Cour martiale

Informations sur la décision

Résumé :

Date de l’ouverture du procès : 10 mars 2014.

Endroit : BFC Valcartier, édifice 534, l’Académie, Courcelette (QC).

Chefs d’accusation
•Chefs d’accusation 1, 2, 3, 4, 5, 6, 8, 9 : Art. 90 LDN, s’est absenté sans permission.
•Chef d’accusation 7 : Art. 129 LDN, négligence préjudiciable au bon ordre et à la discipline.

Verdicts
•Chefs d’accusation 1, 2, 3, 4, 5, 6, 8 : Coupable.
•Chefs d’accusation 7, 9 : Retirés.

Sentence
•Emprisonnement pour une période de 15 jours. L’exécution de la peine d’emprisonnement a été suspendue.

Contenu de la décision

COUR MARTIALE

 

Référence : R c Rodgers, 2014 CM 1004

 

Date : 20140310

Dossier : 201314

 

Cour martiale permanente

 

Base de soutien de la 2e Division du Canada Valcartier

Courcelette (Québec) Canada

 

Entre :

 

Sa Majesté la Reine

 

- et -

 

Soldat M. Rodgers, contrevenant

 

 

Devant : Colonel M. Dutil, J.M.C.


 

MOTIFS DE LA SENTENCE

 

(Oralement)

 

[1]               Le soldat Rodgers tel qu'il était son grade à l'époque a plaidé coupable à six chefs d'accusation d'absence sans permission portés aux termes de l'article 90 de la Loi sur la défense nationale.

 

[2]               Ces infractions ont été commises entre la fin mars et le mois d'août 2012. La durée des absences varient, cinq d'entre-elles sont d'une durée d'une heure et moins, alors que les autres sont soit d'une journée ou de quelques heures.

 

[3]               Les procureurs suggèrent à la cour ce matin conjointement que la sentence soit composée d'une peine d'emprisonnement de 15 jours et ils demandent également conjointement que l'exécution de cette peine d'emprisonnement soit suspendue.

 

[4]               La preuve déposée durant l'audition sur la sentence fait ressortir clairement que le contrevenant avait ou manifestait de nombreux problèmes d'attitude et de comportement qui ont conduit aux procédures disciplinaires devant cette cour et aussi celles qui les ont précédées. Ses problèmes sont directement liés à des troubles psychologiques relativement important associés à une consommation d'alcool excessive et de « spice » qui était utilisé par le contrevenant pour régler des épisodes d'insomnie sévère qui auraient pris naissance à son retour d'Afghanistan.

 

[5]               Selon son psychiatre, le soldat Rodgers a des mécanismes d'adaptation limités. Cela expliquerait, selon elle, pourquoi il aurait opté d'augmenter sa consommation d'alcool et aussi l'impulsivité qui l'avait amené à prendre des congés non-autorisés plutôt que de consulter des professionnels de la santé pour recevoir des soins notamment en matière de santé mentale. Selon son psychiatre, il est possible que les symptômes étaient présents bien avant leur découverte et, selon elle, cela pourrait expliquer les difficultés qu'il avait démontré à se conformer aux demandes qui lui étaient transmises par ses supérieurs et les frictions qu'il avait avec sa chaîne de commandement.

 

[6]               Le soldat Rodgers a été libéré des Forces canadiennes en novembre 2012 sous l'item 5f). Les procureurs ont fourni à la cour l'information qui explique aussi la longueur des délais dans cette cause qui sont notamment attribuable à des changements d'avocats et aussi à la demande d'une évaluation psychiatrique du soldat Rodgers.

 

[7]               Soldat Rodgers est un jeune homme de 25 ans. Sa fiche de conduite militaire fait état d'infractions de même nature commis quelques mois précédent le mois de mars 2012. Il a aussi été déclaré coupable devant un tribunal civil de conduite avec facultés affaiblies en mai 2012 pour une infraction commise le 9 février 2012 et la cour prend en note que le 9 février 2012 est aussi une journée où il était absent sans permission.

 

[8]               Il ne fait aucun doute, qu'entre la fin 2011 et la date de sa libération des Forces canadiennes en novembre 2012, que le soldat Rodgers n'était aucunement réceptif à la discipline militaire et à l'acceptation de son importance dans le contexte des Forces armées. Il a en ultimement subit les conséquences soit sa libération des Forces canadiennes.

 

[9]               Or depuis ce temps, il semble être sur la bonne voie pour régler ses problèmes de consommation. De plus, sa réinsertion dans la vie civile semble, à ce jour, concluante. Il suit un cours subventionné par Emploi Québec depuis novembre 2013 et la cour constate qu'il y est un étudiant assidu et qu'il ne s'est pas absenté depuis le début de sa formation. Je considère cet élément est particulièrement important dans les circonstances. Il demeure chez sa mère à Montréal et il n'a pas d'emploi.

 

[10]           Les procureurs ont soumis à la cour une multitude de décisions en semblable matière et leur suggestion commune m'apparait raisonnable. La peine d'emprisonnement suggérée par les procureurs contribue aux objectifs de dissuasion générale et de dénonciation qui sont nécessaires dans le contexte de ce type d'infraction.

 

[11]           Mais j'abonde également ou j'accepte l'opinion exprimée par les procureurs à l'effet que la réhabilitation est très importante en l'espèce pour deux raisons : d'une part, il a déjà été libéré des Forces canadiennes pour les gestes qui ont fait l'objet d'accusations antérieures et des accusations qui sont devant cette cour et de son comportement en général; et d'autre part, que le soldat Rodgers se prend en main. La cour considère qu'elle doit favoriser la réinsertion sociale du contrevenant, et à tout le moins, ne pas y nuire ou y mettre un frein.

 

[12]           Il n'y a pas que dans la vie militaire où l'on doit se présenter à l'heure au travail ou ailleurs. Et il n'y a pas que dans la vie militaire où l'on doit respecter les consignes que l'on reçoit. Il faut accepter que la vie dans une société libre et démocratique implique ― comporte avec elle que l'on doit aussi avoir des obligations. Et c'est le lot de la vie adulte d'avoir des devoirs et des obligations.

 

[13]           J'ai bon espoir que le soldat Rodgers soit sur la bonne voie. J'ai pu observer durant l'audition sur sentence aujourd'hui, non seulement son comportement poli, mais aussi j'ai pu voir à quel point ou jusqu'à quel point il a le soutien de sa mère. Et vous devez vous considérer chanceux, privilégié d'avoir le soutien de votre mère à ce moment-ci. Et c'est à vous maintenant de démontrer que vous méritez amplement et pleinement la confiance qu'elle vous porte et aussi celle que la cour vous porte parce que la cour va accepter la suggestion commune qui a été préparée par les procureurs.

 

[14]           Donc je vous donne, monsieur Rodgers, l'opportunité de démontrer que vous pouvez contribuer, non seulement maintenant mais pour le reste de votre vie adulte, que vous pouvez contribuer efficacement à notre société. Vous avez tous les outils pour le faire et vous en développerez d'autres au fur et à mesure des mois années et des années qui se dérouleront.

 

[15]           Je pense que dans les circonstances, il n'est ni nécessaire ni raisonnable de faire purger au contrevenant une peine d'emprisonnement aussi courte qu'elle pourrait être pour des infractions d'absence sans permission commises il y a environ 1 an 18 mois. La cour croit que de faire purger une peine d'emprisonnement de 15 jours pourrait être contreproductive dans le sens que le tort que cela pourrait causer ou pourrait entraîner au processus de réhabilitation qui semble bien amorcé. Dans ces circonstances, je pense que la balance des facteurs milite en faveur d'une suspension de l'exécution de la peine d'emprisonnement telle qu'elle l'a été demandée par les procureurs.

 

POUR CES MOTIFS, LA COUR :

 

[16]           DÉCLARE le contrevenant coupable des premier, deuxième, troisième, quatrième, cinquième, sixième et huitième chefs d'accusation d'absence sans permission aux termes de l'article 90 de la Loi sur la défense nationale.

 

[17]           CONDAMNE le contrevenant à l'emprisonnement pour une période de 15 jours.

 

ET

 

[18]           SUSPEND l'exécution de cette peine d'emprisonnement.


 

Avocats :

 

Major G. Roy, Service canadien des poursuites militaires

Avocat de la poursuivante

 

Capitaine de corvette P. Desbiens, Service d'avocats de la défense

Avocat pour l'ex-soldat M. Rodgers

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