Cour martiale

Informations sur la décision

Résumé :

Date de l’ouverture du procès : 26 mai 2015.

Endroit : BFC Shilo, aménagements d’entraînement à usage multiple, C-106 chemin Portsmouth, Shilo (MB).

Chef d’accusation :

• Chef d’accusation 1 : Art. 129 LDN, acte préjudiciable au bon ordre et à la discipline.

Résultats :

• VERDICT : Chef d’accusation 1 : Coupable.
• SENTENCE : Un blâme et une amende au montant de 1200$.

Contenu de la décision

 

COUR MARTIALE

Référence : R. c. Heisler, 2015 CM 4009

 

Date : 20150526

Dossier : 201501

 

Cour martiale permanente

 

Base des forces canadiennes Shilo

Shilo (Manitoba), Canada

Entre :

Sa Majesté la Reine

- et -

Bombardier A.J. Heisler, contrevenant

En présence du Capitaine de frégate J.B.M. Pelletier, J.M

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

MOTIFS DE LA SENTENCE

(Prononcés de vive voix)

Introduction

[1]               Bombardier Heisler, après avoir accepté et inscrit votre plaidoyer de culpabilité à l’égard du chef d’accusation figurant dans l’acte d’accusation, la Cour vous déclare coupable de ce chef d’accusation aux termes de l’article 129 de la Loi sur la défense nationale (LDN) pour un comportement préjudiciable au bon ordre et à la discipline, essentiellement pour avoir obtenu la permission de votre supérieur de vous absenter du travail sous un faux prétexte.

[2]               Il m’incombe maintenant, à titre de juge militaire présidant la présente Cour martiale permanente, de déterminer la sentence. Pour ce faire, j’ai examiné les principes de détermination de la sentence qu’appliquent les cours ordinaires du Canada ayant compétence en matière criminelle et les cours martiales. J’ai pris en compte les faits propres à cette affaire tels qu’ils sont révélés dans le sommaire des circonstances et dans les documents produits au cours de l’audience de détermination de la sentence, ainsi que le témoignage et les observations des avocats de la poursuite et de la défense.

Objectifs et principes de détermination de la sentence

[3]        Le système de justice militaire constitue l’ultime recours pour assurer le respect de la discipline dans les Forces canadiennes, une composante essentielle de l’activité militaire. Ce système vise à promouvoir la bonne conduite par la sanction adéquate de l’inconduite. C’est grâce à la discipline que les forces armées s’assurent que leurs militaires remplissent leurs missions avec succès, en toute confiance et d’une manière fiable. Le système fait ainsi en sorte que les sanctions infligées aux personnes assujetties au Code de discipline militaire servent l’intérêt public concernant la promotion du respect des lois du Canada.

[4]        L’objectif fondamental de la détermination de la sentence par une cour martiale est d’assurer le respect de la loi et le maintien de la discipline en infligeant des sentences qui répondent à un ou plusieurs des objectifs suivants :

a)                  assurer la protection du public, y compris des Forces canadiennes;

b)                  dénoncer le comportement illégal;

c)                  dissuader le contrevenant et quiconque de commettre les mêmes infractions;

d)                 isoler au besoin les contrevenants du reste de la société;

e)                  réinsérer et réformer les contrevenants.

[5]        Lorsqu’il inflige une sentence, le juge doit également tenir compte des principes suivants :

a)                  la sentence doit être proportionnée à la gravité de l’infraction;

b)                  la sentence doit être proportionnée à la responsabilité et aux antécédents du contrevenant;

c)                  la sentence doit être semblable à celles infligées à des contrevenants ayant commis des infractions semblables dans des circonstances semblables;

d)                 le contrevenant ne devrait pas être privé de sa liberté s’il est possible, eu égard aux circonstances, de lui infliger une sentence moins contraignante;

e)                  enfin, toute sentence devrait être alourdie ou allégée pour tenir compte des circonstances aggravantes ou atténuantes se rapportant à l’infraction ou au contrevenant.

 

[6]        Cela étant dit, la sentence infligée par un tribunal, qu’il soit militaire ou civil, devrait constituer l’intervention minimale nécessaire et appropriée dans les circonstances particulières de l’affaire. Une cour martiale doit imposer la sentence la moins sévère ou une combinaison de sentences qui permettent de maintenir la discipline, car la sentence doit viser à rétablir la discipline chez le contrevenant et dans la société militaire.

[7]               Le juge qui détermine la sentence est responsable de « prononce[r] une sentence proportionnée à la gravité de l’infraction et aux antécédents du contrevenant », comme l’indiquent les Ordonnances et règlements royaux applicables aux Forces canadiennes (ORFC). Autrement dit, toute sentence infligée doit être adaptée au contrevenant et à l’infraction qu’il a commise. De plus, la sentence doit être semblable à celles infligées à des contrevenants ayant commis des infractions semblables dans des circonstances semblables, non pas parce que la Cour imite servilement les précédents, mais parce que son sens commun de la justice veut que les affaires semblables soient jugées de manière semblable.

Le contrevenant

[8]               Le contrevenant est un bombardier de 28 ans affecté au 1er Régiment, Royal Canadian Horse Artillery (1 RCHA) ici même, à Shilo. Son service au sein de la Force régulière est ininterrompu depuis octobre 2008. À la suite d’une instruction élémentaire et professionnelle, il a été affecté au 1 RCHA à Shilo en août 2009. Il est célibataire et a une fille de huit ans qui habite près de Winnipeg avec sa mère.

[9]               J’aimerais en dire plus au sujet de l’accusé, mais la Cour a reçu très peu de renseignements sur le bombardier Heisler, mis à part ceux inscrits dans les documents requis présentés par le procureur aux termes de l’article 112.51 des ORFC, y compris la fiche de conduite du contrevenant, qui indique deux infractions militaires pour absence sans permission, pour lesquelles le contrevenant a été jugé sommairement et s’est vu infliger une sentence avant de commettre l’infraction pour laquelle il plaide coupable aujourd’hui. La fiche de conduite fait état de deux autres infractions militaires qui ont été commises depuis et pour lesquelles le contrevenant a également été jugé sommairement et s’est vu infliger une sentence en décembre 2014 et en janvier 2015, respectivement, soit avant le présent procès. La Cour n’a obtenu aucun renseignement sur la poursuite de la carrière du contrevenant au sein des Forces canadiennes.

L’infraction

[10]           Pour déterminer une sentence équitable et appropriée, la Cour a tenu compte de la gravité objective de l’infraction. À cette fin, elle s’est appuyée sur la sentence maximale qu’elle pourrait infliger. Les infractions prévues à l’article 129 de la Loi sur la défense nationale sont passibles au maximum de destitution ignominieuse du service de Sa Majesté.

[11]           Un sommaire détaillé des circonstances, produit en pièce 9, a servi à informer la Cour des circonstances entourant l’infraction. Le procureur a lu ce sommaire, que le bombardier Heisler a accepté comme preuve concluante. Voici les circonstances :

a)                  le 3 juin 2014, le sergent Fleming a confié au bombardier Heisler une tâche à effectuer le lendemain, soit le 4 juin, nécessitant que le bombardier Heisler annule un rendez-vous chez un tatoueur, auquel il avait versé un dépôt de 150 $;

b)                  lorsqu’il a pris rendez-vous, le bombardier Heisler avait présumé qu’un après-midi de sport serait prévu et qu’il aurait la permission de quitter l’unité pour aller chez le tatoueur à l’heure convenue;

c)                  le 1 RCHA dispose d’un [traduction] « tableau des rendez-vous » et exige des soldats qui ont obtenu la permission de s’absenter du travail d’inscrire la date, l’heure et l’objet de leur rendez-vous sur le tableau. Lorsque le sergent Fleming a informé le bombardier Heisler de la tâche qu’il devait accomplir, celui‑ci a dit au sergent Fleming qu’il avait pris un rendez-vous pour son chien et qu’il l’avait inscrit sur le tableau des rendez-vous;

d)                 le bombardier Heisler a alors demandé la permission de s’absenter du travail le 4 juin pour emmener son chien chez le vétérinaire pour un rendez-vous médical. Le bombardier Heisler a conservé son rendez-vous au salon de tatouage, est allé se faire tatouer et n’est pas retourné au travail ce jour‑là;

e)                  le 5 juin 2014, le sergent Fleming a entendu dire que le bombardier Heisler avait menti au sujet de son rendez-vous chez le vétérinaire. Il a téléphoné à la clinique vétérinaire et a appris que le bombardier Heisler ne s’était pas rendu à la clinique le 4 juin. Le sergent Fleming a alors confirmé que le bombardier Heisler avait conservé son rendez-vous pour se faire tatouer la veille;

f)                   le bombardier Heisler a fait une déclaration volontaire au cours de l’enquête disciplinaire au sein de l’unité, dans laquelle il a reconnu qu’il avait inventé le rendez-vous chez le vétérinaire pour éviter de perdre le dépôt qu’il avait versé pour se faire tatouer.

[12]           Outre le sommaire des circonstances, la poursuite a appelé une personne à témoigner sur la pratique consistant à inscrire les rendez-vous sur le tableau, sur l’importance pour les superviseurs de savoir où se trouvent leurs subordonnés en tout temps, en particulier en raison du statut opérationnel du 1 RCHA, et sur les répercussions des mensonges que les membres du personnel racontent à leurs supérieurs sur le bon ordre et la discipline, y compris la nécessité de confier à d’autres militaires les tâches des militaires qui s’absentent.

[13]           En ce qui a trait à l’infraction, les circonstances décrites ci‑dessus prouvent que le contrevenant a adopté un comportement malhonnête et trompeur à l’égard de ses supérieurs et de son devoir à titre de membre de son régiment et de l’Armée de terre. Un tel comportement peut miner la confiance que les membres d’une unité d’armes de combat doivent avoir les uns envers les autres pour réussir. Il en est ainsi même si les circonstances en l’espèce n’ont pas été extrêmement préjudiciables au bon ordre et à la discipline, car rien dans la preuve n’indique que les infractions ont alors eu une quelconque incidence d’ordre opérationnel sur l’unité.

[14] Il n’en demeure pas moins qu’une infraction de ce type, comme l’ont démontré les mesures qu’a dû prendre le sergent Fleming en lien avec cette situation, a une incidence sur les unités en raison de la distraction qu’elle cause et des ressources qu’elle nécessite. Les antécédents du contrevenant constituent également un élément aggravant; il a déjà commis deux infractions d’absence sans permission pour lesquelles il s’est vu infliger une sentence aux termes de l’article 90 de la Loi sur la défense nationale avant de commettre l’infraction pour laquelle il plaide coupable aujourd’hui. Même si les accusations relatives à ces infractions ont été déposées aux termes d’autres articles de la LDN, elles révèlent un comportement récurrent semblable à celui manifesté en l’espèce, à savoir qu’il s’est absenté de l’unité dans les deux cas. En l’espèce, il a obtenu l’autorisation de s’absenter sous un faux prétexte. Le contrevenant a également un casier judiciaire pour conduite avec facultés affaiblies datant de 2011.

[15] La Cour a aussi tenu compte des facteurs atténuants suivants, qui ont été mentionnés par l’avocat de la défense :

a)                  d’abord et avant tout, le plaidoyer de culpabilité du contrevenant qui, aux yeux de la Cour, indique que le contrevenant assume entièrement la responsabilité de ce qu’il a fait. Il a reconnu sa responsabilité au cours d’une audience publique très formelle de la Cour martiale, en présence de membres de son unité et de sa chaîne de commandement;

b)                  le fait que le contrevenant a reconnu sa responsabilité quant à l’infraction au début de l’enquête disciplinaire au sein de l’unité et qu’il a affirmé rapidement qu’il avait l’intention de plaider coupable, ce qui indique certains remords;

c)                  comme il a déjà été mentionné, le fait que l’infraction commise n’a pas perturbé considérablement les opérations de l’unité;

d)                 l’âge du bombardier Heisler et le fait qu’il est susceptible d’apporter une contribution à son unité, aux Forces canadiennes et en fait, à la société canadienne ultérieurement.

Les observations des parties

[16] En ce qui a trait à la détermination de la sentence appropriée, la poursuite a insisté sur les objectifs de dénonciation, de dissuasion et de réadaptation, qui, selon elle, seraient atteints si le contrevenant purgeait une sentence de détention de 14 jours. Pour étayer cet argument, la poursuite a porté à l’attention de la Cour un certain nombre de décisions de cours martiales prouvant que des sentences de détention de courte durée font partie des sentences pouvant être appropriées pour les infractions commises dans des circonstances semblables à celles de l’espèce.

[17]           En réponse aux observations de la poursuite, l’avocat de la défense a fait valoir que la poursuite invite essentiellement la Cour à passer outre de nombreux niveaux de l’échelle des sentences prévue à l’article 139 de la LDN pour punir un militaire qui s’est vu infliger, pour sa dernière infraction jugée, une amende de 200 $, des sentences mineures de consigne aux quartiers et une privation de congé. Essentiellement, la défense soutient que je devrais d’abord envisager la possibilité de lui imposer une amende plus élevée, dans les environs de 1 000 $, et lui adresser une réprimande pour obtenir la sentence appropriée. L’avocat de la défense a également présenté un certain nombre de cas révélant qu’il était approprié, dans des circonstances semblables à celles de l’espèce, d’infliger une réprimande ou un blâme ainsi qu’une amende.

Les objectifs à favoriser

[18]           J’en suis venu à la conclusion, compte tenu des circonstances propres à ce cas, que la sentence devrait être axée sur les objectifs de dénonciation et de dissuasion, non seulement sur le plan individuel, pour dissuader le contrevenant de récidiver, mais aussi sur le plan collectif. En effet, la sentence infligée devrait dissuader non seulement le contrevenant, mais aussi les autres personnes se trouvant dans une situation semblable à la sienne, d’adopter le même comportement interdit. Je crois également que l’objectif de la réadaptation est important en l’espèce, car toute sentence que j’impose ne devrait pas nuire outre mesure aux efforts que devra déployer le contrevenant pour redevenir un membre productif de son unité et des Forces canadiennes.

[19]           Conformément à un principe important, la Cour doit imposer la sentence la moins sévère qui permette de maintenir la discipline. La sentence la plus sévère proposée à la Cour, selon l’échelle énoncée à l’article 139 de la LDN, est la sentence de détention qui, selon la poursuite, devrait être de 14 jours. Par conséquent, j’utiliserai cette sentence comme point de départ de mon analyse.

[20]            La poursuite a insisté sur l’incidence d’une sentence de détention sur la réadaptation, qui est particulièrement appropriée lorsque d’autres sentences n’ont pas permis de corriger le comportement du contrevenant. Cette sentence comporte effectivement un élément de rééducation. Cependant, les tribunaux ont conclu à maintes reprises qu’un contrevenant ne devrait pas être privé de sa liberté s’il est possible de lui infliger une sentence moins contraignante. Une sentence privative de liberté doit être justifiable.

[21]           Dans le cas présent, j’ai de la difficulté à justifier la détention de l’accusé pour les deux motifs énoncés ci‑après. Premièrement, il existe un certain nombre de sentences entre une amende de 200 $ et la détention qui n’ont pas été infligées à l’accusé et qui ne peuvent être considérées comme des moyens de dissuasion inefficaces en ce qui a trait aux infractions qu’il a commises dans des circonstances semblables à celles de l’espèce. Je suis d’accord avec l’avocat de la défense qui soutient que la poursuite demande à la Cour de passer outre différents niveaux de l’échelle des sentences. Deuxièmement, la poursuite n’a pas été en mesure de présenter à la Cour des cas semblables à la situation actuelle où des sentences de détention ont été imposées. En effet, dans les cas présentés, les faits sont différents; ils comportent généralement plus d’infractions, dans des circonstances plus graves ou particulières que dans le cas présent, où, par exemple, un accusé n’est plus en service au moment de la détermination de la sentence. De nombreux cas comportent des recommandations conjointes, qui ont peu de valeur jurisprudentielle. Le cas dont les circonstances se rapprochent le plus de celles de l’espèce présenté par la poursuite est R. c. Squires, 2013 CM 2016, dans lequel un caporal ayant été déclaré coupable à trois reprises d’absence sans permission s’est absenté une journée. Il s’est vu infliger une rétrogradation, soit une sentence moins sévère que la détention même s’il avait été condamné à une sentence de détention de 20 jours pour l’infraction d’absence sans permission antérieure. Par conséquent, dans le cas du Caporal Squires, le juge militaire n’a pas passé outre de nombreux niveaux de l’échelle des sentences pour déterminer la sentence appropriée. Il a en fait imposé une sentence d’un niveau inférieur dans l’échelle.

[22]           Je reconnais que l’infraction en l’espèce est grave et porte directement atteinte à la discipline, soit la qualité que chaque membre des Forces canadiennes doit posséder pour être en mesure de faire passer les intérêts du Canada et du service militaire avant les siens. Je dois tout de même me rappeler que je dois imposer la sentence la moins sévère qui permette de maintenir la discipline, la bonne organisation et le moral. J’ai expliqué qu’une sentence de détention ne s’appuie pas sur la jurisprudence qui m’a été présentée. Aucune des circonstances exceptionnelles de l’espèce ne justifie cette sentence. Par conséquent, je n’infligerai pas une sentence de détention.

[23]           Selon l’échelle des sentences, la sentence prévue par la suite est la rétrogradation. La poursuite ne propose pas cette sentence, car les répercussions, principalement financières, seraient trop importantes pour l’accusé. La défense, qui est également de cet avis, soutient tout de même que cette sentence serait préférable à une sentence de détention. Je dois décider si la rétrogradation est la sentence minimale nécessaire pour assurer la réadaptation du contrevenant. À cette fin, la Cour ne peut faire fi des conséquences financières sur la solde du délinquant et sur les personnes, comme sa fille, à qui il apporte un soutien financier, au moins partiel. Comme l’a mentionné la poursuite, une rétrogradation entraînerait des conséquences à long terme et donnerait lieu à une période de réadaptation considérable. Selon la Cour, cette sentence serait disproportionnée par rapport à l’infraction commise, compte tenu des circonstances dans lesquelles elle a été commise, comme le prouve là encore la jurisprudence présentée à la Cour. La seule sentence de rétrogradation présentée à la Cour était celle du Caporal Squires, où la rétrogradation se trouvait, dans l’échelle des sentences, à un niveau inférieur à une sentence de détention qui lui avait déjà été infligée.

[24]           La Cour se penche désormais sur les sentences prévues aux niveaux inférieurs de l’échelle des sentences. Rien n’indique que la perte de l’ancienneté aurait une incidence importante. Par conséquent, la Cour peut envisager la possibilité d’infliger une sentence comportant soit un blâme, soit une réprimande, ainsi qu’une amende. La jurisprudence présentée par l’avocat de la défense révèle que ces sentences mixtes font partie des sentences appropriées. L’avocat a fait valoir que la sentence devrait comprendre une réprimande et une amende de 1 000 $. Après avoir examiné la jurisprudence présentée, la Cour estime que la décision R. c. Caporal M.J. Kemp, 2004 CM 06, rendue par la juge militaire Carter, et la décision R. c. Soldat Stull, 2013 CM 2015, rendue plus de neuf ans plus tard par le juge militaire Gibson, sont les plus pertinentes pour établir l’éventail des sentences appropriées en l’espèce. Dans ces deux décisions, où des militaires subordonnés ont trompé leurs supérieurs, les sentences imposées comprenaient un blâme et une amende de 1 000 $.

[25]           Je sais que le juge Gibson a exprimé certaines réserves quant à l’imposition d’un blâme à un militaire ayant le grade de soldat, mais ses remarques ne s’appliquent pas à un militaire ayant le grade de caporal ou de bombardier, comme c’est actuellement le cas. Quoi qu’il en soit, il a tout de même accepté une recommandation conjointe et infligé une sentence à un militaire ayant le grade de soldat dans la décision Stull. La Cour estime qu’un blâme ne constitue pas une sentence sans importance, car il permet d’exprimer adéquatement la réprobation de l’acte malhonnête inacceptable qu’a commis le contrevenant dans une mesure qu’une simple réprimande ne saurait atteindre. La Cour assortira cette sentence d’une amende, car il importe qu’elle entraîne des répercussions personnelles pour le contrevenant et qu’elle soit perçue comme telle. La Cour estime que le montant de 1 200 $ est le minimum requis pour assurer le maintien de la discipline compte tenu des circonstances de l’affaire. Les deux volets de la sentence auront, à mon avis, un effet suffisamment dissuasif pour le contrevenant et les autres militaires.

[26]           Bombardier Heisler, les circonstances entourant le chef d’accusation auquel vous avez plaidé coupable révèlent un comportement tout à fait incompatible avec un service dans les Forces canadiennes. Le comportement que vous avez adopté mine la confiance nécessaire à l’existence d’une relation productive avec vos supérieurs au sein de votre unité. Il peut entraîner une perte de respect et corrompre le milieu de travail, ce qui nuit à l’efficacité opérationnelle, à la productivité, à la cohésion de l’équipe et au moral. Je crois que vous devez travailler pour assurer votre réadaptation au sein de votre unité et pour prouver que vous pouvez devenir un membre productif des Forces canadiennes. Autrement, il se peut que vous fassiez un retour dans la société civile, où vous constaterez que le fait de mentir à votre patron pour manquer du travail ne vous sera pas plus utile que ça ne l’a été dans l’Armée de terre et, particulièrement, dans ce cas‑ci.

POUR CES MOTIFS, LA COUR :

[27]           VOUS CONDAMNE à un blâme et à une amende de 1 200 $ payable à raison de 400 $ par mois. Si vous êtes libéré des Forces canadiennes avant le paiement de la totalité de l’amende, toute somme impayée devra être réglée au moment de votre libération.

 

Avocats :

Le Directeur des poursuites militaires, représenté par le major R.J. Rooney.

Major S.L. Collins, Direction du Service d’avocats de la défense, avocat du bombardier A.J. Heisler.

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