Cour martiale

Informations sur la décision

Résumé :

Date de l'ouverture du procès : 4 septembre 2009

Endroit : Centre d'instruction du Secteur de l'Atlantique de la Force terrestre, Détachement Aldershot, Édifice 216, Kentville (NÉ)

Chefs d'accusation
•Chef d'accusation 1 (subsidiaire au chef d'accusation 2) : Art. 88 LDN, a déserté.
•Chef d'accusation 2 (subsidiaire au chef d'accusation 1) : Art. 90 LDN, s'est absenté sans permission.

Résultats
•VERDICTS : Chef d'accusation 1 : Une suspension d'instance. Chef d'accusation 2 : Coupable.
•SENTENCE : Une rétrogradation au grade de caporal.

Contenu de la décision

Référence : R. c. Sergent T.M. McLaren, 2009 CM 3015

 

Dossier : 200923

 

 

 

COUR MARTIALE PERMANENTE

CANADA

CAMP ALDERSHOT

 

DATE : Le 4 septembre 2009

 

SOUS LA PRÉSIDENCE DU LIEUTENANT-COLONEL L-V. D’AUTEUIL, J.M.

 

SA MAJESTÉ LA REINE

c.

SERGENT T.M. MCLAREN

(Contrevenant)

 

SENTENCE

(Prononcée de vive voix)

 

 

TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE

 

[1]        Sergent McLaren, la cour a accepté et inscrit votre plaidoyer de culpabilité à l’égard de la deuxième accusation figurant sur l’acte d’accusation et vous déclare aujourd’hui coupable à l’égard de cette accusation.

 

[2]        Par conséquent, compte tenu que le procureur de la poursuite a fait savoir à la cour qu’il approuve l’acceptation d’un plaidoyer de culpabilité à l’égard de cette accusation subsidiaire, laquelle est moins grave que la première accusation, et que vous avez plaidé non coupable à l’accusation subsidiaire la plus grave, la cour ordonne une suspension d’instance relativement à la première accusation.

 

[3]        Il est de mon devoir à titre de juge militaire présidant la présente cour martiale permanente de fixer la sentence.  Le système de justice militaire constitue l’ultime recours pour faire respecter la discipline, qui est une dimension essentielle de l’activité militaire dans les Forces canadiennes. Le but de ce système est de prévenir l’inconduite ou, de façon plus positive, de favoriser la bonne conduite. 

 


[4]        C’est grâce à la discipline que les forces armées s’assurent que leurs membres rempliront leur mission avec succès, de manière fiable et confiante.  Le système veille aussi au maintien de l’ordre public et fait en sorte que les personnes assujetties au Code de discipline militaire soient punies de la même façon que toute autre personne vivant au Canada.

 

[5]        Il est depuis longtemps reconnu que le but d’un système de justice ou de tribunaux militaires distincts est de permettre aux Forces armées de régler les affaires qui portent sur le respect du Code de discipline militaire et d’assurer le maintien du rendement et du moral au sein des Forces canadiennes.

 

[6]        Cela dit, la peine infligée par tout tribunal, qu’il soit militaire ou civil, doit être la peine la moins sévère selon les circonstances particulières de l’affaire.  Ce principe est directement lié au devoir qui incombe à la cour en vertu de l’alinéa 112.48(2)b) des ORFC de « prononce[r] une sentence proportionnée à la gravité de l’infraction et aux antécédents du contrevenant ».

 

[7]        Dans la présente instance, le poursuivant et lavocat du contrevenant ont présenté une recommandation conjointe quant à la sentence. Ils ont recommandé que la cour vous rétrograde au rang de caporal.  Bien que la cour ne soit pas liée par cette recommandation conjointe, le principe suivant, que la Cour d’appel de la cour martiale du Canada a énoncé au paragraphe 21 de l’arrêt Soldat Taylor c. R., 2008 CACM 1, en citant le paragraphe 17 de la décision rendue dans R. c. Sinclair, est généralement reconnu :

 

[traduction]

Le juge chargé de la détermination de la peine ne doit aller à l'encontre de la recommandation conjointe que s'il existe des motifs impérieux de le faire, notamment lorsque la peine est inappropriée, déraisonnable, de nature à déconsidérer l'administration de la justice ou contraire à l'intérêt public.

 

[8]        La cour a examiné la recommandation conjointe à la lumière des faits pertinents présentés dans le sommaire des circonstances et dans lexposé conjoint des faits, et de leur importance. La cour sest aussi penchée sur cette recommandation en ayant à lesprit les principes applicables en matière de détermination de la peine, y compris ceux énoncés aux articles 718, 718.1 et 718.2 du Code criminel, dans la mesure où ces principes ne sont pas incompatibles avec le régime de détermination de la peine prévu à la Loi sur la défense nationale. Ces principes sont les suivants :

 

Premièrement, la protection du public, et le public sentend des Forces canadiennes;

 

Deuxièmement, limposition dune peine au contrevenant;

 


Troisièmement, leffet dissuasif de la peine, non seulement pour le contrevenant, mais pour quiconque pourrait être tenté de commettre de telles infractions;

 

Quatrièmement, lamendement et la réinsertion du contrevenant;

 

Cinquièmement, la proportionnalité de la peine à la gravité de linfraction et au degré de responsabilité du contrevenant;

 

Sixièmement, linfliction de peines semblables à celles infligées à des contrevenants pour des infractions semblables commises dans des circonstances semblables.

 

La cour a aussi tenu compte des observations présentées par les avocats, des aveux et de la preuve documentaire. 

 

[9]        Je dois dire que je partage lavis du poursuivant, selon lequel la protection du public commande une sentence qui met laccent sur la dissuasion générale. Il est important de préciser que leffet dissuasif général vise à faire en sorte que la peine infligée dissuade non seulement le contrevenant de récidiver, mais aussi toute autre personne qui, se trouvant dans une situation analogue, serait tentée de se livrer aux mêmes actes illicites.

 

[10]      La cour, dans la présente instance, doit se prononcer sur une infraction purement militaire que vous avez commise en vous absentant sans autorisation de votre unité, laquelle touche directement la discipline militaire. Ce type dinfraction concerne lapplication des principes de responsabilité et dintégrité. Dans le cas dun soldat, ce que vous étiez au moment de linfraction, être digne de foi et fiable en tout temps, est plus quessentiel pour toute mission au sein des forces armées, peu importe les fonctions ou le rôle dont vous devez vous acquitter. La cour doit néanmoins infliger la peine la moins sévère quelle estime nécessaire dans les circonstances. 

 

[11]      Pour arrêter la sentence quelle estime juste et appropriée, la cour a tenu compte des circonstances aggravantes et des circonstances atténuantes suivantes. La cour considère comme facteur aggravant la gravité objective de linfraction. Vous avez été accusé d'une infraction prévue à l'article 90 de la Loi sur la défense nationale pour vous être absenté sans autorisation. Cette infraction est passible d'un emprisonnement maximal de moins de deux ans.

 

[12]      Relativement à la gravité subjective de linfraction, la cour considère trois éléments comme facteurs aggravants.

 


Premièrement votre rang et votre expérience. Au moment de linfraction, vous comptiez 34 années dexpérience dans les Forces canadiennes, durant lesquelles vous avez servi à divers endroits et dans différentes conditions. En outre, vous avez détenu le rang de sergent pendant environ deux ans et occupé divers postes de commande durant votre carrière. Vous saviez très bien que vous ne pouviez pas vous absenter quand vous le vouliez, mais vous lavez fait en dépit de votre connaissance et de votre expérience relativement à cette question précise.

 

Deuxièmement, vous avez décidé de vous servir vous-même avant tout, sans porter attention aux conséquences de votre décision. Vous avez laissé votre unité composer avec votre absence, sans un regret à ce moment-là, en ne vous souciant nullement de la charge de travail additionnelle que vous imposiez à vos collègues et à votre unité.

 

Enfin, la durée de votre absence révèle clairement une attitude insouciante et un manque de considération de votre part envers les gens et lorganisation, les Forces canadiennes, que vous avez laissés derrière vous. Vous aviez peut-être un grief à soulever ou de bonnes raisons de vous plaindre, mais quitter votre lieu de travail, sans aviser qui que ce soit, nest pas une façon dagir convenable, que vous fassiez partie de la Réserve ou de la Force régulière.

 

[13]      La cour considère que les facteurs suivants sont atténuants :

 

Vu les faits présentés en lespèce, la cour estime que votre plaidoyer de culpabilité traduit un véritable remords et votre désir sincère de demeurer un atout pour la collectivité canadienne. Le fait que vous ayez indiqué tôt, dans le cadre du processus disciplinaire, votre intention dagir ainsi reflétait également une telle intention. 

 

Le fait que ce soit un incident isolé et que vos longs états de service ne révèlent aucun incident disciplinaire. 

 

Le fait que nayez pas de fiche de conduite ni de dossier criminel relativement à des infractions similaires et le fait que vous ayez à répondre de vos actes devant la présente cour martiale, ce qui a déjà un certain effet dissuasif sur vous et sur autrui. La cour est convaincue que vous naurez pas à comparaître devant un tribunal pour une infraction de nature semblable ou pour quelque autre infraction que ce soit à lavenir.

 


[14]      Par conséquent, la cour fera droit à la recommandation conjointe des avocats de vous rétrograder au rang de caporal, étant donné que cette sentence nest pas contraire à lintérêt public et quelle ne risque pas de déconsidérer ladministration de la justice.

 

[15]      Sergent McLaren, veuillez vous lever.  La cour vous condamne à être rétrogradé au rang de caporal.  Veuillez vous asseoir.

 

[16]      Linstance devant la présente cour martiale permanente à l’égard du caporal McLaren est terminée.

 

 

 

LIEUTENANT-COLONEL L-V.  D’AUTEUIL, J.M.

 

Avocats :

 

Major J.J. Samson, Service canadien des poursuites militaires

Procureur de Sa Majesté la Reine

 

Lieutenant de vaisseau P.D. Desbiens, Direction du service davocats de la défense

Avocat du sergent T.M. McLaren

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.