Cour martiale

Informations sur la décision

Résumé :

Date de l’ouverture du procès : 5 septembre 2014.

Endroit : NCSM PREVOST, 14 rue Becher, London (ON).

Chefs d’accusation:
• Chef d’accusation 1 : Art. 115 LDN, a recelé un bien obtenu par la perprétation d’une infraction d’ordre militaire, sachant qu’il a été ainsi obtenu.
• Chef d’accusation 2 : Art. 130 LDN, possession non autorisée d’une arme prohibée (art. 91(2) C. cr.).
• Chef d’accusation 3 : Art. 130 LDN, possession non autorisée de munitions prohibées (art. 91(2) C. cr.).
• Chef d’accusation 4 : Art. 129 LDN, acte préjudiciable au bon ordre et à la discipline.

Contenu de la décision

 

COUR MARTIALE

 

Référence : R c Cartwright, 2014 CM 2015

 

Date : 20140905

Dossier : 201390

 

Cour martiale permanente

 

NCSM PREVOST

London (Ontario), Canada

 

Entre : 

 

Caporal B.D. Cartwright, contrevenant

 

- et -

 

Sa Majesté la Reine

 

 

 

 

En présence du colonel M.R. Gibson, J.M.

 


 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

MOTIFS DE LA SENTENCE

 

(Prononcés de vive voix)

 

[1]        Caporal Cartwright, ayant accepté et inscrit votre plaidoyer de culpabilité à l’égard du quatrième chef d’accusation de l’acte d’accusation, la cour vous déclare maintenant coupable de ce chef d’accusation. Il m’incombe maintenant de déterminer une sentence appropriée, juste et équitable.

 

[2]        Pour ce faire, la cour a tenu compte des principes de la détermination de la sentence appliqués par le système de justice militaire, des faits de l’espèce révélés par les témoignages entendus par la cour et des documents présentés en preuve, ainsi que des observations du procureur de la poursuite et de l’avocat de la défense. 

 

[3]        Dans le système de justice militaire, la détermination de la sentence par les tribunaux militaires, dont font partie les cours martiales, a pour objectifs essentiels de favoriser l’efficacité opérationnelle des Forces canadiennes en contribuant au maintien de la discipline, de la bonne organisation et du moral, et de contribuer au respect de la loi et au maintien d’une société juste, paisible et sûre. 

 

[4]        L’atteinte de ces objectifs essentiels se fait par l’infliction de sanctions justes visant un ou plusieurs des objectifs suivants : renforcer le devoir d’obéissance aux ordres légitimes; maintenir la confiance du public dans les Forces canadiennes en tant que force armée disciplinée; dénoncer les comportements illégaux; dissuader les contrevenants et autres personnes de commettre des infractions; favoriser la réinsertion sociale des contrevenants; favoriser la réinsertion des contrevenants dans la vie militaire; isoler, au besoin, les contrevenants des autres officiers et militaires du rang ou de la société en général; assurer la réparation des torts causés aux victimes ou à la collectivité; susciter le sens des responsabilités chez les contrevenants, notamment par la reconnaissance des dommages causés à la victime et à la collectivité.

 

[5]        Le principe fondamental de la détermination de la sentence est que la sentence doit être proportionnelle à la gravité de l’infraction et au degré de responsabilité du contrevenant.

 

[6]        Parmi les autres principes de détermination de la sentence, mentionnons les suivants : l’adaptation de la sentence aux circonstances aggravantes et atténuantes; l’harmonisation des sentences, c’est‑à‑dire l’infliction de sentences semblables à celles infligées pour des infractions semblables commises dans des circonstances semblables; l’obligation, avant d’envisager la privation de liberté par l’emprisonnement ou la détention, d’examiner la possibilité de sanctions moins contraignantes lorsque les circonstances le justifient; l’infliction de la sentence la moins sévère possible qui permette de maintenir la discipline, la bonne organisation et le moral; la prise en compte des conséquences indirectes du verdict de culpabilité ou de la sentence.

 

[7]        Dans l’affaire dont la cour est saisie aujourd’hui, je dois déterminer si les buts et objectifs de la détermination de la sentence seraient mieux servis par la dissuasion, la dénonciation, la réinsertion sociale ou une combinaison de ces facteurs.

 

[8]        La cour doit infliger la sentence la moins sévère possible qui permette de maintenir la discipline, la bonne organisation et le moral. La discipline, c’est cette qualité que doit posséder chaque membre des Forces canadiennes, celle qui lui permet de faire passer les intérêts du Canada et ceux des Forces canadiennes avant ses intérêts personnels. Elle lui est nécessaire parce qu’il doit obéir promptement et volontiers, sous réserve qu’ils soient légitimes, à des ordres qui peuvent avoir pour lui des conséquences très graves telles que des blessures ou même la mort. La discipline est définie comme une qualité, car, au bout du compte, bien qu’elle représente une conduite que les Forces canadiennes développent et encouragent par l’instruction, l’entraînement et la pratique, c’est une qualité intérieure et l’une des conditions fondamentales de l’efficacité opérationnelle de toute force armée. 

 

[9]        Un des éléments les plus importants de la discipline dans le contexte militaire, c’est l’autodiscipline. Le comportement du caporal Cartwright démontre que c’est un domaine dans lequel il a eu des faiblesses.  

 

[10]      Les faits de cette affaire sont reproduits dans l’énoncé des circonstances qui a été déposé en preuve. Au moment des faits, le caporal Cartwright était membre de la Force régulière et de la police militaire. Le 4 décembre 2012, le caporal Cartwright a été arrêté et mis en accusation par des membres du Service de police de London relativement à d’autres questions. À la suite d’une fouille consensuelle de ses effets personnels, les policiers ont découvert des cartouches marquantes colorées d’exercice, à faible vitesse, qui font l’objet du chef d’accusation pour lequel il a reconnu sa culpabilité, et dont il était illégalement en possession. Ces cartouches appartenaient à l’État. Elles sont fabriquées exclusivement pour les Forces canadiennes et sont destinées à l’usage opérationnel. 

 

[11]      En l’espèce, la cour considère que les facteurs aggravants sont les suivants :

 

a)                  la gravité objective de l’infraction à l’égard de laquelle le caporal Cartwright a été déclaré coupable. La personne déclarée coupable de comportement préjudiciable au bon ordre et à la discipline en vertu de l’article 129 de la Loi sur la défense nationale encourt comme sentence maximale la destitution ignominieuse du service de Sa Majesté;

 

b)                  le fait que le caporal Cartwright est membre de la police militaire, dont on attendait nécessairement beaucoup, et que ses actes constituaient une violation du Code de déontologie de la police militaire.

 

[12]      En l’espèce, les facteurs atténuants sont les suivants :

a)                   en tout premier lieu, le caporal Cartwright a plaidé coupable à l’infraction, ce qui constitue toujours un facteur important qui indique que le contrevenant a admis sa responsabilité à l’égard de ses actes;

 

b)                  l’absence de fiche de conduite ou de toute autre indication de condamnations antérieures;

 

c)                  l’excellent rendement dont le caporal Cartwright a fait constamment preuve au fil des ans et qui est consigné dans les rapports d’évaluation du rendement produits en preuve;

 

d)                 la situation financière difficile dans laquelle se trouve présentement le caporal Cartwright et ses obligations financières relativement à la pension alimentaire;

 

e)                  la cour doit aussi prendre en compte les conséquences indirectes du verdict de culpabilité, qui en l’espèce, compte tenu du fait que le caporal Cartwright est membre de la police militaire, peuvent comprendre un examen des titres de créance par le comité d’examen des titres de créance de la police militaire.

 

[13]      Les principes de détermination de la sentence qui, selon la cour, doivent être mis en évidence en l’espèce sont la dénonciation et la dissuasion générale et individuelle. Comme je l’ai affirmé dans la décision concernant le caporal Laliberté :

 

[....] Le fait que le public en général et les autres membres des Forces canadiennes soient convaincus de l’honnêteté, de l’intégrité, de la discipline, de la maturité et du bon jugement des membres de la police militaire des Forces canadiennes est essentiel à l’efficacité de celle‑ci dans l’exercice de ses importantes fonctions. Les membres de la police militaire sont à juste titre tenus de respecter des normes très élevées. 

 

[14]      Le comportement du caporal Cartwright constitue une dérogation importante à ces normes. Il ne doit jamais récidiver et les autres membres de la police militaire doivent aussi comprendre que de tels actes ne sont tout simplement pas tolérables et qu’ils doivent être dissuadés de les commettre. 

 

[15]      La poursuite et la défense ont formulé une recommandation conjointe au sujet d’une sentence composée d’une réprimande et d’une amende au montant de 5 000 $. L’avocat de la défense demande que l’amende soit payable en versements mensuels de 150 $ et invoque les difficultés financières du caporal Cartwright pour justifier la longue période nécessaire pour payer l’amende.

 

[16]      Comme l’a rappelé la Cour d’appel de la cour martiale dans l’arrêt R c Soldat Chadwick Taylor, 2008 CACM 1, lorsqu’il y a une recommandation conjointe, la question que la cour doit se poser n’est pas de savoir si la sentence proposée est celle que la cour aurait infligée si elle n’avait pas reçu de recommandation conjointe. La cour doit se demander s’il y a des motifs impérieux d’aller à l’encontre de cette recommandation conjointe; c’est‑à‑dire si la sentence est inappropriée, déraisonnable, de nature à déconsidérer l’administration de la justice ou contraire à l’intérêt public.

 

[17]      La sentence appropriée pour une infraction de cette nature va d’une réprimande sévère ou d’une réprimande à une amende accompagnée ou non d’une réprimande. J’ai soigneusement examiné tous les précédents judiciaires en matière de détermination de la sentence qui m’ont été soumis par les avocats. Les observations des avocats en l’espèce au sujet du montant de l’amende placent la sentence au premier rang de l’échelle, mais se situent dans la ligne de tels précédents. Le fait que le contrevenant est membre de la police militaire constitue aussi un facteur aggravant important en l’espèce.

 

[18]      La cour estime que la sentence proposée n’est pas inappropriée, déraisonnable, de nature à déconsidérer l’administration de la justice ou contraire à l’intérêt public. Par conséquent, la cour va accepter la recommandation conjointe des avocats de la poursuite et de la défense en ce qui a trait à la sentence. 

 

POUR CES MOTIFS, LA COUR :

 

[19]      Vous DÉCLARE coupable à l’égard du quatrième chef d’accusation de l’acte d’accusation.

 

[20]      Vous CONDAMNE à une réprimande et à une amende de 5 000 $ payable en versements mensuels de 150 $, à compter du 1er octobre 2014.


 

 

 

Avocats :

 

Major T.E.K. Fitzgerald, Service canadien des poursuites militaires

Procureur de Sa Majesté la Reine

 

Capitaine de corvette G.B. Walden, Direction du service d’avocats de la défense

Avocat adjoint du caporal B.D. Cartwright

 

Lieutenant de vaisseau B.A. Chandler, Assistant au juge‑avocat général, région centrale (Toronto)

Avocat adjoint du caporal B.D. Cartwright

 

 

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