Cour martiale

Informations sur la décision

Résumé :

Date de l'ouverture du procès : 11 août 2011

Endroit : BFC Petawawa, Édifice L-106, Petawawa (ON)

Chefs d'accusation
•Chef d'accusation 1 : Art. 85 LDN, a insulté verbalement un supérieur.
•Chef d'accusation 2 : Art. 90 LDN, s'est absenté sans permission.

Résultats
•VERDICTS : Chefs d'accusation 1, 2 : Coupable.
•SENTENCE : Emprisonnement pour une période de 14 jours et une amende au montant de 1500$. L'exécution de la peine d'emprisonnement a été suspendue.

Contenu de la décision

 

COUR MARTIALE

 

Référence :  R c Miller, 2011 CM 2016

 

Date :  20110811

Dossier :  201137

 

Cour martiale permanente

 

Base des Forces canadiennes Petawawa

Petawawa (Ontario), Canada

Entre : 

 

Sa Majesté la Reine

 

- et -

 

Soldat C.M.J. Miller, contrevenant

 

 

 

En présence du commandant P.J. Lamont, J.M.

 


 

TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE

 

MOTIFS DE LA SENTENCE

 

(Prononcés de vive voix)

 

[1]               Soldat Miller, après avoir accepté et consigné vos plaidoyers de culpabilité à l’égard des deux accusations figurant dans l’acte d’accusation, soit une accusation d’avoir injurié un supérieur et une accusation de vous être absenté sans permission, la cour vous déclare maintenant coupable de ces deux accusations.

 

[2]        Je dois donc maintenant fixer et prononcer votre sentence. Pour ce faire, j’ai examiné les principes de détermination de la peine qu’appliquent les cours ordinaires du Canada ayant compétence en matière criminelle et les cours martiales. J’ai également examiné les faits de la présente affaire, tels qu’ils sont décrits dans l’exposé des circonstances, à la pièce 7, ainsi que les autres documents soumis au cours de la présente instance et les observations des avocats de la poursuite et de la défense.

 

[3]        Les principes de la détermination de la peine guident la cour dans l’exercice de son pouvoir discrétionnaire afin que celle-ci inflige une peine appropriée et adaptée à chaque cas. En règle générale, la peine doit être proportionnée à la gravité de l’infraction ainsi qu’au degré de responsabilité et au caractère du contrevenant. La cour est guidée par les peines qu’ont infligées d’autres tribunaux dans des affaires similaires, non pas parce qu’elle respecte aveuglément les précédents, mais parce que notre sens commun de la justice veut que les affaires similaires soient jugées de manière similaire. Néanmoins, la cour tient compte des nombreux facteurs qui distinguent chaque affaire dont elle est saisie, autant des facteurs aggravants qui peuvent commander une peine plus lourde que des circonstances atténuantes qui peuvent appeler une réduction de la peine.

 

[4]        Les buts et objectifs de la détermination de la peine ont été exprimés de diverses manières dans de nombreuses décisions antérieures. En général, ils ont trait à la protection de la société, laquelle comprend bien sûr les Forces canadiennes, par la promotion du développement et du maintien d’une collectivité juste, paisible, sûre et respectueuse de la loi. Chose importante, dans le contexte des Forces canadiennes, ces objectifs comprennent le maintien de la discipline, cette habitude d’obéissance indispensable à l’efficacité d’une force armée.

 

[5]        Les buts et objectifs de la détermination de la peine comprennent aussi la dissuasion individuelle – la peine doit décourager le contrevenant de récidiver – et la dissuasion générale – elle doit décourager les autres de suivre son exemple. La peine vise aussi à assurer la réinsertion sociale du contrevenant, à promouvoir son sens des responsabilités et à dénoncer les comportements illégaux. Un ou plusieurs de ces buts et objectifs prédomineront inévitablement dans la détermination d’une peine juste et appropriée dans un cas donné, mais chacun de ces buts et objectifs mérite l’attention de la cour chargée de fixer la peine; pour être juste et appropriée, celle-ci doit témoigner d’un dosage judicieux de ces buts et objectifs, adapté aux circonstances particulières de l’espèce.

 

[6]        Comme je vous l’ai dit lorsque vous avez inscrit vos plaidoyers de culpabilité, l’article 139 de la Loi sur la défense nationale prévoit les différentes peines que peuvent infliger les cours martiales. Ces peines sont limitées par la disposition législative qui crée l’infraction et prescrit la peine maximale. Une seule sentence peut être prononcée à l’égard du contrevenant, qu’il soit déclaré coupable d’une seule infraction ou de plusieurs, mais la sentence peut prévoir plusieurs peines. Selon un principe important, il y a lieu d’infliger la peine la moins sévère qui permettra de maintenir la discipline.

 

[7]        Pour déterminer la peine en l’espèce, j’ai tenu compte des conséquences directes et indirectes qu’auront pour le contrevenant les déclarations de culpabilité et la peine que je m’apprête à prononcer.

 

[8]        Les faits concernant les infractions sont simples et sont décrits à la pièce 3, l’exposé des circonstances. Le 11 novembre 2010, le contrevenant était absent de son lieu de travail. Des recherches ont été faites pour le trouver et, au cours d’une conversation téléphonique avec le sergent Simms, le contrevenant a fait la déclaration suivante qui est citée dans la description de la première accusation : [traduction] « Vous devenez un problème ».

 

[9]        Eu égard à l’ensemble des circonstances, je n’hésite nullement à conclure que ce commentaire constitue un comportement insultant au sens de l’article 85 de la Loi sur la défense nationale.

 

[10]      Plutôt que de retourner à son lieu de travail, comme il devait le faire, le contrevenant est demeuré absent jusqu’au 2 décembre 2010, date à laquelle la police militaire l’a trouvé à Ottawa et l’a arrêté conformément à un mandat délivré plus tôt par l’unité dont il fait partie. L’arrestation a mis fin à ce cas précis d’absence sans permission.

 

[11]      Avant cette absence du 11 novembre 2010, le soldat Miller s’était présenté aux fins de l’examen sommaire d’une accusation d’absence sans permission et s’était vu infliger une peine de 21 jours de détention. Cette décision était en cours de révision lorsque le soldat Miller a négligé de se présenter au lieu de travail le 11 novembre  et, par suite de la révision, une peine de 20 jours de détention a été prononcée le 3 décembre 2010. En conséquence, la peine relative à la première absence sans permission a été purgée après les infractions visées par les accusations dont la cour est saisie en l’espèce.

 

[12]      Eu égard aux faits susmentionnés, les avocats m’ont recommandé ensemble d’infliger une peine d’emprisonnement de 14 jours et une amende de 1 500 $. Comme les avocats l’ont souligné, il appartient à la cour de déterminer la peine à prononcer; cependant, lorsque les deux parties recommandent ensemble une peine, comme c’est le cas en l’espèce, cette recommandation doit peser lourd dans la décision de la cour. Les cours d’appel de l’ensemble du Canada, y compris la Cour d’appel de la cour martiale dans l’arrêt Soldat Chadwick Taylor, 2008 CMAC 1, ont décidé que le tribunal devrait retenir les conclusions communes présentées par les avocats des parties au sujet de la peine, à moins que l’adoption de la peine ainsi recommandée ne soit susceptible de jeter le discrédit sur l’administration de la justice ou ne soit d’une autre manière contraire à l’intérêt public.

 

[13]      Dans la présente affaire, j’ai examiné les circonstances aggravantes et atténuantes dont les deux avocats ont parlé au cours de leurs plaidoiries. L’absence en question était une absence prolongée sans permission. Elle n’a pris fin qu’avec l’intervention des autorités militaires, bien qu’il semble que des mesures aient été prises pour que le contrevenant se rende de lui-même peu avant ou immédiatement avant son arrestation. J’ai également à l’esprit la différence de grade entre le contrevenant et le sergent Simms, qui a été injurié.

 

[14]      En ce qui a trait aux circonstances atténuantes, le contrevenant a évidemment plaidé coupable à la première occasion aux deux accusations figurant sur l’acte d’accusation. Dans toutes les situations dont je suis saisi, je considère le plaidoyer de culpabilité comme une indication sincère du remords que le contrevenant éprouve à l’égard de la conduite qui est à l’origine de sa présence devant la cour. Le contrevenant est un jeune homme de 26 ans qui n’a aucune personne à sa charge et qui a été soldat d’infanterie, depuis qu’il a été enrôlé dans les Forces canadiennes le 1er septembre 2006,.

 

[15]      J’ai également à l’esprit le fait que le contrevenant est atteint d’une grave maladie mentale dont il souffrait apparemment lorsque les infractions ont été commises. Très peu de renseignements ont été fournis au sujet de la nature et des symptômes de la maladie, du pronostic de guérison et, surtout, de la relation de cause à effet pouvant exister entre les symptômes de la maladie et le comportement qui est à l’origine des infractions faisant l’objet de la présente affaire. Néanmoins, j’accepte l’avis exprimé par le psychiatre dans la lettre dont j’ai été saisi, soit la pièce 8, selon lequel le fait d’obliger le contrevenant à purger une peine d’emprisonnement risquerait d’aggraver son état de santé mentale actuel et de diminuer ses chances de guérison..

 

[16]      Les deux avocats me demandent, dans leurs observations conjointes sur la détermination de la peine, de veiller à ce qu’une partie de la peine soit une période d’emprisonnement, mais de suspendre l’exécution de cette partie de la peine. L’article 215 de la Loi sur la défense nationale est ainsi libellé :

 

Le tribunal militaire peut suspendre l’exécution de la peine d’emprisonnement ou de détention à laquelle il a condamné le contrevenant.

 

La Loi sur la défense nationale ne renferme guère de directives au sujet des circonstances dans lesquelles il convient de suspendre l’exécution de la peine d’emprisonnement.

 

[17]      Les deux avocats ont présenté des observations sur la question de savoir s’il conviendrait de suspendre l’exécution de la peine dans la présente affaire. À mon sens, bien que je respecte ceux qui ne partagent pas mon avis sur cette question, il n’est pas nécessaire que des circonstances exceptionnelles existent pour que la cour puisse exercer à bon escient le pouvoir de suspendre l’exécution de la partie privative de liberté d’une peine; la cour devrait plutôt examiner l’ensemble des circonstances et appliquer les principes que j’ai déjà mentionnés pour savoir s’il convient de suspendre l’exécution de la partie privative de liberté d’une peine dans un cas donné.

 

[18]      Dans la présente affaire, eu égard aux circonstances entourant la perpétration des infractions et à la situation du contrevenant, je ne puis dire que la proposition présentée conjointement par les deux avocats aurait pour effet de déconsidérer l’administration de la justice ou est d’une autre manière contraire à l’intérêt public; en conséquence, j’accepte la recommandation conjointe.

 

POUR LES MOTIFS EXPOSÉS CI-DESSUS, LA COUR :

 

[19]      VOUS CONDAMNE à une peine d’emprisonnement de 14 jours et à une amende de 1 500 $. L’amende doit être payée en cinq mensualités consécutives de 300 $ à compter du 15 septembre 2011. Si vous êtes libéré des Forces canadiennes pour quelque raison que ce soit avant le paiement intégral de votre amende, le solde de celle‑ci devra être payé la veille de votre libération.

 

[20]      SUSPEND l’exécution de la peine d’emprisonnement conformément à l’article 215 de la Loi sur la défense nationale.

 


 

Avocats :

 

Le capitaine R.D. Kerr, Service canadien des poursuites militaires

Avocat de Sa Majesté la Reine

 

Le major S.L. Collins, Direction du service d’avocats de la défense

Avocat du soldat C.M.J. Miller

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.