Cour martiale

Informations sur la décision

Résumé :

Date de l'ouverture du procès : 23 octobre 2009

Endroit : BFC Gagetown, Édifice F-1, Oromocto (NB)

Chefs d'accusation

PREMIER ACTE D'ACCUSATION
•Chef d'accusation 1 (subsidiaire au chef d'accusation 2) : Art. 129 LDN, comportement préjudiciable au bon ordre et à la discipline.
•Chef d'accusation 2 (subsidiaire au chef d'accusation 1) : Art. 130 LDN, gêne l'emploi d'un bien (art. 430(1)c) C. cr.).
•Chefs d'accusation 3, 7 : Art. 97 LDN, ivresse.
•Chef d'accusation 4 : Art. 130 LDN, voies de fait (art. 266 C. cr.).
•Chef d'accusation 5 : Art. 90 LDN, s'est absenté sans permission.
•Chef d'accusation 6 : Art. 129(2) LDN, acte préjudiciable au bon ordre et à la discipline.
•Chef d'accusation 8 : Art. 83 LDN, a désobéi à un ordre légitime d'un supérieur.
•Chef d'accusation 9 (subsidiaire au chef d'accusation 10) : Art. 85 LDN, s'est conduit d'une façon méprisante à l'endroit d'un supérieur.
•Chef d'accusation 10 (subsidiaire au chef d'accusation 9) : Art. 86b) LDN, a adressé des propos provocateurs à un justiciable du code de discipline militaire, tendant ainsi à créer une querelle.

DEUXIÈME ACTE D'ACCUSATION
•Chefs d'accusation 1, 2 : Art. 90 LDN, s'est absenté sans permission.
•Chefs d'accusation 3, 4, 5 : Art. 101.1 LDN, a omis de se conformer à une condition imposée sous le régime de la section 3.

Résultats
•VERDICTS (premier acte d'accusation) : Chefs d'accusation 1, 3, 5, 6, 7, 8, 9 : Coupable. Chefs d'accusation 2, 10 : Une suspension d'instance. Chef d'accusation 4 : Retiré.
•VERDICTS (deuxième acte d'accusation) : Chefs d'accusation 1, 2, 3, 5 : Coupable. Chef d'accusation 4 : Retiré.
•SENTENCE : Emprisonnement pour une période de 21 jours et destitution du service de Sa Majesté.

Contenu de la décision

Référence : R. c. Soldat B.L.R. Billingsley, 2009 CM 2016

 

Dossier : 200947

 

 

 

COUR MARTIALE PERMANENTE

 

CANADA

NOUVEAU-BRUNSWICK

GAGETOWN

 

 

Date : Le 24 octobre 2009

 

SOUS LA PRÉSIDENCE DU CAPITAINE DE FRÉGATE P.J. LAMONT, J.M.

 

SA MAJESTÉ LA REINE

c.

SOLDAT B.L.R. BILLINGSLEY

(contrevenant)

 

SENTENCE

(prononcée de vive voix)

 

 

TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE

 

[1]       Soldat Billingsley, après avoir accepté et inscrit vos plaidoyers de culpabilité quant aux chefs daccusation nos 1, 3, 5, 6, 7, 8 et 9 dans lacte daccusation du 28 juillet 2009, et les chefs daccusation nos 1, 2, 3 et 5 dans lacte daccusation daté du 24 septembre 2009, la Cour vous déclare coupable de ces chefs daccusation. 

 

[2]       Il mincombe maintenant de fixer et de prononcer votre sentence. Pour ce faire, jai tenu compte des principes de détermination de la peine appliqués par les tribunaux ordinaires du Canada ayant compétence en matière pénale et par les cours martiales. Jai également examiné les faits en lespèce, tels quils ont été décrits dans lénoncé des circonstances, pièce 8, et les autres documents produits durant la présente instance, ainsi que les observations des avocats des deux parties.

 


[3]        Les principes de détermination de la peine guident la cour dans lexercice de son pouvoir discrétionnaire afin que celle-ci fixe une sentence appropriée et adaptée à chaque cas. La sentence doit être proportionnelle à la gravité de l'infraction, au degré de culpabilité ou de responsabilité et au caractère de son auteur. La cour se fonde sur les sentences fixées par les autres cours dans des affaires similaires, non parce qu'elle respecte aveuglément les précédents, mais parce que notre sens commun de la justice veut que les affaires similaires soient jugées de manière similaire. Néanmoins, la cour tient compte, lorsquelle fixe la sentence, des nombreux facteurs qui distinguent chaque affaire particulière dont elle est saisie, des circonstances aggravantes susceptibles de justifier une peine plus lourde et des circonstances atténuantes susceptibles den diminuer la gravité.

 

[4]        Les buts et objectifs de la détermination de la peine ont été formulés de différentes façons dans de nombreuses affaires précédentes. En général, ils sont reliés à la protection de la société, laquelle comprend bien entendu les Forces canadiennes, car ils favorisent le développement et le maintien dune collectivité juste, paisible, sûre et respectueuse de la loi, Fait important, dans le contexte des Forces canadiennes, ces objectifs incluent le maintien de la discipline, ce devoir dobéissance indispensable à lefficacité dune force armée. 

 

[5]        Les buts et objectifs comprennent également leffet dissuasif sur le contrevenant, afin que celui-ci ne récidive pas, et sur le public, afin que dautres ne suivent pas son exemple. La sentence vise aussi à assurer la réadaptation du contrevenant, à promouvoir son sens des responsabilités et à dénoncer les comportements illégaux. Certains de ces objectifs prévaudront inévitablement sur dautres dans létablissement dun sentence juste et appropriée pour chaque cas despèce. La cour chargée de fixer la sentence doit cependant tous les prendre en compte, car une sentence juste et appropriée devrait refléter un savant mélange de ces objectifs, adapté aux circonstances de lespèce.

 

[6]        Comme je vous lai indiqué lorsque vous vous êtes avoué coupable, larticle 139 de la Loi sur la défense nationale prévoit les différentes peines qui peuvent être infligées par la cour martiale. Ces peines sont limitées par la disposition de la loi créant linfraction et prévoyant une peine maximale. Une seule sentence peut être infligée au contrevenant, quil soit déclaré coupable dune ou de plusieurs infractions, mais la dite sentence peut comporter plus dune peine. Un principe important veut que le tribunal inflige la peine la moins sévère qui permettra de maintenir la discipline. Pour déterminer la sentence en lespèce, jai tenu compte des conséquences directes et indirectes que la déclaration de culpabilité et la sentence que je vais infliger pourraient avoir sur le contrevenant.

 

[7]        Les faits concernant les infractions sont énoncés dans la pièce 8, soit lexposé des circonstances. En bref : 

 


Le 29 août 2008, le contrevenant sest enivré. Il a alors saccagé, avec dautres personnes quil avait incitées à le faire, la chambre dun autre soldat cantonné à la base de Gagetown. 

 

Le 6 janvier 2009, le contrevenant sest à nouveau enivré au bar Dooley's à Oromocto durant la soirée, violant ainsi un couvre-feu et lordre ou la directive de ladjudant. De retour dans ses quartiers, il a désobéi aux ordres de ladjudant qui lavait sommé daller se coucher et de laisser sa porte ouverte. À peu près aux mêmes heures, il a utilisé un langage offensant et proféré des insultes en sadressant au caporal-chef.

 

À deux reprises en août 2009, le contrevenant sest absenté sans autorisation; la seconde fois, il sest absenté pendant 21 jours avant de se rendre au détachement de la Police provinciale de lOntario à Hawkesbury (Ontario) et il a été arrêté en vertu dun mandat délivré par le major Dove en application de la Loi sur la défense nationale. Il est sous la garde des autorités militaires depuis ce temps. 

 

Avant cette dernière absence sans autorisation et alors quil était en liberté aux conditions imposées par un officier réviseur, le contrevenant na pas respecté les conditions en omettant de se présenter tel quil lui avait été demandé le 28 juin et le 2 juillet 2009. 

 

[8]         Les avocats mont informé quils ont recommandé conjointement une peine demprisonnement de 60 jours et lexpulsion des Forces canadiennes. Comme ils lont fait remarquer, il appartient évidemment à la cour de prononcer la sentence, mais lorsque les deux parties sentendent sur une recommandation, celle-ci pèse lourd dans sa décision.

 

[9]         Les cours dappel du Canada, notamment la Cour dappel de la cour martiale dans laffaire Soldat Chadwick Taylor, 2008 CACM 1, tranchée le 15 janvier 2008, ont déclaré que le tribunal devrait retenir la recommandation conjointe des avocats des parties concernant la peine, sauf si la sentence recommandée est susceptible de jeter le discrédit sur ladministration de la justice ou quelle est autrement contraire à lintérêt public.  

 


[10]      Les avocats ne se sont pas entendus, toutefois, quant à la façon dont la cour devrait créditer, pour les besoins de la détermination de la sentence, la période de 34 jours que le contrevenant a passée sous garde militaire depuis quil sest rendu le 21 septembre. Lavocat du contrevenant était en faveur dun compte double conformément à la pratique répandue dans les cours civiles au Canada, une pratique que jai suivie dans laffaire Ex-soldat Vautier, tranchée le 1er février 2005. Lavocat du poursuivant reconnaît quil faut accorder un certain crédit pour réduire ce qui serait autrement une sentence appropriée de 60 jours demprisonnement mais il fait valoir quil ne faudrait accorder quun crédit dun jour pour chaque jour déjà passé en détention, ou au plus 1,25 jour.

 

[11]      J'ai certaines réserves quant à lidée des deux avocats voulant quils avancent une recommandation conjointe. Il me semble que, lorsque les parties ne sentendent pas sur la sentence réelle que la cour devrait infliger, cela ne peut correspondre à une recommandation conjointe même si les avocats peuvent sêtre entendus pour quune période en particulier soit considérée par la cour dans la détermination dune sentence appropriée. Par exemple, dans une affaire hypothétique, si les avocats ont convenu que la sentence appropriée pour une infraction en vertu du Code criminel était de 90 jours de prison, mais quils ne sont pas daccord sur la question de savoir si la sentence devrait être servie dans la communauté, comme sentence conditionnelle, ou les fins de semaine, comme sentence intermittente, leurs positions ne correspondraient pas à une recommandation conjointe proprement dite.   

 

[12]      Le paragraphe 719.(3) du Code criminel dispose que :

 

Pour fixer la peine à infliger à une personne déclarée coupable dune infraction, le tribunal peut prendre en compte toute période que la personne a passée sous garde par suite de linfraction.

 

Les tribunaux canadiens ont appliqué la présente disposition et ont habituellement crédité les contrevenants sur la base dun compte double, reconnaissant que les circonstances et les conditions de la détention présentencielle sont souvent très sévères comparativement à celles dans lesquelles une sentence est purgée dans un établissement correctionnel provincial ou un pénitencier. En outre, le temps quune personne passe en détention préventive en attendant son procès ou sa sentence ne compte pas dans les programmes légaux de remise de peine ou de libération conditionnelle. 

 

[13]      Le projet de loi C-25 se veut une réponse du Parlement à une pratique répandue.  Bien que le projet de loi ait été adopté par le Parlement, la loi nest pas encore en vigueur.

 

[14]      La présente cour a un pouvoir discrétionnaire quant à la façon dont la détention présentencielle doit être créditée lors de la détermination de la peine. À mon avis, lattribution dun compte double nest pas appropriée en lespèce, compte tenu que le contrevenant avait enfreint les conditions de sa libération lorsquil sest rendu et le fait que, à la lumière de la preuve déposée devant moi, les conditions dans lesquelles le temps mort a été servi par le contrevenant ne sont pas aussi sévères que celles qui prévalent dans les établissements de détention provisoire. Jestime que le contrevenant devrait être crédité dun jour pour chaque jour de détention présentencielle.

 


[15]      Jai, bien sûr, pris en considération les autres circonstances atténuantes, en particulier les plaidoyers de culpabilité et le relatif jeune âge du contrevenant. Étant donné son volumineux dossier dinfractions disciplinaires antérieures, notamment les absences sans autorisation pour des périodes allant jusquà 36 jours, de même que les infractions déposées devant moi aujourdhui, toutes accumulées ou commises sur une période de service relativement courte ayant commencé en octobre 2007, le contrevenant a amplement démontré quil était totalement inapte à offrir plus longtemps quelque service militaire service que ce soit, et je suis daccord avec les deux avocats pour dire que la destitution est appropriée.

 

[16]      Soldat Billingsley, veuillez vous lever. Je vous condamne à une peine demprisonnement de 21 jours et à la destitution du service de Sa Majesté. La sentence est prononcée à 13 h 30, le 24 octobre 2009. Veuillez vous asseoir.

 

 

[17]      Sous réserve uniquement de la présentation dune demande au sens de larticle 248.1 de la Loi sur la défense nationale, linstance devant la présente cour martiale permanente à légard du soldat Billingsley est terminée.

 

 

 

                                                             CAPITAINE DE FRÉGATE P.J. LAMONT, J.M.

 

AVOCATS :

 

Major J.J. Samson, Service canadien des poursuites militaires

Procureur de Sa Majesté la Reine

 

Lieutenant-Colonel D.T. Sweet, Direction du Service davocats de la défense

Avocat du soldat B.L.R. Billingsley

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