Cour martiale

Informations sur la décision

Résumé :

Date de l’ouverture du procès : 26 mai 2014.

Endroit : The Loyal Edmonton Regiment, Manège militaire Brigadier-général J.C. Jefferson, 11630 – 109e rue, Edmonton (AB).

Chef d’accusation
• Chef d’accusation 1 : Art. 86b) LDN, a adressé des gestes provocateurs à un justiciable du code de discipline militaire, tendant ainsi à créer du désordre.

Résultats
•VERDICT : Chef d’accusation 1 : Coupable.
•SENTENCE : Une amende au montant de 350$.

Contenu de la décision

 

COUR MARTIALE

 

Référence : R. c. Dahr, 2014 CM 1013

 

Date : 20140526

Dossier : 201395

 

Cour martiale permanente

 

Brigadier-général J.C. Jefferson Armoury

Edmonton (Alberta), Canada

 

Entre : 

 

Sa Majesté la Reine

 

- et -

 

Soldat M.A. Dahr, contrevenant

 

 

En présence du : Colonel M. Dutil, J.M.C.


 

MOTIFS DE LA SENTENCE

 

(Prononcés de vive voix)

 

[1]               Le soldat Dahr a plaidé coupable à l’infraction prévue à l’alinéa 86b) de la Loi sur la défense nationale, pour avoir adressé un geste provocateur à un justiciable du code de discipline militaire.

 

[2]               Les faits en cause sont simples. En juillet 2013, le soldat Dahr assistait au cours de la période de développement 1 de l’infanterie au Centre d’instruction de la 3e Division du Canada, à Wainwright, en Alberta. Il avait réussi le cours préalable au même endroit à la fin de juin 2013 et pendant qu’il suivait la formation donnée au centre, il résidait dans les quartiers. Le 16 juillet 2013, vers 22 h 30, le soldat Prud’homme, candidat au même cours que le soldat Dahr, s’est rendu aux toilettes de la caserne pour se faire la barbe. Le contrevenant est entré dans les toilettes en ayant l’air de se préparer à se doucher. Le soldat Prud’homme lui a dit qu’il n’avait pas le temps pour une douche puisque chaque candidat était tenu de remettre lui-même ses leviers de fusils cinq minutes plus tard. Le contrevenant a répliqué en élevant la voix qu’il voulait se doucher sur-le-champ. Amusé par le ton de voix du soldat Dahr, le soldat Prud’homme lui a demandé, à la blague : « À qui ai-je l’honneur, une fillette de 12 ans? » Le soldat Dahr est devenu agressif : il s’est approché du soldat Prud’homme, s’est emparé de son rasoir qui reposait sur le comptoir, en a retiré le couvercle protecteur et a fait tourner le rasoir près du cou de son interlocuteur. Ce dernier, se sentant menacé par ce geste, s’est tendu et a adopté une position défensive. Le contrevenant a alors éloigné le rasoir du cou du soldat Prud’homme et l’a posé sur son propre avant‑bras. Craignant que le soldat Dahr ne se taillade la peau avec le rasoir, le soldat Prud’homme lui a alors prestement enlevé le rasoir puis a tenté d’apaiser la situation en plaisantant. Pendant tout l’épisode en question, le soldat Prud’homme a senti que sa sécurité était menacée par le soldat Dahr. L’incident a été signalé au personnel du cours qui a communiqué avec la Police militaire de Wainwright. Le contrevenant a été arrêté, transporté au détachement et gardé sous garde jusqu’au lendemain, lorsqu’un officier réviseur de la détention a ordonné sa mise en liberté sous conditions. Par la suite, le soldat Dahr a été renvoyé à l’unité sans qu’il lui soit permis de poursuivre sa formation et de terminer son cours. N’ayant pas terminé le cours de qualification militaire de base de l’infanterie, le soldat Dahr n’a pu progresser dans l’armée. À la conclusion de son procès en cour martiale, le Loyal Edmonton Regiment a l’intention de soumettre le nom du soldat Dahr pour inscription au cours qui sera donné cet été au Centre d’instruction de la 3e Division du Canada, au Camp Wainwright.

 

[3]               Ce matin, le procureur de la poursuite et la défense ont présenté une recommandation conjointe concernant la sentence à infliger. Ils recommandent ainsi à la Cour d’imposer une amende de 350 $. Selon eux, une telle sentence servirait les objectifs de dissuasion et de dissuasion générale; j’ajouterais qu’elle encouragerait également le contrevenant à reconnaître sa responsabilité. Je suis d’accord avec la recommandation présentée conjointement par le procureur de la poursuite et la défense. La sentence se situe dans la fourchette des sentences possibles pour une première infraction et vers l’extrémité inférieure de cette fourchette en ce qui concerne cette infraction en particulier. La sentence qu’ils proposent ne pose pas d’inquiétude en ce qui concerne la bonne administration de la justice et elle n’est pas contraire à l’intérêt public.

 

[4]               Je conviens avec la poursuite que les facteurs suivants constituent des circonstances aggravantes aux fins de la détermination de la sentence :

 

a)                  Le geste visant le soldat Prud’homme, un collègue, avait un caractère délibéré et lui a fait craindre pour sa sécurité, ce qui était tout à fait injustifié et n’a pas sa place dans l’armée;

 

b)                  Comme l’a mentionné l’avocat de la poursuite, l’infraction a eu lieu dans le cadre d’une formation, et il est un peu difficile de comprendre qu’un incident de cette nature puisse se produire à peine quatre mois après l’enrôlement.

 

[5]               Cela dit, il existe aussi d’importantes circonstances atténuantes :

 

a)                  Le plaidoyer de culpabilité a été inscrit à la première occasion, ce qui est le signe, selon moi, que le contrevenant éprouve des remords et qu’il reconnaît sa responsabilité ce matin;

 

b)                  Le fait que le contrevenant a passé une journée en détention préventive est un facteur très important en l’espèce, et c’est d’ailleurs l’une des raisons pour lesquelles j’ai demandé à la poursuite et à la défense de revoir le montant de l’amende, sachant que l’emprisonnement ne ferait pas partie de la sentence ou des peines envisagées aujourd’hui. Pour cette raison, j’estime qu’il est très important de tenir compte de la journée passée en détention préventive de manière appropriée en déterminant la sentence ce matin;

 

c)                  Dans sa vie privée, le soldat Dahr semble être un travailleur très compétent et fiable. Aussi, l’unité croit en ses capacités, car depuis la perpétration de l’infraction, il a continué d’être au service de cette unité et n’a été impliqué dans aucun autre incident regrettable;

 

d)                 Il n’a pas d’antécédents criminels ou disciplinaires;

 

e)                  Sa progression au sein des Forces a été ralentie de façon importante en raison de l’incident;

 

f)                   Pour ce qui est de son jeune âge, la Cour reconnaît qu’il est maintenant âgé de 21 ans, mais il en avait 20 au moment des faits;

 

g)                  Enfin, de l’avis de la Cour, le fait que cet incident se soit produit quatre mois après son enrôlement est un facteur atténuant, et j’émets ce souhait qu’avec le temps, il saura se montrer plus responsable.

 

[6]               Dans des cas comme celui dont la Cour est saisie ici, le montant de l’amende n’est pas le seul aspect qui importe pour provoquer l’effet désiré en matière de dissuasion générale ou de dénonciation. Le fait de devoir subir un procès en cour martiale pour ce genre de comportement est en soi très sérieux : cela représente un facteur dissuasif d’une très grande importance en plus de revêtir un poids considérable lorsque la Cour accepte ou rejette les recommandations conjointes faites au sujet de la sentence. En somme, toutes les raisons font que je n’ai aucun mal à accepter la sentence que vous recommandez ce matin.

 

POUR CES MOTIFS, LA COUR :

 

[7]               vous DÉCLARE coupable à l’égard du premier chef d’accusation, relativement à l’infraction prévue à l’alinéa 86b) de la Loi sur la défense nationale, pour avoir adressé des gestes provocateurs.

 

ET

 

[8]               vous CONDAMNE à une amende au montant de 350 $.

 

[9]               La Cour s’est demandé si elle devait rendre une ordonnance d’interdiction de possession d’armes en vertu de l’article 147.1 de la Loi sur la défense nationale; après avoir examiné les observations des avocats, j’ai décidé de ne pas rendre d’ordonnance en ce sens.


 

Avocats :

 

Major R.J. Rooney et Lieutenant de vaisseau H.C. Monk, Service canadien des poursuites militaires, Procureurs de sa Majesté la Reine

 

Capitaine de corvette D. Liang, Direction du Service d’avocats de la défense, Avocat du soldat M.A. Dahr

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