Cour martiale

Informations sur la décision

Résumé :

Date de l’ouverture du procès : 13 juin 2016

Endroit : 3e Escadre Bagotville, édifice 81, rue Windsor, Alouette (QC)

Chefs d’accusation :

• Chef d’accusation 1 : Art. 130 LDN, agression sexuelle (art. 271 C. cr.).
• Chef d’accusation 2 : Art. 95 LDN, a maltraité une personne qui en raison de son grade lui était subordonnée.
• Chef d’accusation 3 : Art. 97 LDN, ivresse.

Résultats :

VERDICTS : Chef d’accusation 1 : Coupable de l’infraction moindre et incluse de voies de fait (art. 266 C. cr.). Chefs d’accusation 2, 3 : Coupable.
SENTENCE : Un blâme et une amende au montant de 2500$.

Contenu de la décision

 

COUR MARTIALE

 

Référence : R. c. Laferrière, 2016 CM 3017

 

Date : 20161021

Dossier : 201574

 

Cour martiale permanente

 

Base des Forces Canadiennes Bagotville

Alouette (Québec) Canada

 

Entre :

 

Sa Majesté la Reine

 

- et -

 

Sergent J.S.J.A. Laferrière, contrevenant

 

 

En présence du : Lieutenant-colonel L.-V. d'Auteuil, J.M.


 

Restriction à la publication : Par ordonnance de la cour rendue en vertu de l’article 179 de la Loi sur la défense nationale et de l’article 486.4 du Code criminel, il est interdit de publier ou de diffuser, de quelque façon que ce soit, tout renseignement permettant d’établir l’identité de la personne décrite dans le présent jugement comme étant la plaignante.

 

MOTIFS DE LA SENTENCE

 

(Oralement)

 

[1]        Le sergent Laferrière a été reconnu coupable par cette Cour des trois chefs d’accusation apparaissant à l’acte d’accusation. Plus précisément la Cour l’a déclaré non coupable d’agression sexuelle, mais coupable de l’infraction moindre et incluse de voies de fait contrairement à l’article 266 du Code criminel, coupable d’avoir maltraité une personne qui en raison de son grade lui était subordonnée, contrairement à l’article 95 de la Loi sur la défense nationale (LDN) et coupable d’ivresse contrairement à l’article 97 de la LDN.

 

[2]        Maintenant il m’incombe à titre de juge militaire, présidant cette cour martiale de déterminer la peine à être infligé au sergent Laferrière.

 

[3]        Le système de justice militaire constitue l’ultime recours pour faire respecter la discipline qui est une dimension essentielle de l’activité militaire dans les Forces armées canadiennes (FAC). Ce système a pour but de prévenir toute inconduite ou d’une façon plus positive, de veiller à promouvoir la bonne conduite. C’est au moyen de la discipline que les FAC s’assurent que leurs membres rempliront leurs missions avec succès en toute confiance et fiabilité.

 

[4]        Le système de justice militaire voit également au maintien de l’ordre public et à s’assurer que les personnes assujetties au code de discipline militaire soient punies de la même façon que toute autre personne vivant au Canada. Il est important de rappeler que le droit ne permet pas à un tribunal militaire d’imposer une sentence qui se situerait au-delà de ce qui est requis dans les circonstances de l’affaire. En d’autres mots, toute peine infligée par le tribunal doit être individualisée et représenter l’intervention minimale requise puisque la modération est le principe fondamental des théories modernes de la détermination de la peine au Canada.

 

[5]        Dans la présente cause, le procureur de la poursuite a suggéré à la Cour d’imposer une sentence de rétrogradation au sergent Laferrière. D’autre part, l’avocat du contrevenant a plutôt recommandé à la Cour de considérer l’imposition d’un blâme et d’une amende variant entre 2 000 et 3 000 dollars.

 

[6]        L’objectif fondamental de détermination de la peine par une cour martiale est d’assurer le respect de la loi et le maintien de la discipline par l’infliction des peines visant un ou plusieurs objectifs :

 

a)                  protéger le public y compris les FAC;

 

b)                  dénoncer le comportement illégal;

 

c)                  dissuader le contrevenant et quiconque de commettre les mêmes infractions;

 

d)                  isoler au besoin les contrevenants du reste de la société;

 

e)                  réformer les contrevenants.

 

[7]        Les peines infligées qui composent la sentence imposée par un tribunal militaire doivent également prendre en compte les principes suivants :

 

a)                  la proportionnalité par rapport à la gravité de l’infraction;

 

b)                  la responsabilité du contrevenant et les antécédents de celui-ci;

 

c)                  l’harmonisation des peines, c’est-à-dire l’infliction de peine semblable à celle infligée à des délinquants pour des infractions semblables commises dans des circonstances similaires;

 

d)                  le cas échéant, le contrevenant ne doit pas être privé de liberté si une peine moins contraignante peut être justifiée dans les circonstances.

 

[8]        En bref la cour ne devrait avoir recours à une peine d’emprisonnement ou de détention qu’en dernier ressort comme il est établi dans les décisions de la Cour d’appel de la cour martiale du Canada et de la Cour suprême du Canada.

 

[9]        Enfin, toute peine devrait être adaptée aux circonstances aggravantes ou atténuantes liées à la perpétration des infractions et à la situation du contrevenant.

 

[10]      Je conclus que dans les circonstances particulières de cette cause, la peine doit viser surtout les objectifs de dénonciation et de dissuasion générale. Il faut se rappeler que la dissuasion générale ne vise pas seulement le contrevenant, mais aussi tout autre militaire qui serait tenté de commettre des infractions similaires ou semblables et de décourager ces gens de les commettre.

 

[11]      Le 14 décembre 2014, l’unité du sergent Laferrière et de la plaignante tenait un party de Noël sous forme d’une dégustation de vins et fromages chez l’un des membres de l’unité. Le sergent Laferrière et la plaignante travaillaient ensemble depuis plus d’un an, le sergent Laferrière étant le superviseur immédiat de la plaignante. Ils se sont rendus séparément à l’évènement. Ils ont passés la soirée là. Le sous-lieutenant Ouellet, qui était membre de la même unité, était aussi présent et il connaissait les deux individus.

 

[12]      Durant la soirée, le contrevenant et la plaignante ont tous deux consommé un peu d’alcool. Lorsqu’est venu le temps de quitter l’endroit, le sous-lieutenant Ouellet a proposé au sergent Laferrière de le raccompagner chez lui et il a fait la même chose envers la plaignante. Ils ont quitté tous les trois l’endroit. En route, il est venu sur le sujet le fait d’aller prendre un dernier verre au bar l’Aventurier. Le sous-lieutenant Ouellet étant la personne qui conduisait et étant intéressé à y aller, il s’est donc dirigé à cet endroit. La plaignante a protesté, mais elle a dû se résigner à accompagner les deux autres personnes.

 

[13]      Lorsqu’ils sont arrivés sur place, le sergent Laferrière a payé un verre à la plaignante et au sous-lieutenant Ouellet. Il y avait peu de monde à cet endroit. Ils ont discuté et dansé durant la soirée. À un certain moment durant la soirée, alors qu’elle était assise au bar entre le sous-lieutenant Ouellet à sa droite et le sergent Laferrière à gauche, ce dernier aurait glissé sa main sur son dos jusqu’à l’endroit où débute ses fesses. Sur le coup, la plaignante n’a rien dit. Le contrevenant lui aurait alors dit qu’il ne pouvait s’en empêcher car elle était trop jolie. Il aurait recommencé une seconde fois touchant un peu plus au niveau des fesses et elle l’a repoussé. Elle lui a dit d’arrêter et le contrevenant a recommencé, glissant encore une fois sa main sur le dos de la plaignante. C’est alors que le sous-lieutenant Ouellet serait intervenu.

 

[14]      Selon le sous-lieutenant Ouellet, la plaignante l’aurait approché durant la soirée pour lui faire part du fait que le sergent Laferrière l’avait touché de manière inappropriée et il lui a alors conseillé de lui faire comprendre ce qu’elle voulait afin qu’il cesse cela. Il a vu le contrevenant mettre sa main sur le ventre, l’autre main sur le dos de la plaignante et il a entendu cette dernière distinctement dire au sergent Laferrière d’arrêter.

 

[15]      Par la suite, il y a eu une période de temps durant lequel le sergent Laferrière suivait la plaignante en essayant de l’agripper par la taille. Le sous-lieutenant Ouellet a décidé de mettre fin à tout cela en indiquant aux deux personnes qu’il était temps de quitter.

 

[16]      Quelques jours plus tard, le sous-lieutenant Ouellet a approché le superviseur du sergent Laferrière et de la plaignante pour lui faire part de l’incident et surtout pour l’aider à gérer la situation si quelque chose se produisait. La superviseure en question a confronté la plaignante, qui lui a alors relaté sa version des faits. Le même jour, la plaignante s’est rendue à la police militaire pour porter plainte et a donné sa version des faits. Une enquête a suivi.

 

[17]      Le sergent Laferrière a été muté à une autre unité. Des accusations ont été portées en avril 2015 à son égard. Une mise en garde et surveillance a été émise relativement à son état d’ivresse, qu’il a respecté. En novembre 2015, il a été promu à son grade actuel de sergent et il a été muté dans une autre position à la Base de Moose Jaw. Au mois de novembre 2015, la mise en accusation concernant les infractions a été faite par la poursuite et le procès, qui devait débuter le 13 juin 2016, a été reporté à la demande des parties et il a plutôt débuté le 17 octobre 2016.

 

[18]      Pour en arriver à ce qu’elle croit être une peine juste et appropriée, la Cour a tenu compte des circonstances aggravantes et atténuantes étayer par les faits présentés devant cette Cour à travers divers témoins.

 

[19]      En ce qui concerne les facteurs aggravants, la Cour retient d’abord la gravité objective des infractions. L’infraction de voies de fait prévue à l’article 266 du Code criminel prévoit l’imposition d’une peine d’emprisonnement maximale de cinq ans. L’article 95 de la LDN relativement à un mauvais traitement à un subalterne prévoit l’imposition d’une peine maximale de deux ans, et en ce qui a trait à l’infraction d’ivresse contrairement à l’article 97 de la LDN, la peine maximale qui peut être imposée par cette cour est de 90 jours.

 

[20]      En ce qui concerne la gravité subjective des infractions, la Cour retient quatre aspects :

 

a)                  Il y a d’abord l’abus de confiance. Il est clair, Sergent Laferrière que vous connaissiez l’existence du lien entre vous et la plaignante, le lien de superviseur immédiat. À l’époque vous étiez en mesure de comprendre le rôle que vous deviez jouer comme superviseur. Il s’agissait d’un évènement social qui réunissait la plupart des membres de l’unité et qui s’est continué par la suite avec certains des membres de l’unité et vous avez quand même, malgré l’existence de ce lien, manqué de respect envers une subordonnée. Vous avez entendu les avocats — et je ne peux qu’être d’accord avec eux — citer différentes décisions de juges militaires à l’effet que l’abus de confiance et le manque de respect, autant sur l’aspect de l’intégrité physique que psychologique d’une subalterne est très grave. Et en ce sens, je dois le retenir comme facteur aggravant.

 

b)                  Il y a aussi votre grade et votre expérience à l’époque. Caporal-chef, c’est en fait une désignation. Dans le sens militaire, c’est le caporal des caporaux. C’est lui qui est au-dessus des autres caporaux en raison de ses qualités de leadership et le nombre d’années que vous aviez à ce moment-là, dans le milieu militaire, en plus de cette désignation, faisait en sorte que les attentes étaient quand même assez élevées à votre égard, et vous n’avez pas rencontré ses attentes à ce moment-là.

 

c)                  Il y a aussi le caractère répétitif de l’infraction, même si c’est plus ou moins court en termes de temps, il est clair que malgré le fait que la victime vous a avisé de cesser, vous avez quand même continué à la toucher, alors qu’elle avait clairement indiqué qu’elle ne voulait pas. Et ça, c’est un autre aspect aggravant que je retiens.

 

d)                  Il y a aussi l’impact sur la victime. Je dois considérer le fait qu’encore aujourd’hui, vos gestes ont eu un certain impact. C’est limité, j’en conviens, mais la plaignante a clairement témoignée que, sur certains aspects de sa vie, lorsqu’il y a des évènements sociaux particulièrement impliquant des militaires, elle est beaucoup plus prudente et beaucoup plus en alerte qu’elle était auparavant. Son niveau de confiance envers les autres a diminué et cela a un impact. Je dois en tenir compte.

 

[21]      Maintenant, il y a aussi des facteurs atténuants que j’ai considérés :

 

a)                  Je dois dire, même si ce sont des mesures administratives, la façon dont l’unité a géré ce problème est impressionnante et je félicite les gens qui ont agi dans ce dossier. La première mesure qui a été prise lorsque la plaignante a fait part de sa version des faits, c’est de la diriger vers la police et de voir à vous séparer d’elle. Donc, il y a eu un retrait de la position que vous aviez, vous avez été muté ailleurs. Cette mesure-là en soi était appropriée et déjà c’est un signe qui peut être dissuasif. Si une telle chose arrive, clairement c’est pris au sérieux et s’en ait suivi une mesure administrative, une fois que l’enquête a été complétée. Cette mesure s’attaquait au problème, ce qui vous a permis de prendre conscience, peut-être plus précisément, de votre problème d’alcool. Et cette mise en garde et surveillance a aussi eu un effet dissuasif découlant de l’incident lui-même. Même si ce n’est pas une sanction ou une peine en soi, c’est sûr que le message a clairement été passé et je retiens cela aussi comme facteur atténuant.

 

b)                  Les gestes étaient quand même limités, même s’ils étaient inappropriés; ils étaient limités dans le temps. Ce n’est pas quelque chose qui a duré de façon continue pendant des jours, des semaines ou des mois, mais en fait les mesures qui ont été prises ont empêché qu’une telle chose se reproduise.

 

c)                  Il y a votre carrière. Vous comprendrez que je ne suis pas au courant de tous les tenants et aboutissants des décisions qui sont prises dans de telles circonstances. On me présente seulement certains faits à la cour, c’est comme ça que cela fonctionne et c’est bien ainsi. Pour ce qui en est à votre égard, et je comprends qu’au niveau de la carrière, des accusations ont été portées relativement à cet incident-là. La mesure administrative a été subie, vous avez passé à travers avec succès et les autorités ont considéré vous donner une promotion malgré les circonstances. Quant à moi, c’est une mesure qui est atténuante dans le sens qu’elle indique le niveau de confiance que la chaîne de commandement et les autorités militaires ont gardée en vous à ce moment-là; sachant l’existence de ces accusations, elles ont quand même décidé de vous donner une promotion et de vous muter.

 

d)                  Comme facteur atténuant, je retiens aussi le fait que vous avez décidé de consulter un travailleur social. Donc vous avez eu une prise de conscience jusqu’à un certain point. C’est sûr que je n’ai pas de rapport de spécialiste ou quoi que ce soi, je me fie à votre témoignage, mais je n’ai pas à douter du fait que vous avez pris conscience du problème à la base de tout cela, c’est-à-dire, votre consommation d’alcool que vous devez surveiller dans certaines circonstances. Le fait que vous avez consulté un travailleur social pour autre chose, voire d’une part si vous aviez un problème de consommation d’alcool et qu’est-ce que vous pourriez faire justement pour ne plus vous retrouver dans une telle situation, et ce que vous m’avez indiqué aussi, d’autre part, c’est que vous avez tenté de changer votre comportement par rapport à cela. Au lieu de vous retrouver dans le trouble encore une fois, vous essayez de vous éloigner des problèmes.

 

e)                  Il y a le fait aussi que vous avez fait face à cette cour martiale, qui est public, qui se passe devant vos pairs, certains de vos anciens superviseurs. Le fait que la cour martiale demeure un évènement en soi, parce que ce n’est pas quelque chose qui se fait de manière quotidienne ou hebdomadaire, et que ça se passe, c’est souvent parce que les choses sont sérieuses et cela a aussi un effet dissuasif. À cet égard, je retiens cet aspect comme facteur atténuant.

 

f)                    Il y a le fait aussi, même si ça survient une fois que la Cour a rendu son verdict, que vous avez présenté des excuses. C’est peut-être un peu tard, mais elles ont été quand même prononcées, ce qui démontre, à tout le moins dans votre esprit, certains regrets par rapport à ce qui s’est passé et une forme de prise de responsabilité. Et je les retiens aussi comme étant un facteur atténuant.

 

[22]      J’aimerais mentionner que la fiche de conduite qui a été déposée et qui réfère à une absence sans permission datant d’une quinzaine d’années environ, quant à moi, a plutôt un effet neutre. Ce n’est pas un facteur ni atténuant, ni aggravant entre autres choses, à cause du fait que c’est un évènement qui remonte à très, très loin : et deuxièmement, il n’est pas de même nature que ce qui est devant la Cour aujourd’hui. On ne parle pas du tout du même genre d’infraction.

 

[23]      On m’a suggéré de part et d’autre la rétrogradation et le blâme. Je dois dire qu’en termes de parité des sentences, lorsque j’applique ce critère-là, c’est-à-dire appliquer des sentences semblables dans des situations similaires, d’abord, je pense que ce qui est important d’identifier est la nature même de l’évènement, qui est, même si ce n’est pas mentionné, plus de nature du harcèlement, même s’il y a certains attouchements. Ils ne sont pas de nature sexuelle parce que j’ai conclu que le contexte de nature sexuelle relativement à l’accusation d’agression sexuelle n’a pas été prouvé. Donc, c’est plus dans la nature du harcèlement, ce sont des attouchements comme tels, toucher quelqu’un, mais dans le cadre de harcèlement si vous voulez. Ça c’est la nature de l’incident lui-même. Évidemment, vous avez été trouvé coupable de voies de fait, de mauvais traitement à un subalterne et d’ivresse, ce qui caractérise la chose. Mais en termes de jurisprudence, je crois plus approprié de regarder tout ce qui est plus de nature d’attouchement ou de comportement non désiré que ce qui m’a été soumis à titre de comparatif et qui comportait des infractions d’agressions sexuelles comme telles.

 

[24]      Il faut que la Cour, dans l’application du critère de parité des sentences, réfère plus à cela. Et dans ce cadre-là, la rétrogradation pourrait être une chose considérée par la Cour autant que le blâme et l’amende ou la réprimande et l’amende. C’est sûr et certain que la question d’incarcération dans un tel contexte n’est pas considérée, que ce soit pour de l’emprisonnement ou de la détention, et je ne vois pas la nécessité de même considérer cette question. Il m’a été soumis par la poursuite de considérer la rétrogradation dans les circonstances.

 

[24]      La rétrogradation et le blâme sont deux sentences qui réfèrent à une question de confiance et c’est cette question de niveau de confiance-là que la Cour doit évaluer dans les circonstances particulières de cette cause. J’en suis arrivé à cette conclusion, entre autres, dans mon analyse sur sentence dans la R. c. Moriarity, 2012 CM 3022 au paragraphe 39, où j’ai conclu que la rétrogradation, après avoir révisé ce que la Cour d’appel de la cour martiale a dit sur le sujet, est donc une peine purement militaire qui traduit la perte de confiance à l’endroit du membre contrevenant.

 

[25]      Souvent la rétrogradation est imposée quand il y a une perte de confiance totale dans la capacité de superviser du membre et va refléter le fait de dénoncer ce manque de confiance totale. Le blâme, qui est juste un peu en dessous, reflète aussi cet aspect d’un manque de confiance, mais a une connotation plus positive qui reflète le fait qu’il y a encore de l’espoir que le contrevenant puisse se rétablir et retrouver la confiance de ses pairs pour agir dans un rôle de supervision.

 

[26]      Alors quand je regarde les critères de proportionnalité, votre caractère qui est révélé par les circonstances de l’affaire et aussi par votre témoignage sur sentence; quand je regarde où se situe l’incident en termes d’échelle de gravité, ce n’est pas un incident anodin, je ne veux pas en diminuer l’impact ou la valeur, mais en termes de gravité, il se situe quand même assez bas dans l’échelle; quand je regarde aussi l’impact que cela a eu sur la victime, il y en a eu un, mais il est plutôt limité. Le fait qu’il semble que ce soit aussi pour vous une leçon durement apprise. Il y a aussi le fait, à mon avis, que les Forces canadiennes ont considéré l’ensemble des circonstances et qu’ils ont exprimé à leur façon quel était leur niveau de confiance par rapport à ce que vous pouviez faire dans l’environnement de travail à l’égard de personnes que vous aurez peut-être à superviser. J’ai considéré tout cela pour en venir à la conclusion que l’application d’un blâme et d’une amende serait la sentence la plus appropriée dans les circonstances, en tenant compte de tous ces facteurs et dans le cadre de l’application des objectifs de dénonciation et de dissuasion générale.

 

[27]      Donc dans les circonstances, j’en suis venu à la conclusion que la peine la plus appropriée serait un blâme et une amende au montant de 2 500 dollars. Vous aurez peut-être dans le futur, à ce que j’ai compris, à superviser encore plus de personnes. C’est important pour vous, j’espère, je le souhaite. Je pense que vous avez compris et que vous allez retenir cette leçon et que votre relation avec l’alcool, vous allez maintenant la gérer plus adéquatement. Parce que cela a des impacts, pas juste sur vous, mais sur les autres, et je souhaite que cela fasse de vous un meilleur leader et que pas juste pour vous, mais pour les autres aussi, que vous remarquerez ce genre de situation et pourrez aussi la dénoncer et aider s’il y a lieu.

 

POUR CES MOTIFS, LA COUR :

 

[28]      CONDAMNE le contrevenant à un blâme et une amende de 2 500 dollars payable en dix versements égaux de 250 dollars, le paiement débutant le 1er novembre 2016 et continuant ainsi pour les neuf mois qui suivront. S’il s’avérait, pour des raisons particulières, que vous soyez libéré avant que la totalité du montant soit payée, alors à votre libération, le montant qui restera à payer deviendra exigible en totalité.


 

Avocats :

 

Le directeur des poursuites militaires, tel que représenté par le major A.J. van der Linde et capitaine M.D. Ferron

 

Major P.-L. Boutin, service d’avocats de la défense, avocat du sergent J.S.J.A. Laferrière

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