Cour martiale

Informations sur la décision

Résumé :

Date de l'ouverture du procès : 16 mars 2004
Endroit : Centre Asticou, bloc 2600, pièce 2601, salle d'audience, 241 boulevard de la Cité-des-Jeunes, Gatineau (QC).
Chefs d'accusation :
• Chefs d’accusation 1, 2 : Art. 129 LDN, comportement préjudiciable au bon ordre et à la discipline.
• Chef d’accusation 3 : Art. 129 LDN, négligence préjudiciable au bon ordre et à la discipline.
• Chef d’accusation 4 : Art. 116 LDN, a perdu par négligence un bien public.
Résultats :
• VERDICTS : Chefs d’accusation 1, 3, 4 : Non coupable. Chef d’accusation 2 : Coupable.
• SENTENCE : Une amende au montant de 500$.

Contenu de la décision

Référence : R. c. Major S.L. Stevens, 2004cm3007

 

Dossier : 200462

 

 

COUR MARTIALE PERMANENTE

CANADA

QUÉBEC

CENTRE ASTICOU, GATINEAU

 

Date : Le 16 mars 2004

 

DEVANT : LE CAPITAINE DE FRÉGATE P.J. LAMONT, J.M.

 

SA MAJESTÉ LA REINE

c.

MAJOR S.L. STEVENS

(Accusée)

 

SENTENCE

(Prononcée de vive voix)

 

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

[1]                    Major Stevens, ayant accepté et enregistré votre plaidoyer de culpabilité au deuxième chef d’accusation, la cour vous déclare maintenant coupable de ce chef d’accusation. Il mincombe maintenant de déterminer et de prononcer votre peine. Pour ce faire, jai tenu compte des principes de détermination de la peine appliqués par les cours ordinaires de juridiction criminelle au Canada et par les cours martiales. Jai tenu compte également des faits de lespèce, tels quils sont décrits dans le sommaire des circonstances, pièce 6, de la preuve qui a été produite dans le cadre de la présente instance ainsi que des observations des avocats de la poursuite et de la défense.

 

[2]                    Les principes de détermination de la peine guident la cour dans


lexercice de son pouvoir discrétionnaire en vue de déterminer une peine adéquate et adaptée à chaque cas. En règle générale, la peine doit correspondre à la gravité de linfraction, au degré de responsabilité de son auteur et à sa moralité. La cour se fonde sur les peines prononcées par les autres tribunaux dans des affaires similaires, non parce quelle respecte aveuglément les précédents, mais parce que son sens commun de la justice veut quelle juge de façon similaire les affaires similaires. Néanmoins, lorsquelle détermine la peine, la cour tient compte des nombreuses circonstances qui distinguent chaque affaire dont elle est saisie, tant des circonstances aggravantes susceptibles de justifier une peine lourde que des circonstances atténuantes susceptibles den diminuer la sévérité. Les buts et les objectifs recherchés lorsque lon détermine la peine ont été exposés de diverses manières dans de nombreuses affaires antérieures. En général, ils visent à protéger la société, y compris bien entendu les Forces canadiennes, en favorisant le développement et le maintien, au sein de cette société, dun climat de justice, de paix, de sécurité et de respect des lois. Fait important, dans le contexte des Forces canadiennes, ces objectifs incluent le maintien de la discipline, cette habitude dobéir si nécessaire à lefficacité dune force armée. Ces buts et objectifs comprennent aussi un volet dissuasion individuelle, pour éviter toute récidive du contrevenant, et un volet dissuasion générale, pour éviter que dautres ne soient tentés de suivre son exemple. La peine a aussi pour objet dassurer la réinsertion du contrevenant, de promouvoir son sens des responsabilités et de dénoncer les comportements illégaux. Il est normal quau cours du processus permettant darriver à une peine juste et adaptée à chaque cas, certains de ces buts et objectifs lemportent sur dautres. Toutefois, il incombe à la cour chargée de déterminer la peine de les prendre tous en compte; une peine juste et adaptée est une sage combinaison de ces buts, adaptée aux circonstances particulières de lespèce.

 

[3]                    Comme je vous lai expliqué lorsque vous avez présenté votre plaidoyer de culpabilité, larticle 139 de la Loi sur la défende nationale prévoit les différentes peines quune cour martiale peut infliger. Ces peines sont limitées par la disposition de la loi créant les infractions et prévoyant les peines maximales et aussi par le champ de compétence susceptible dêtre exercé par la cour.

 

[4]                    Une seule peine peut être infligée au contrevenant, quil soit déclaré coupable dune seule infraction ou de plusieurs. Mais la peine peut comporter plus dune sanction. Un principe important veut que le tribunal inflige la peine la moins sévère qui permettra de maintenir la discipline. Pour déterminer la peine dans la présente affaire, jai tenu compte des conséquences directes et indirectes quauront la déclaration de culpabilité et la peine que je mapprête à infliger.

 

[5]                    En résumé, les faits révèlent que le Major Stevens s’est vu remettre des chèques de voyage American Express d’une valeur de 100 000 $ pour accompagner un détachement de reconnaissance à Diego Garcia dans l’océan Indien. Au lieu de transporter les fonds dans une serviette verrouillée ou tout autre contenant approprié comme l’exige l’OAFC 202-2, la contrevenante a transporté les fonds dans son propre sac à dos non verrouillé. Il appert que, pendant une nuitée à Newport News, en Virginie, la contrevenante a laissé les fonds dans le sac à dos resté dans sa chambre d’hôtel pendant qu’elle allait dîner et qu’un ou plusieurs inconnus ont volé six chèques d’une valeur de 1 000 $US chacun dans sa chambre d’hôtel. Cinq de ces six chèques ont été encaissés depuis, ce qui a occasionné une perte de 7 600 $CAN aux Forces canadiennes.

 


[6]                    La poursuite recommande de disposer de l’affaire en infligeant une amende se situant entre 750 $ et 1250 $.

 

[7]                    Les deux avocats s’entendent sur les nombreuses caractéristiques de l’espèce qui commandent une atténuation de la peine. Il s’agit d’une première infraction perpétrée par un membre qui compte 28 ans de service distingué dans les Forces canadiennes. C’est un officier des finances compétent qui a reçu une recommandation élogieuse de ses superviseurs. Elle est d’ailleurs considérée comme une exécutante brillante. Elle a collaboré pleinement aux enquêtes policières sur la perte et sur sa responsabilité à l’égard de celle-ci, et elle a plaidé coupable devant la cour à la première occasion. La perspective de subir un procès devant la cour martiale l’a préoccupée pendant une longue période depuis la perpétration de l’infraction et je souscris à l’argument selon lequel l’accusation a causé à la contrevenante de l’embarras et de l’humiliation parmi ses collègues de travail. Je conviens également que son omission de satisfaire aux exigences l’OAFC 202-2 a été motivée par le désir de cacher aux autres qu’elle était en possession d’une importante somme d’argent afin de mieux protéger ces fonds. Elle croyait sincèrement qu’elle faisait de son mieux pour en assurer la sécurité. Rien n’indique ici que la contrevenante a retiré un gain personnel. Il appert néanmoins que les autorités des Forces canadiennes l’obligeront à rembourser le montant de la perte de 7 600 $.

 

[8]                    Je ne saurais perdre de vue le fait que l’OAFC vise à réduire au minimum le risque de perte en imposant des exigences raisonnables en matière de manutention des fonds en transit. Le simple fait d’avoir placé les fonds dans un contenant verrouillé, comme l’exige le règlement, aurait pu dissuader tout voleur éventuel. Je tiens également compte du fait que l’omission de la contrevenante de prendre les précautions nécessaires a mis en péril une plus grande somme d’argent que celle qui a effectivement été perdue.

 

[9]                    La défense convient qu’une amende constitue une peine appropriée et soutient que cette amende ne devrait pas dépasser 200 $ pour que l’inscription puisse être radiée de la fiche de conduite de la contrevenante après 12 mois conformément à la DOAD 7006-1, intitulée « Établissement et tenue des fiches de conduite », sans quoi la contrevenante devrait vivre 72 mois avec cette inscription dans sa fiche conduite.

 

[10]                  Je constate en lisant la DOAD 7006-1 que la contrevenante pourra ultérieurement présenter une demande de pardon en vertu de la Loi sur le casier judiciaire, ce qui aurait pour effet de radier l’inscription de la fiche de conduite de la contrevenante. Le délai d’attente sous le régime de la Loi sur le casier judiciaire est beaucoup plus court que 72 mois.

 


[11]                  Major Stevens, veuillez vous lever. Vous êtes condamnée à une amende de 500 $, payable à raison de 100 $ par mois à compter du 31 mars 2004. Dans l’éventualité où vous seriez libérée des Forces canadiennes pour quelque motif que ce soit, le montant alors impayé de l’amende deviendra dû la veille de votre départ.

 

[12]                  Vous pouvez disposer, Major Stevens.

 

[13]                  L’instance devant la présente cour martiale concernant le Major Stevens est par les présentes terminée.

 

 

 

LE CAPITAINE DE FRÉGATE P.J. LAMONT, J.M.

 

Avocats :

 

Le Major B. Cloutier, Direction des poursuites militaires

Procureur de Sa Majesté la Reine

Le Major A.E. Appolloni, Direction du service d’avocats de la défense

Avocat du Major Stevens

 

 

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