Cour martiale

Informations sur la décision

Résumé :

Date de l'ouverture du procès : 14 décembre 2009

Endroit : BFC Esquimalt, Édifice 30-N, Victoria (CB)

Chefs d'accusation
•Chef d'accusation 1 : Art. 114 LDN, vol.
•Chef d'accusation 2 : Art. 130 LDN, faux (art. 367 C. cr.).
•Chef d'accusation 3 : Art. 130 LDN, emploi d'un document contrefait (art. 368 C. cr.).

Résultats
•VERDICTS : Chef d'accusation 1 : Coupable. Chefs d'accusation 2, 3 : Retirés.
•SENTENCE : Une réprimande et une amende au montant de 1000$.

Contenu de la décision

 

COUR MARTIALE

 

Référence : R. c. Meadus, 2009 CM 1016

 

Date : 20091214

Dossier : 200924

 

Cour martiale permanente

 

Base des Forces canadiennes Esquimalt

Esquimalt (Colombie-Britannique), Canada

 

Entre :

 

Sa Majesté la Reine

 

- et -

 

Soldat A. Meadus, contrevenante

 

 

En présence du : Colonel M. Dutil, J.M.C.


 

TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE

 

MOTIFS DE LA SENTENCE

 

(Prononcés de vive voix)

 

[1]               Soldat Meadus, après avoir accepté et inscrit votre plaidoyer de culpabilité relativement au premier chef d’accusation pour une infraction de vol en violation de l’article 114 de la Loi sur la défense nationale, la cour vous déclare coupable à l’égard de ce chef. Les faits entourant la perpétration de l’infraction sont simples et peuvent être résumés comme suit :

 

Au début de septembre 2008, le Soldat Meadus est demeurée chez son amie, Mme Druken, dont le mari était alors parti en déploiement. Cette situation convenait à toutes deux, étant donné que Mme Druken, qui était enceinte de 8 mois, ne désirait pas rester seule à la maison, alors que le Soldat Meadus trouvait cela avantageux, car elle avait récemment été autorisée à quitter le centre Edgewood où elle se trouvait pour des problèmes liés à sa pharmacodépendance. Le Soldat Meadus a profité de l’occasion pour voler à Mme Druken, dans sa propre maison, un chèque de compte personnel. Le Soldat Meadus a utilisé le chèque en imitant la signature de Mme Druken afin d’encaisser 300 $. Peu après, la contrevenante a admis à la police militaire son vol, la falsification qui a suivi et l’usage du faux document. À ce jour, le Soldat Meadus n’a pas restitué l’argent volé et rien ne prouve à la cour qu’elle en ait l’intention.

 

[2]               Le procureur de la poursuite recommande que la cour inflige une peine consistant en une réprimande et en une amende d’un montant oscillant entre 800 et 1200 dollars. Le procureur de la poursuite soutient qu’une telle peine répondrait au besoin de dissuasion générale et de dissuasion spécifique à la lumière des facteurs aggravants de la présente affaire, notamment l’abus de confiance de la part de la contrevenante, la préméditation et le fait qu’il n’y a pas eu restitution. L’avocat de la défense prétend qu’une peine appropriée consisterait en une amende de 600 $. En plus des circonstances atténuantes invoquées par le procureur de la poursuite comme le plaidoyer de culpabilité, la collaboration de la contrevenante avec les autorités policières et sa libération prochaine des Forces canadiennes en avril 2010 pour des raisons de santé mentale, l’avocat de la défense a demandé à la cour de prendre en considération le fait que le Soldat Meadus est maintenant sur la bonne voie, comme le montre son engagement auprès de la Victoria Cool Aid Society — un organisme communautaire venant en aide aux adultes itinérants ou dans le besoin — en vue de devenir l’un de leurs conseillers. L’avocat de la défense soutient que le Soldat Meadus désire maintenant faire le bien. À l’appui de cet argument, l’avocat de la défense a fait valoir que la somme volée était modique.

 

[3]               La preuve présentée à la cour dans le cadre de la procédure de détermination de la peine était sommaire. La défense s’est vu offrir la possibilité d’étoffer sa preuve afin d’aider la cour à prononcer une peine appropriée. L’avocat de la défense, après avoir consulté la contrevenante, a refusé de rouvrir sa preuve.

 

[4]               Il est reconnu depuis longtemps que le but d’un système de justice militaire distinct est de permettre aux Forces armées de régler les questions qui touchent directement à la discipline, à l’efficacité et au moral des troupes. Cependant, la peine imposée par un tribunal, qu’il soit civil ou militaire, doit toujours être la peine la moins sévère selon les circonstances particulières de l’affaire.

 

[5]               Lorsqu’il s’agit de déterminer quel châtiment ou quelle peine il convient d’infliger, il faut prendre en compte un ou plusieurs des objectifs et principes qui suivent :

 

premièrement, protéger le public, y compris les Forces canadiennes;

 

deuxièmement, punir et dénoncer le comportement illégal;

 

troisièmement, dissuader le délinquant, et quiconque, de commettre des infractions semblables;

 

quatrièmement, isoler au besoin les délinquants du reste de la société, y compris des autres membres des Forces canadiennes;

 

cinquièmement, favoriser la réinsertion sociale des délinquants;

 

sixièmement, la peine doit être proportionnelle à la gravité de l’infraction et au degré de responsabilité du délinquant;

 

septièmement, la peine prononcée doit être semblable à celles infligées pour des infractions semblables commises dans des circonstances semblables;

 

huitièmement, le tribunal doit, avant d’envisager la privation de liberté, examiner la possibilité de prononcer une ou plusieurs sanctions moins contraignantes lorsque les circonstances le justifient;

 

enfin, le tribunal doit prendre en considération, le cas échéant, les circonstances aggravantes ou atténuantes liées à la perpétration de l’infraction ou à la situation du délinquant.

 

[6]               En l’espèce, il importe d’assurer la protection du public en imposant une sentence qui mettra l’accent sur la dissuasion spécifique, la dissuasion générale ainsi que la dénonciation du comportement. La réinsertion sociale est également un facteur qui s’applique, quoique dans une moindre mesure. Je considère les facteurs suivants comme aggravants en l’espèce :

 

1.                  La gravité objective du vol, lequel constitue une infraction en vertu de l’article 114 de la Loi qui est passible au maximum d’un emprisonnement de 7 ans lorsque le contrevenant n’était pas chargé de la garde ou de la distribution de l’objet volé, ni n’en avait la responsabilité, de par son grade ou son emploi. Il s’agit d’une infraction grave.

 

2.                  Le deuxième facteur aggravant est le bris de la confiance qu’accordait à la contrevenante sa victime, la conjointe d’un militaire, qui a accepté que le Soldat Meadus réside avec elle pendant l’absence du mari de Mme Druken, parti en déploiement. Ce fait est particulièrement troublant et épouvantable. Au sein des Forces canadiennes, cela revient à voler un membre de sa propre famille. La cour ne dispose d’aucun élément de preuve qui expliquerait la raison d’un tel geste. Par conséquent, la cour retient le raisonnement du poursuivant selon lequel les gestes posés par la contrevenante après le vol corroborent de façon logique et raisonnable la thèse du vol prémédité.

 

3.                  Le troisième facteur aggravant est qu’il n’y a pas eu restitution et qu’aucun arrangement n’a été pris pour rembourser la victime, compte tenu de la somme modique volée et du lien étroit avec la victime qui était une amie de la contrevenante au point de la laisser vivre avec elle.

 

[7]               Il y a quelques facteurs atténuants importants en l’espèce. Le plaidoyer de culpabilité est un élément positif, car il a permis de faire l’économie de longues procédures judiciaires. De plus, il est cohérent en regard de la collaboration de la contrevenante avec la police. Cependant, la cour ne considère pas que ce plaidoyer de culpabilité constitue l’expression de remords véritables à l’égard de la victime, vu l’absence de restitution d’une si petite somme d’argent ou de preuve d’arrangements pour rembourser la somme volée. Cependant, le fait que vous n’ayez pas exprimé de remords ne peut être considéré comme un facteur aggravant. Parmi les autres facteurs atténuants, on compte votre âge relativement jeune, votre situation financière et familiale, notamment le fait d’être la mère de deux jeunes enfants.

 

[8]               Votre avocat a fait valoir que votre libération prochaine devrait atténuer la peine. Je ne suis pas d’accord. Votre libération prochaine des Forces canadiennes n’a aucun lien avec les événements entourant la présente affaire. S’il y en a un, aucune preuve n’a été présentée à la cour au soutien d’une telle affirmation. Dans ce contexte, je considère cette future libération comme un facteur neutre, de la même façon que l’inscription sur votre fiche de conduite concernant une infraction d’absence sans permission, qui n’a aucun lien avec la présente affaire, est également un facteur neutre dans les circonstances.

 

[9]               Par ailleurs, il n’y a aucune preuve convaincante qui permette d’établir un lien raisonnable entre votre santé mentale au moment de l’infraction et les raisons qui expliqueraient le mobile du vol que vous avez commis afin de considérer votre santé mentale comme un facteur atténuant dans les circonstances. Par conséquent, la cour a pris acte de la situation décrite dans la lettre du centre Edgewood, produite comme pièce 9, mais sa pertinence et son importance sont très limités sans autre preuve.

 

[10]           Je vous souhaite sincèrement de réussir à devenir conseillère au sein de la Victoria Cool Aid Society et d’atteindre votre but d’aider les plus démunis de cette communauté, après votre libération des Forces canadiennes. Cependant, afin d’être fidèle à vous-même, vous pourriez d’abord essayer de réparer le préjudice que vous avez causé dans le cadre de la présente affaire et prendre les arrangements nécessaires avec votre victime, si ce n’est déjà fait. Sinon, votre « formation en cours d’emploi » à la Victoria Cool Aid Society pourrait bénéficier de la compassion, de l’honnêteté et de l’intégrité que vous n’auriez su démontrer à l’égard de votre amie et victime.

 

[11]           Soldat Meadus, levez-vous. Pour tous ces motifs, la cour vous adresse une réprimande et vous inflige une amende de 1000 $.


 

Avocats :

 

Le Major B. McMahon, Service canadien des poursuites militaires

Procureur de Sa Majesté la Reine

 

Le Lieutenant de vaisseau M. Létourneau, Direction du service d’avocats de la défense

Avocat du Soldat A. Meadus

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