Cour martiale

Informations sur la décision

Résumé :

Date de l’ouverture du procès : 5 octobre 2004.
Endroit : BFC Esquimalt, édifice 30-N, 2e étage, Victoria (CB).
Chefs d’accusation:
• Chef d’accusation 1 (subsidiaire au chef d’accusation 2) : Art. 130 LDN, par un faux semblant obtient une chose à l’égard de laquelle l’infraction de vol peut être commise (Art. 362a) C. cr.).
• Chef d’accusation 2 (subsidiaire au chef d’accusation 1) : Art. 125a) LDN, a fait volontairement une fausse déclaration dans un document officiel signé de sa main.
• Chef d’accusation 3 Art. 115 LDN, a recelé un bien obtenu par la perpétration d’une infraction d’ordre militaire, sachant qu’il a été ainsi obtenu.
Résultats:
• VERDICTS: Chef d’accusation 1 : Une suspension d’instance. Chef d’accusation 2 : Coupable. Chef d’accusation 3 : Non coupable.
• SENTENCE: Une réprimande et une amende au montant de 1500$.

Contenu de la décision

Référence : R. c. Ancien matelot de 1re classe C.W. McLennan, 2004CM49

 

Dossier : S200449

 

 

 

COUR MARTIALE PERMANENTE

CANADA

COLOMBIE-BRITANNIQUE

BASE DES FORCES CANADIENNES ESQUIMALT

 

 

Date : 5 et 6 octobre 2004

 

 

 

PRÉSIDENT : LIEUTENANT-COLONEL M. DUTIL, juge militaire

 

 

 

SA MAJESTÉ LA REINE

c.

ANCIEN MATELOT DE 1re CLASSE C.W. MCLENNAN

(Accusé)

 

 

SENTENCE

(Prononcée oralement)

 

 

 

TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE

 

[1]   Après avoir accepté et enregistré votre plaidoyer de culpabilité en réponse au deuxième chef daccusation, la Cour vous déclare coupable de linfraction visée par ce chef daccusation et ordonne une suspension des procédures en ce qui concerne le premier chef daccusation.

 

[2]               La peine que la Cour vous infligera est celle quelle considère être la moins sévère pour maintenir la discipline et administrer la justice. Il importe de se rappeler, cependant, que la détermination de la peine est un exercice personnalisé et que la peine imposée par un tribunal, quil soit militaire ou civil, devrait représenter la mesure minimale nécessaire adaptée aux circonstances de lespèce.

 


[3]               Pour déterminer la peine, la Cour a tenu compte des circonstances de linfraction, telles quindiquées dans le sommaire des circonstances qua lu la poursuite, ainsi que des éléments de preuve atténuants et aggravants présentés au cours de laudience sur la détermination de la peine, notamment le témoignage de lancien matelot de 1re classe McLennan. Par ailleurs, pour les besoins de la présente sentence, elle a aussi pris en considération les observations formulées par les avocats, la jurisprudence pertinente qui lui a été présentée et les conséquences directes et indirectes que les conclusions et la peine auront sur lancien matelot de 1re classe McLennan

[4]               En général, les principes applicables à la détermination dune peine adaptée sont les suivants : premièrement, la protection de la société, y compris les Forces canadiennes; deuxièmement, le châtiment du contrevenant; troisièmement, leffet dissuasif de la peine, non seulement sur le contrevenant, mais aussi sur tous ceux qui pourraient être tentés de commettre les mêmes infractions; quatrièmement, lamendement et la réinsertion du contrevenant.

 

[5]               Le principe premier est la protection de la société. La Cour doit déterminer ce qui protégera le mieux la société : la dissuasion, la dénonciation, la réinsertion ou le châtiment ou une combinaison de plusieurs de ces facteurs.

 

[6]               Les avocats ont reconnu devant la Cour que celle-ci devrait imposer une peine qui met le principe de dissuasion générale en évidence. Jen conviens. Cependant, en lespèce, il ne sagit que dune seule activité, à savoir « faire une fausse inscription dans un document ». Chaque fois quun membre des FC commet une infraction en donnant de faux renseignements aux Forces canadiennes, quel que soit lusage auquel est destiné ce renseignement, cette personne abuse de la confiance mise en elle. Cependant, ce genre dabus de confiance ne peut, aux yeux de la Cour, être comparé à labus de confiance examiné par la Cour dappel de la cour martiale dans les cas dactes de caractère frauduleux et dinfractions de vol dont il est question dans les affaires Deg, Legaarden, Vanier, St-Jean ou Lévesque. Il ne faudrait pas non plus utiliser ces décisions hors de leur contexte. Comme la indiqué le juge Létourneau dans larrêt R. c. Saint-Jean, au par. 22 :

 

Un abus de confiance telle la fraude est souvent très difficile à découvrir et les enquêtes qui y ont trait sont dispendieuses. Les abus de confiance minent le respect du public envers linstitution et ont pour résultat la perte de fonds publics. Les membres des Forces armées qui sont déclarés coupables de fraude, et les autres membres du personnel militaire qui pourraient être tentés de les imiter, devraient savoir quils sexposent à des sanctions qui dénonceront de façon non équivoque leur comportement et leur abus de la confiance que leur témoignaient leur employeur de même que le public et les dissuaderont de se lancer dans ce genre dactivités.

 


[7]                 Bien quil ait été accusé, aux termes de larticle 130 de la Loi sur la défense nationale, dun acte à caractère frauduleux comme le fait de faire un faux-semblant et dobtenir un avantage, contrevenant ainsi à lalinéa 362(1)a) du Code criminel, infraction passible dun emprisonnement de 10 ans, et quil ait été accusé de recel aux termes de larticle 115 de la Loi sur la défense nationale, soit une autre infraction contre les biens et les droits de propriété, laquelle est passible dune peine maximale de sept ans demprisonnement, lancien matelot de 1re classe McLennan na pas été déclaré coupable de ces infractions ni de la conduite inhérente à celles-ci. La Cour ne sintéresse quà une seule occurrence dinscription de faux renseignement dans un document. Il est juste de dire que des déclarations de culpabilité aux trois accusations présentées à la Cour auraient fourni à celle-ci le contexte et le fondement juridiques  complets, et non seulement le contexte factuel, pour punir le contrevenant conformément aux principes et aux directives fournies par la CACM dans larrêt R. c. St-Jean. Ce nest tout simplement pas le cas. La poursuite a souscrit à lacceptation du plaidoyer de culpabilité au regard de la deuxième accusation sachant que sa décision conduirait à la suspension des procédures relativement à la première infraction. Elle nétait pas obligée de le faire. Elle aurait pu décider de poursuivre la troisième accusation, à savoir le recel de biens obtenus par la perpétration dune infraction dordre militaire dun montant denviron 20 875 $. Lavocat de la poursuite a décidé de ne pas agir ainsi. La Cour se voit donc obligée de déclarer laccusé non coupable de cette infraction. Ce nest pas à elle de remettre en question lexercice du pouvoir discrétionnaire de la poursuite dans la prise de décisions difficiles et importantes, mais comme on dit couramment : « On ne peut avoir le beurre et largent du beurre ». Il faut se rappeler que la peine doit être adaptée au délit et à lauteur du délit. En lespèce, le délit consiste à avoir inscrit un faux renseignement dans un document requis à des fins officielles. Par suite dun plaidoyer de culpabilité relativement à un seul incident la Cour ne peut condamner le contrevenant pour un autre acte criminel dont il aurait pu être déclaré coupable daprès le sommaire des circonstances qui a été préparé.

 

[8]                 Pour déterminer la peine à infliger la Cour a tenu compte de plusieurs facteurs atténuants et facteurs aggravants. Je commencerai par les facteurs aggravants :

 

Premièrement, la gravité objective de cette infraction et la peine maximale prescrite. Cette infraction est grave. Larticle 125 de la Loi sur la défense nationale prévoit quune personne déclarée coupable de cette infraction encourt, comme peine maximale, un emprisonnement de trois ans.

 

Deuxièmement, le fait que, par suite de votre fausse inscription dans un formulaire de demande/dautorisation dindemnité de vie chère, vous ayez touché une prestation pendant longtemps, soit plus de trois ans, qui a coûté aux Forces canadiennes plus de 20 000 $. Daprès la preuve soumise à la Cour, il ne fait aucun doute que cest délibérément et avec lintention de tromper que vous avez inscrit ce faux renseignement dans ce document. La Cour considère quil sagit dun facteur aggravant seulement dans la mesure où votre fausse inscription a amené les Forces canadienne à agir en fonction du renseignement fourni.

 

Troisièmement, votre rang et votre expérience dans les Forces canadiennes. Il est bien entendu que plus vous avez dexpérience, plus les attentes sont grandes à votre égard. Lintégrité et lhonnêteté en font partie.

 


Maintenant, passons aux faits que la Cour considère être des éléments atténuants dans les circonstances :

 

Le premier est le fait que vous ayez plaidé coupable de linfraction après avoir collaboré entièrement avec les autorités administratives et policières au cours de lenquête au sujet de linfraction.

 

Le deuxième est le fait que vous ayez entièrement remboursé aux Forces canadiennes le montant que vous aviez, à tort, touché une prestation de vie chère à laquelle vous naviez pas droit.

 

Le troisième est votre situation sociale, économique et familiale.

 

Et le quatrième, le fait que vous nayez eu aucun dossier disciplinaire ou criminel avant aujourdhui.

 

[9]                 Il faut se rappeler que la présente peine aura des conséquences sur votre vie bien au-delà de la punition précise qui vous sera infligée. Que le motif de votre libération des Forces canadiennes puisse ou non être modifié par suite de la présente déclaration de culpabilité nest quune hypothèse. Toutefois, votre déclaration de culpabilité aura certainement une conséquence qui est rarement soulignée, surtout lorsque le contrevenant reste membre des Forces canadiennes, cest que vous aurez maintenant un casier criminel, et ce, à une époque de votre vie où vous avez une jeune famille et commencez une nouvelle carrière. Cest un fait qui nest pas négligeable. 

 

[10]             Pour ces motifs, la Cour vous condamne à une réprimande et à une amende de 1 500 $.

 

 

 

LIEUTENANT-COLONEL M. DUTIL, juge militaire

 

 

 

Avocats :

 

Le capitaine K.A. Reichert, procureur militaire régional, Région de lOuest

Procureur de Sa Majesté la Reine

Le major L. Boutin, Direction du service davocats de la défense

Avocat de lancien matelot de 1re classe C.W. McLennan

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