Cour martiale
Informations sur la décision
Date de l'ouverture du procès : 6 avril 2009
Endroit : BFC Edmonton, Édifice 179, chemin Rhine, Edmonton (AB)
Chefs d'accusation
•Chef d'accusation 1 : Art. 90 LDN, s'est absenté sans permission.
•Chef d'accusation 2 : Art. 114 LDN, vol.
•Chef d'accusation 3 : Art. 129 LDN, acte préjudiciable au bon ordre et à la discipline.
Résultats
•VERDICTS : Chefs d'accusation 1, 2, 3 : Coupable.
•SENTENCE : Détention pour une période de 14 jours.
Contenu de la décision
Référence : R. c. Caporal-chef J.M. Bolter, 2009 CM 2007
Dossier : 200903
COUR MARTIALE PERMANENTE
CANADA
ALBERTA
BASE DES FORCES CANADIENNES EDMONTON
Date: Le 6 avril 2009
SOUS LA PRÉSIDENCE DU CAPITAINE DE FRÉGATE P.J. LAMONT, J.M.
SA MAJESTÉ LA REINE
c.
CAPORAL-CHEF J.M. BOLTER
(Contrevenant)
SENTENCE
(Prononcée de vive voix)
[1] Caporal-chef Bolter, ayant accepté et inscrit votre plaidoyer de culpabilité à l’égard de trois chefs d’accusation – une première accusation d’absence sans permission, une deuxième accusation de vol et une troisième accusation de conduite préjudiciable au bon ordre et à la discipline, soit la consommation de cocaïne –, la présente cour vous déclare coupable des trois accusations.
[2] Je suis donc chargé de fixer et de prononcer votre sentence. Pour ce faire, j’ai examiné les principes de détermination de la peine qui s’appliquent aux tribunaux criminels canadiens ordinaires et aux cours martiales. J’ai également examiné les faits en l’espèce, les témoignages entendus et la preuve présentée au cours de la présente instance, ainsi que les observations des procureurs et des avocats de la défense.
[3] Les principes de la détermination guident la cour dans l’exercice de son pouvoir discrétionnaire afin que celle‑ci fixe une sentence appropriée et adaptée à chaque cas. Règle générale, la sentence doit être proportionnelle à la gravité de l’infraction, à son degré de culpabilité ou de responsabilité et au caractère de son auteur. La cour se fonde sur les sentences prononcées par les autres cours dans des affaires similaires, non parce qu’elle respecte aveuglément les précédents, mais parce que notre sens commun de la justice veut que les affaires similaires soient jugées de manière similaire. Néanmoins, la cour tient compte, lorsqu’elle fixe la sentence, des nombreux facteurs qui distinguent chaque affaire dont elle est saisie, des circonstances aggravantes susceptibles de justifier une peine plus lourde et des circonstances atténuantes susceptibles d’en diminuer la gravité.
[4] Les objectifs recherchés lorsqu’on détermine la sentence ont été exprimés de diverses manières dans de nombreuses affaires antérieures. En général, ils ont trait à la protection de la société, y compris bien entendu les Forces canadiennes, en favorisant le développement et le maintien d’une collectivité juste, paisible, sûre et respectueuse de la loi. Fait important, dans le contexte des Forces canadiennes, ces objectifs incluent le maintien de la discipline, ce devoir d’obéissance indispensable à l’efficacité d’une force armée. Les objectifs comprennent aussi l’effet dissuasif sur le contrevenant afin que celui‑ci ne récidive pas et sur le public afin que d’autres ne suivent pas son exemple. La sentence vise aussi à assurer la réadaptation du contrevenant, à promouvoir son sens des responsabilités et à dénoncer les comportements illégaux. Il est inévitable que certains de ces objectifs prévalent sur les autres pour que soit établie dans chaque cas d’espèce une sentence juste et appropriée. La cour chargée de fixer la sentence doit cependant tous les prendre en compte; une sentence juste et appropriée devrait être une combinaison de ces objectifs, adaptée aux circonstances particulières de l’espèce.
[5] L’article 139 de la Loi sur la défense nationale prévoit les différentes peines qui peuvent être infligées par les cours martiales. Ces peines sont limitées par la disposition de la loi créant l’infraction et prévoyant une peine maximale. Une seule sentence peut être infligée au contrevenant, qu’il soit déclaré coupable d’une seule infraction ou de plusieurs, mais la sentence peut comporter plus d’une peine. Un principe important veut que la cour inflige la peine la moins sévère qui permettra de maintenir la discipline.
[6] Pour déterminer la sentence en l’espèce, j’ai tenu compte des conséquences directes et indirectes de la déclaration de culpabilité et de la sentence que je vais fixer.
[7] Les faits liés à la commission de ces infractions sont présentés dans l’énoncé des circonstances, pièce 7. Le 24 septembre 2008, le contrevenant ne s’est pas présenté au travail à 7 h 30. Il s’y est présenté à 10 h 15 le même jour en affirmant qu’il ne s’était pas réveillé à temps malgré la sonnerie de son réveille-matin. Le 11 octobre 2008, alors qu’il purgeait une peine de 14 jours de détention en baraque en raison d’infractions antérieures d’absence sans permission, il a persuadé un sergent en service de lui permettre de rencontrer un inconnu dans le stationnement du Canex. Le contrevenant a acheté une petite quantité de cocaïne à l’inconnu moyennant un montant de 20 $ qu’il a volé dans une caisse gardée par le sergent en service, et il a ensuite consommé la drogue.
[8] La poursuite affirme que le règlement approprié en l’espèce est une période de détention allant de 7 à 14 jours. L’avocat de la défense convient que cette période de détention est appropriée et demande à la cour d’établir, à sa discrétion, la période détention qu’elle juge convenable.
[9] J’accepte le témoignage du contrevenant portant sur les difficultés personnelles exceptionnelles qu’il a éprouvées dans son enfance. J’accepte son témoignage démontrant comment et pourquoi il a développé une dépendance à la cocaïne et consommé d’autres drogues. J’accepte également son témoignage expliquant les conséquences de sa dépendance et de ses difficultés personnelles sur son divorce et les épreuves que vit sa fille. Malgré les nombreux obstacles, il semble être demeuré un membre productif des Forces canadiennes depuis qu’il s’est joint aux Forces régulières en 1991. Ses obstacles personnels semblent avoir pris le dessus vers 2005 lorsqu’on a diagnostiqué qu’il souffrait de dépression.
[10] Je ne souscris pas à la prétention de la poursuite portant que la mesure de dissuasion visant spécifiquement ce contrevenant devrait être l’objectif premier de la sentence. À mon avis, le contrevenant a manifesté ses remords non seulement par la célérité avec laquelle il a reconnu sa culpabilité mais également par sa coopération avec les enquêteurs de la police militaire en permettant de régler rapidement l’instance devant la cour. Toutefois, la dissuasion générale demeure une préoccupation lorsqu’il s’agit de statuer sur des infractions liées au fait de tromper un supérieur militaire pour faciliter, sur une base militaire, la consommation d’une drogue qui créée une forte dépendance.
[11] La réadaptation de ce contrevenant est également un facteur déterminant. À mon avis, l’affaire en l’espèce nécessite clairement une sentence comprenant une période de probation sous surveillance pour favoriser la réadaptation du contrevenant. Suivant la Loi sur la défense nationale, la cour n’a pas le pouvoir d’imposer une période de probation. Mais j’estime qu’une peine comprenant une privation de liberté peut tout aussi bien favoriser la réadaptation. Je prévois que ce sera le cas en l’espèce.
[12] Caporal-chefl Bolter, vous êtes condamné à une peine de détention d’une période de 14 jours.
Capitaine de frégate P.J. Lamont, J.M.
AVOCATS :
Le Capitaine de corvette S.C. Leonard, procureur militaire régional, région de l’Ouest
Procureur de Sa Majesté la Reine
La Capitaine B. Tremblay, Direction du service d’avocats de la défense
Avocat du Caporal-chef J.M. Bolter