursuites militaires Procureur de Sa Majesté la Reine Le Capitaine de corvette J.C.P. Lévesque, Direction du service davocats de la défense Ottawa. Avocat de lartilleur V. Pejanovic
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