Cour martiale

Informations sur la décision

Résumé :

Date de l’ouverture du procès : 5 novembre 2019

Endroit : Base de soutien de la 2e Division du Canada Valcartier, bâtisse CC-119, salle 123, rue Casgrain, Courcelette (QC)

Chefs d’accusation :

Chef d’accusation 1 : Art. 114 LDN, vol.
Chef d’accusation 2 : Art. 130 LDN, avoir eu en sa possession des biens criminellement obtenus (al. 354(1)a) C. cr.).

Résultats :

VERDICTS : Chef d’accusation 1 : Coupable. Chef d’accusation 2 : Retiré.
SENTENCE : Une réprimande et une amende au montant de 1400$.

Contenu de la décision

COUR MARTIALE

 

Référence : R. c. Parent, 2019 CM 3014

 

Date : 20191105

Dossier : 201930

 

Cour martiale permanente

 

Base de soutien de la 2e Division canadienne Valcartier

Garnison Valcartier (Québec) Canada

 

Entre :

 

Sa Majesté la Reine

 

- et -

 

Caporal M.J.A. Parent, contrevenant

 

 

En présence du Lieutenant-colonel L.-V. d'Auteuil, J.M.C.A.


 

MOTIFS DE LA SENTENCE

 

(Oralement)

 

[1]               Le caporal Parent a avoué sa culpabilité à un chef d’accusation de vol, en vertu de l’article 114 de la Loi sur la défense nationale. Cette accusation se lit comme suit :

 

« En ce que, le ou vers le 12 mars 2018, à ou vers la Base de soutien de la 2e Division du Canada Valcartier, province de Québec, il a volé du fil de cuivre appartenant aux Forces armées canadiennes. »

 

[2]               Tout d’abord, la Cour accepte et enregistre votre plaidoyer de culpabilité relativement à ce chef d’accusation, apparaissant à l’acte d’accusation et, par le fait même, vous déclare coupable de ce chef.

 

[3]               Les avocats ici présents ont présenté une suggestion commune afin que la Cour impose une réprimande et une amende au montant de 1 400 $. Il est maintenant de mon devoir de déterminer la peine qui doit vous être imposée.

 

[4]               Le système de justice militaire constitue l’ultime recours pour faire respecter la discipline qui est une dimension essentielle de l’activité militaire dans les Forces armées canadiennes. Ce système a pour but de prévenir toute inconduite ou, d’une façon plus positive, de veiller à promouvoir la bonne conduite. C’est au moyen de la discipline que les Forces armées canadiennes s’assurent que leurs membres rempliront leur mission avec succès, en toute confiance et fiabilité. Le système de justice militaire veille également au maintien de l’ordre public et à s’assurer que les personnes assujetties au code de discipline militaire soient punies de la même façon que toute autre personne vivant au Canada.

 

[5]               La preuve déposée devant la Cour inclut un sommaire conjoint des circonstances et un sommaire conjoint des faits qui se lisent comme suit :

 

« Sommaire conjoint des circonstances

 

(Ordonnances et règlements royaux applicables aux Forces canadiennes 112.51(3))

 

 

1.                  Le 11 mars 2018, vers 18h30, le caporal Bizier s’est présenté au bâtiment 366 (3e R22R) de la Base de soutien de la 2e Division du Canada Valcartier afin de faire sa ronde de ménage.

 

2.                  Mis à part le caporal Maxime Parent à la salle de garde, il n’a remarqué personne d’autre à l’intérieur du bâtiment durant sa ronde.

 

3.                  Lorsqu’il s’est adressé au caporal Maxime Parent, le caporal Bizier a remarqué du fil électrique (cuivre) dans le local de rangement. Après avoir demandé au caporal Maxime Parent des explications au sujet de la présence de ce fil, ce dernier lui a répondu qu’il le gardait pour un sergent, à la demande de celui-ci. Le caporal Bizier a quitté le bâtiment vers 20h15 le même soir.

 

4.                  À son retour de congé le 13 mars 2018, le caporal Gordon s’est aperçu que le fil de cuivre sur lequel il travaillait au bâtiment 366 juste avant son congé avait disparu.

 

5.                  Il s’agissait de fil électrique destiné à l’OP NABERIUS qui avait été sectionné en cinq parties. Le caporal Gordon a évalué le poids du fil de cuivre manquant à environ 400 livres.

 

6.                  Le 19 mars 2018, après avoir tenté sans succès de retrouver le fil de cuivre manquant, le caporal Gordon a décidé de porter une plainte de vol à la police militaire.

 

7.                  L’enquête de la police militaire a établi qu’il s’agissait effectivement d’un vol, et que le caporal Maxime Parent en était l’auteur.

 

8.                  L’enquête de la police militaire a également établi que le 12 mars 2018, le caporal Maxime Parent a effectué une vente de 358 livres fil de cuivre à AIM Recyclage Québec, une entreprise œuvrant dans la récupération de métaux. Cette transaction lui a procuré une somme de 1167.08$. »

 

« Sommaire conjoint des faits

 

1.         Le caporal Parent n’a aucun antécédent judiciaire en semblable matière.

 

2.         Dans le cadre des négociations, le caporal Parent a déterminé que l’enregistrement d’un plaidoyer de culpabilité était la solution raisonnable dans ce dossier et a mandaté son avocat de la défense à procéder par suggestion commune.

 

3.         Le présent plaidoyer est une économie de ressources pour le système de justice militaire.

 

CIRCONSTANCES PERSONNELLES DE L’ACCUSÉ

 

4.         Le caporal Parent a été libéré administrativement des FAC pour raisons médicales en date du 5 octobre 2019.

 

5.         Le caporal Parent fréquente le Centre de Formation Portneuf afin d’y compléter un Double Diplôme d’études professionnelles (DEP) en mécanique industrielle et électromécanique.

 

6.         Cette formation professionnelle s’étale sur deux années scolaires et prévoit mille huit cent heures (1800) de formation.

 

7.         Le caporal Parent est père d’un enfant en bas âge et a également un enfant à charge avec sa conjointe.

 

8.         Le caporal Parent obtient une compensation financière de SISIP (Finances) et Ancien Combattants Canada pour la durée de sa formation scolaire. Ces compensations combinées se chiffrent à quatre-vingt-dix (90%) de son salaire alors qu’il était membre de la Force régulière au rang de caporal.

 

9.         Le caporal Parent réside à Donnacona, Québec. »

 

[6]               Lorsqu’un tribunal est en présence d’une suggestion commune relativement à la peine qu’il devrait imposer à un contrevenant, le juge du procès doit appliquer le critère de l’intérêt public et ne devrait pas écarter une recommandation conjointe à moins que ce qui est proposé soit susceptible de déconsidérer l’administration de la justice ou contraire à l’intérêt public. La cour peut s’écarter d’une recommandation faite par les avocats seulement « lorsque des personnes renseignées et raisonnables estimeraient que la peine proposée fait échec au bon fonctionnement du système de justice », tel que mentionné dans l’arrêt R. c. Anthony-Cook, 2016 CSC 43, au paragraphe 42. Faire échec au bon fonctionnement du système de justice est essentiellement le paramètre que doit considérer le juge lorsqu’il impose une peine dans le cadre d’une suggestion commune.

 

[7]               Ceci est une pratique acceptée par les cours martiales et tout à fait souhaitable, comme ce l’est d’ailleurs pour les autres tribunaux en matière de juridiction criminelle au Canada. Cependant, les avocats sont tenus de donner au tribunal un compte rendu complet de la situation du délinquant, des circonstances entourant la commission de l’infraction, ainsi que de la recommandation conjointe sans attendre que le juge du procès en fasse la demande. Ici, la Cour se déclare satisfaite des explications et de l’information fournies par les avocats.

 

[8]               Le procureur de la poursuite a mis en lumière les objectifs et principes qui soutenaient la recommandation qui était faite à la Cour et qui visaient essentiellement, d’une part, à soutenir l’efficacité opérationnelle des Forces armées canadiennes; d’autre part, dénoncer l’infraction, dissuader de manières spécifique et générale tout autre contrevenant, et aussi favoriser la réinsertion sociale. Je crois que ces objectifs, dans le cadre de la suggestion commune, ont été atteints.

 

[9]               Le caporal Parent s’est enrôlé dans les Forces armées canadiennes en 2014, à titre de fantassin. Je comprends de la preuve qui m’a été soumise, qu’il a eu une carrière sans histoire jusqu’en 2018, soit au moment de la commission de l’infraction. Il a une conjointe et est père de deux enfants. Il a été libéré pour raison médicale en octobre 2019 et je peux inférer de la preuve qu’il fait partie d’un programme de transition à la vie civile lui permettant de participer à un programme académique qui lui permettra d’avoir un emploi dans le futur et aussi d’assumer ses responsabilités personnelles et familiales.

 

[10]           Je me déclare donc satisfait du fait que les avocats ont considéré d’une part, l’ensemble des circonstances autant celles qui sont aggravantes que celles qui sont atténuantes, étant donné la nature de l’infraction pour laquelle le contrevenant a été reconnu coupable, ainsi que le contexte plus général qui fait partie des discussions qu’ils ont eues quant au règlement de ce dossier.

 

[11]           Le vol au sein des Forces armées canadiennes est quelque chose qui est très grave. Ici, nous avons un exemple clair que cela peut causer un impact au niveau de l’efficacité opérationnelle. Le vol d’objets à une unité peut entraîner des conséquences. L’autre aspect du vol, c’est surtout de l’abus de confiance. L’abus de confiance est quelque chose qui est considéré comme très grave au sein des Forces armées canadiennes. Les valeurs telles que l’honnêteté et l’intégrité sont des valeurs des Forces armées canadiennes et lorsque quelqu’un manque d’honnêteté ou d’intégrité, c’est là qu’on voit un abus de confiance envers ses pairs, envers ses supérieurs et ça a une portée beaucoup plus grande que dans la vie civile.

 

[12]           Je dois aussi reconnaître que le caporal Parent, tel qu’en ont fait mention les avocats de part et d’autre, a reconnu sa responsabilité immédiatement, en mandatant son avocat qui le représentait, à la première opportunité, d’offrir de régler le dossier. De plus, il a été démontré que le caporal Parent désire demeurer un actif pour la société et l’exemple le plus flagrant est le fait qu’il participe à un programme de réinsertion sociale. Ce n’est pas parce qu’il a quitté les Forces armées canadiennes qu’il ne reconnaît pas ses responsabilités, au contraire, c’est ce qu’il fait aujourd’hui; d’autre part, par ses actions, il démontre qu’il veut demeurer un actif positif au sein de la société canadienne. Ceci a donc pour effet de faire en sorte que je me déclare satisfait des explications qui ont été fournies par les avocats et j’entérine la suggestion commune qu’ils m’ont faite, puisque dans les circonstances, il m’a été démontré que ce qu’ils m’ont suggéré assure le maintien de la discipline, ne déconsidère pas l’administration de la justice et n’est pas contraire à l’intérêt public.

 

POUR CES MOTIFS, LA COUR :

 

[13]      VOUS DÉCLARE coupable du premier chef d’accusation de vol, prévu à l’article 114 de la Loi sur la défense nationale.

 

[14]      VOUS CONDAMNE à une réprimande et à une amende au montant de 1 400 $, qui sera payable en cinq versements mensuels, le premier versement étant dû à compter du 1er décembre 2019. Les quatre premiers versements seront faits au montant de 300 $ et le dernier versement sera de 200 $. À défaut de payer l’un de ces versements, la somme restante deviendra alors exigible dans son entièreté par le Ministère de la Défense nationale afin de récupérer les montants dus.


 

Avocats :

 

Le directeur des poursuites militaires, tel que représenté par le major H. Bernatchez

 

Major B.L.J. Tremblay, Service d’avocats de la défense, avocat du caporal M.J.A. Parent

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