Cour martiale

Informations sur la décision

Résumé :

Date de l'ouverture du procès : 27 avril 2010

Endroit : BFC Kingston, Édifice Forde, B-16, Kingston (ON)

Chefs d'accusation
•Chef d'accusation 1 : Art. 129 LDN, acte préjudiciable au bon ordre et à la discipline.

Résultats
•VERDICT : Chef d'accusation 1 : Coupable.
•SENTENCE : Une amende au montant de 300$.

Contenu de la décision

Cour martiale

 

Référence : R. c. Galbraith, 2010 CM 3007

 

Date : 20100427

Dossier : 2010-12

 

Cour martiale permanente

 

Base des Forces canadiennes Kingston

Kingston (Ontario), Canada

 

Entre : 

 

SA MAJESTÉ LA REINE

 

- et -

 

Sergent S.A. Galbraith, contrevenant

 

 

Devant : Lieutenant-colonel L.-V. d’Auteuil, J.M.

 


TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE

 

MOTIFS DE LA SENTENCE

 

[1]               Sergent Galbraith, la cour a accepté et inscrit votre plaidoyer de culpabilité relativement au premier et seul chef d’accusation figurant à l’acte d’accusation, et elle vous déclare aujourd’hui coupable l’infraction qui y est décrite.

 

[2]               Il m’incombe maintenant, en tant que juge militaire présidant la présente cour martiale permanente, de fixer votre sentence.

 

[3]               Le système de justice militaire est l’ultime moyen d’assurer le respect de la discipline dans les Forces canadiennes, laquelle discipline constitue un élément fondamental de l’activité militaire. Le but de ce système est de prévenir l’inconduite ou, de façon plus positive, d’encourager la bonne conduite. C’est grâce à la discipline que les forces armées s’assurent que leurs membres rempliront leur mission avec succès, de manière fiable et confiante. Elle permet aussi d’assurer le maintien de l’ordre et garantit que les personnes assujetties au code de discipline militaire seront sanctionnées au même titre que toute autre personne vivant au Canada.

 

[4]               ll est depuis longtemps reconnu que l’objet du système distinct de justice ou de tribunaux militaires est de permettre aux Forces armées de régler les affaires relatives au Code de discipline militaire et d’assurer le maintien du rendement et du moral au sein des Forces canadiennes. Cependant, la peine prononcée par tout tribunal, qu’il soit militaire ou civil, devrait constituer l’intervention minimale nécessaire compte tenu des circonstances. Ce principe est directement lié au devoir qui incombe à la cour en vertu de l’alinéa 112.48(2)b) des ORFC de « prononce[r] une sentence proportionnée à la gravité de l’infraction et aux antécédents du contrevenant ».

 

[5]               Le poursuivant et l’avocat du contrevenant ont présenté une recommandation conjointe concernant la peine. Ils proposent que la cour vous inflige une amende de 300 $ pour satisfaire aux exigences applicables sur le plan juridique.

 

[6]               Bien que la cour ne soit pas liée par cette recommandation conjointe, le principe suivant, que la Cour d’appel de la cour martiale du Canada a énoncé au paragraphe 21 de l’arrêt Soldat Taylor c. R., 2008 CACM 1, citant le paragraphe 17 de la décision rendue dans R. c. Sinclair, est généralement reconnu :

 

                Le juge chargé de la détermination de la peine ne doit aller à l’encontre de la recommandation conjointe que s’il existe des motifs impérieux de le faire, notamment lorsque la peine est inappropriée, déraisonnable, de nature à déconsidérer l’administration de la justice ou contraire à l’intérêt public.

 

[7]               La cour a examiné la recommandation conjointe au vu des faits pertinents énoncés dans le sommaire des circonstances et en tenant compte de leur importance. La cour a aussi tenu compte des principes applicables en matière de détermination de la peine, dont ceux énoncés aux articles 718, 718.1 et 718.2 du Code criminel, dans la mesure où ils ne sont pas incompatibles avec le régime de détermination de la peine prévu par la Loi sur la défense nationale. Ces principes et objectifs sont les suivants :

 

a.         premièrement, la protection du public, et le public s’entend des Forces canadiennes;

 

b.         deuxièmement, l’infliction d’une mesure visant à sanctionner le contrevenant;

 

c.         troisièmement, l’effet dissuasif de la peine pour le contrevenant, et quiconque pourrait être tenté de commettre des infractions semblables;

 

d.        quatrièmement, l’amendement et la réinsertion sociale du contrevenant;

 

e.         cinquièmement, le caractère proportionné de la peine compte tenu de la gravité de l’infraction et du degré de responsabilité du contrevenant;

 

f.          sixièmement, l’infliction d’une peine prononcée semblable à celles infligées pour des infractions semblables commises dans des circonstances semblables.

 

La cour a également pris en compte les observations présentées par les avocats et la preuve documentaire.

 

[8]               Je tiens à souligner qu’il faut en effet veiller à protéger le public en infligeant une peine permettant de satisfaire à l’objectif de dissuasion, tant générale que spécifique. Il est important de préciser que l’effet dissuasif général vise à faire en sorte que la peine infligée dissuade non seulement le contrevenant de récidiver, mais aussi toute autre personne qui, se trouvant dans une situation analogue, serait tentée de se livrer aux mêmes actes illicites.

 

[9]               En l’espèce, la cour doit se prononcer sur une infraction militaire précise, qui consiste à avoir commis un acte préjudiciable au bon ordre et à la discipline en fraternisant sans autorisation avec des étudiants de l’École d'électronique et des communications des Forces canadiennes en contravention des ordres permanents de l’EECFC. Cette infraction met en cause des principes propres aux Forces canadiennes, dont le devoir d’obéir aux personnes en autorité et de les appuyer, ainsi que les obligations des Forces canadiennes en matière d’éthique, dont l’intégrité et la responsabilité. Vu le poste que vous occupiez et le grade que vous déteniez au moment de la perpétration de l’infraction, vous vous deviez de servir d’exemple aux stagiaires et, parce qu’il s’agit d’un manquement à cette obligation, l’infraction reprochée est grave. Toutefois, la cour impose la sentence qu’elle estime être la peine la moins sévère compte tenu des circonstances.

 

[10]           Pour arrêter la sentence qu’elle estime juste et appropriée, la cour a tenu compte des circonstances aggravantes de même que des circonstances atténuantes suivantes.

 

[11]           La cour considère la gravité objective de l’infraction comme un facteur aggravant. Les accusations ont été portées sur le fondement du paragraphe 129(2) de la Loi sur la défense nationale et l’infraction reprochée est passible, comme peine maximale, de la destitution ignominieuse du service de Sa Majesté.

 

[12]           Relativement à la gravité subjective de l’infraction, la cour considère que deux éléments constituent des facteurs aggravants.

 

            Premièrement, le contexte dans lequel l’infraction a été commise. En tant qu’établissement d’enseignement, les relations respectueuses entre les instructeurs et les étudiants constituent une valeur fondamentale pour l’École d'électronique et des communications des Forces canadiennes (EECFC), contribuant à maintenir l’ordre et la discipline. Dans ce contexte, l’école a établi un ordre traitant spécifiquement de la fraternisation, et des efforts ont été déployés pour informer tant les étudiants que les instructeurs, dont vous, de son existence. Bien que vous connaissiez les principes en jeu, vous n’avez pas envisagé de demander l’autorisation avant d’improviser une rencontre sociale avec certains des étudiants de l’EECFC dans votre logement résidentiel du MDN situé dans un établissement militaire. Pendant un court instant vous avez fait fi de votre statut en tant que membre de l’équipe des instructeurs et omis de considérer comment une telle rencontre pouvait être perçue par les étudiants dont vous aviez la responsabilité.

 

            Deuxièmement, vu votre grade et le poste que vous occupiez à l’époque, vous n’avez pas fait preuve du leadership auquel on peut s’attendre de vous dans des situations de cette nature, et vous avez dans une certaine mesure incité les étudiants présents ainsi qu’un autre instructeur à contrevenir aux ordres établis par l’école.

 

[13]           La cour considère les facteurs suivants comme des circonstances atténuantes :

 

a.         Vu les faits présentés en l’espèce, la cour estime que votre plaidoyer de culpabilité traduit un véritable remords et votre désir sincère de demeurer un membre utile des Forces armées et de la société canadiennes.  Ce plaidoyer révèle que vous assumez l’entière responsabilité de vos actes.

 

b.         Vos excellents états de service au sein des Forces canadiennes et vos perspectives de carrière au sein celles‑ci. À l’exception des actes reprochés, vos états de service au sein des Forces canadiennes sont excellents.  Il semble que vous soyez disposé à accepter les conséquences de vos actes. Comme il appert de la pièce 12, l’incident nous vous a pas empêché de fournir un rendement exceptionnel pendant votre cours NQ6A;

 

c.         Le fait que vous n’ayez ni fiche de conduite ni casier judiciaire pour des infractions analogues.

 

d.        Le fait qu’il s’agit d’un acte isolé et qu’aucune infraction semblable n’ait été commise par la suite.

 

e.         Le fait qu’immédiatement après la perpétration de l’infraction on vous ait démis de votre poste d’instructeur et que vous ayez eu à vous acquitter de tâches différentes de celles que vous assumiez en tant qu’instructeur. Je reconnais assurément que cette mesure administrative ne constitue pas en soi une sanction disciplinaire. Cependant, elle a un effet dissuasif spécifique sur vous et peut avoir, dans une certaine mesure, un effet dissuasif général sur d’autres personnes. Elle a également pour effet de dénoncer votre conduite.

 

f.          Le fait que vous ayez dû subir le présent procès en cour martiale. Ce procès a déjà eu un effet dissuasif sur vous et sur d’autres personnes. La cour estime que vous éviterez de comparaître de nouveau en justice pour une infraction de même nature ou pour quelque infraction que ce soit.

 

[14]           En conséquence, la cour accepte la recommandation conjointe des avocats de vous infliger une amende étant donné que cette peine n’est pas contraire à l’intérêt public et qu’elle ne risque pas de déconsidérer l’administration de la justice.

 

[15]           La cour estime que le montant de l’amende, proposé par le poursuivant, soit 300 $, répond aux objectifs et aux principes de la détermination de la peine, notamment la parité des peines ainsi que la dissuasion, générale et spécifique, et permet de préserver la discipline et la confiance dans l’administration de la justice militaire.

 

[16]           Sergent Galbraith, je ne doute guère que votre objectif en organisant une rencontre dans votre logement était d’améliorer et de maintenir le moral et la cohésion des membres du peloton PAI. Toutefois, il importe de ne pas franchir la frontière, très ténue, qui sépare étudiants et instructeurs. Malheureusement, vous l’avez appris à vos dépens, mais je pense que cette expérience éprouvante renforcera vos qualités de leader. Je vous souhaite la meilleure des chances dans votre carrière.

 

[17]           Sergent Galbraith, la cour vous condamne donc une amende de 300 $, devant être entièrement payée sans délai.

 


 

Avocats :

 

Lieutenant-colonel M.M.M. Trudel et Capitaine E. Carrier, Service canadien des poursuites militaire

Procureur de Sa Majesté la Reine

 

Major J.A.E. Charland, Direction du service d’avocats de la défense

Avocat du sergent Galbraith

 

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