Cour martiale

Informations sur la décision

Résumé :

Date de l'ouverture du procès : 10 janvier 2012

Endroit : BFC Gagetown, Édifice F-1, Oromocto, NB

Chefs d'accusation
•Chef d’accusation (subsidiaire au chef d’accusation 2) : Art. 129(2)b) LDN, comportement préjudiciable au bon ordre et à la discipline.
•Chef d’accusation (subsidiaire au chef d’accusation 1) : Art. 129(2)c) LDN, comportement préjudiciable au bon ordre et à la discipline.

Résultats
•VERDICTS : Chef d’accusation 1 : Non coupable. Chef d’accusation 2 : Coupable.
•SENTENCE : Une amende au montant de 200$.

Contenu de la décision

COUR MARTIALE

 

Référence :  R c Hunter, 2012 CM 4003

 

Date :  20120131

Dossier :  201130

 

Cour martiale permanente

 

Base des Forces canadiennes Gagetown

Gagetown (Nouveau‑Brunswick), Canada

 

Entre : 

 

Sa Majesté la Reine

 

- et -

 

Caporal D.D. Hunter, contrevenant

 

 

En présence du Lieutenant‑colonel  J-G Perron, J.M.

 


[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

MOTIFS DE LA SENTENCE

 

(Prononcés de vive voix)

 

[1]               Caporal Hunter, au terme d’un procès complet, la cour vous a déclaré non coupable du premier chef d’accusation et coupable du deuxième chef d’accusation. La cour vous a déclaré coupable de l’infraction de conduite préjudiciable au bon ordre et à la discipline. La cour doit maintenant infliger une peine juste et appropriée en l’espèce.

 

[2]               Le futur beau‑père du Caporal Hunter fournissait des services de reprise de véhicules. Le Caporal Hunter s’est porté volontaire pour vérifier les adresses associées à quatre numéros de plaque d’immatriculation du Nouveau‑Brunswick. Le Caporal Hunter a mené des recherches dans la base de données pour les véhicules automobiles qui se trouvait dans le poste de garde de la BFC Gagetown afin d’aider son futur beau‑père de trouver les véhicules en question. Cette vérification n’avait aucun rapport avec ses fonctions de membre de la police militaire. Le Caporal Hunter a abusé de sa position privilégiée d’agent de la paix pour accéder à une base de données du gouvernement au profit d’un particulier.

 

PRINCIPES GÉNÉRAUX DE DÉTERMINATION DE LA PEINE

 

[3]               Comme l’a souligné la Cour d’appel de la cour martiale (CACM), la détermination de la peine est un processus fondamentalement subjectif et individualisé au cours duquel le juge du procès a l’avantage d’avoir vu et entendu tous les témoins. C’est sans doute une des tâches les plus difficiles que le juge du procès doit remplir (voir R c Tupper 2009 CMAC 5, au par. 13).

 

[4]               De plus, la Cour d’appel de la cour martiale (CACM) a clairement affirmé dans Tupper (voir paragraphe 30) que les objectifs fondamentaux de la détermination de la peine qui figurent dans le Code criminel du Canada[1] s’appliquent dans le contexte du système de justice militaire, et le juge militaire doit tenir compte de ces objectifs lorsqu’il détermine la peine. L’article 718 du Code criminel prévoit que le prononcé des peines a pour objectif essentiel de contribuer « au respect de la loi et au maintien d’une société juste, paisible et sûre » par l’infliction de sanctions justes visant un ou plusieurs des objectifs suivants :

 

a)            dénoncer le comportement illégal;

 

b)                  dissuader les délinquants, et quiconque, de commettre des infractions;

 

c)                  isoler, au besoin, les délinquants du reste de la société;

 

d)                 favoriser la réinsertion sociale des délinquants;

 

e)                  assurer la réparation des torts causés aux victimes ou à la collectivité;

 

f)                   susciter la conscience de leurs responsabilités chez les délinquants, notamment par la reconnaissance du tort qu’ils ont causé aux victimes et à la collectivité.

 

[5]               Les dispositions relatives à la détermination de la peine qui sont énoncées aux articles 718 à 718.2 du Code criminel prévoient un processus individualisé au cours duquel la cour doit prendre en compte non seulement les circonstances de l’infraction, mais aussi la situation particulière du délinquant (voir R c Angelillo, 2006 CSC 55, au par. 22). La peine doit également être semblable aux autres peines imposées dans des circonstances similaires (voir R v L.M., 2008 CSC 31, au par. 17). Le principe de la proportionnalité constitue un élément central de la détermination de la peine (voir R v Nasogaluak, 2010 CSC 6, au par. 41). La Cour suprême du Canada nous enseigne, au paragraphe 42 de l’arrêt Nasogaluak, que la proportionnalité requiert que la sanction n’excède pas ce qui est juste et approprié compte tenu de la culpabilité morale du délinquant et de la gravité de l'infraction. Mais la détermination de la peine représente également une « forme de censure judiciaire et sociale ». Une peine proportionnée peut exprimer, dans une certaine mesure, les valeurs et les préoccupations que partage la société.

 

[6]               Le juge doit soupeser les objectifs de détermination de la peine de façon à tenir compte des circonstances particulières de l’affaire. Il appartient au juge qui prononce la sanction de déterminer s’il faut accorder plus de poids à un ou plusieurs objectifs. La peine sera par la suite ajustée dans la fourchette des peines appropriées pour des infractions similaires the case (voir Nasogaluak, par. 43 et 44).

 

[7]               La Cour d’appel de la cour martiale a également indiqué que le contexte précis du système de justice militaire peut, dans des circonstances appropriées, justifier et, à l’occasion, exiger une peine qui favorisera l’atteinte des objectifs militaires (voir Tupper, au par. 34). Mais il faut se rappeler que l’objectif ultime de la détermination de la peine dans le contexte militaire est le rétablissement de la discipline chez le contrevenant et dans la société militaire. La cour doit infliger la peine la moins sévère nécessaire pour assurer le maintien de la discipline. Une seule sentence est prononcée à l’endroit d’un contrevenant, mais la sentence peut prévoir plusieurs peines.

 

[8]               La poursuite indique que les principes de détermination de la peine suivants s’appliquent en l’espèce : la dissuasion générale, la dissuasion spécifique et la réprobation. La poursuite a cité deux décisions pour faire valoir que la peine minimale à imposer en l’espèce est une réprimande et une amende de 1 500 $. L’avocat de la défense fait valoir qu’une amende de 200 $ représente une peine appropriée en l’espèce.

 

[9]               J’ai tenu compte des facteurs aggravants qui suivent :

 

a)                  L’article 139 de la Loi sur la défense nationale prévoit ce qui suit :

 

(1)                 Les infractions d’ordre militaire sont passibles des peines suivantes, énumérées dans l’ordre décroissant de gravité :

 

a)                   emprisonnement à perpétuité;

 

b)                   emprisonnement de deux ans ou plus;

 

c)                   destitution ignominieuse du service de Sa Majesté;

 

d)                   emprisonnement de moins de deux ans;

 

e)                   destitution du service de Sa Majesté;

 

f)                    détention;

 

g)                   rétrogradation;

 

h)                   perte de l’ancienneté;

 

i)                     blâme;

 

j)                    réprimande;

 

k)                   amende;

 

l)                     peines mineures.

 

La conduite préjudiciable au bon ordre et à la discipline visée à l’article 129 de la Loi sur la défense nationale constitue une infraction objectivement grave puisqu’elle est passible au maximum de destitution ignominieuse du service de Sa Majesté;

 

b)                  La base de données pour les véhicules automobiles a un caractère officiel et doit servir strictement aux fins du service et non à des fins personnelles. L’utilisation abusive constitue objectivement un facteur aggravant. On doit également examiner les motifs de son utilisation et les renseignements fournis à la personne non autorisée pour déterminer la gravité subjective de l’utilisation abusive.

 

[10]           Au cours du procès, le procureur de la poursuite n’a pas fait valoir que la preuve établit hors de tout doute raisonnable que le Caporal Hunter a été payé pour effectuer la recherche en cause. Il a même déclaré qu’il n’y avait pas de preuve concrète à cet égard et a affirmé que la question de la rémunération ne constituait pas un élément de l’infraction. Le procureur de la poursuite veut maintenant inclure cet élément comme facteur aggravant devant être pris en considération lors de la détermination de la peine. L’avocat de la défense a fait valoir qu’il n’accepte pas l’argument relatif à la rémunération.

 

[11]           S’il y a contestation concernant tout fait lié à la détermination de la peine, le procureur de la poursuite doit prouver hors de tout doute raisonnable tout fait aggravant (voir l’art. 112.53 des ORFC). Je conclus que le procureur de la poursuite n’a pas établi hors de tout doute raisonnable que le Caporal Hunter a été payé par son beau‑père. Par conséquent, la question de la rémunération ne constitue pas un élément à prendre en compte à l’étape de la détermination de la peine.

 

[12]           Votre futur beau‑père vous a fourni des renseignements qu’il détenait licitement et vous vous êtes servi du terminal de la base de données pour les véhicules automobiles pour confirmer ces renseignements. Comme je l’ai déjà indiqué dans mon verdict, vous n’avez pas obtenu des renseignements au profit d’une organisation criminelle ou terroriste. Il ne s’agit pas d’une affaire où un policier utiliserait systématiquement de manière abusive une base de données officielle pour en tirer un avantage personnel. Par conséquent, j’estime que l’utilisation non autorisée du terminal de la base de données pour les véhicules automobiles ne constitue pas une infraction subjectivement grave.

 

[13]           J’examinerai maintenant les facteurs atténuants en l’espèce :

 

a)                  vous n’avez pas de fiche de conduite, ce qui fait de vous un délinquant primaire;

 

b)                  vous avez collaboré avec les enquêteurs du SNEFC;

 

c)                  la preuve révèle que vous n’avez effectué une recherche non autorisée qu’une fois.

 

[14]           Vous avez exercé votre droit de plaider non coupable. Vous avez été déclaré coupable par la cour au terme d’un procès complet. L’exercice de votre droit ne peut être interprété négativement et ne peut être considéré comme un facteur aggravant. Selon la jurisprudence canadienne, le contrevenant qui avoue sa culpabilité rapidement et qui collabore avec la police démontre généralement qu’il regrette ses actes et qu’il assume la responsabilité de ses actes illégaux et du préjudice qu’il a causé. Par conséquent, une telle collaboration avec la police et un aveu de culpabilité rapide seront généralement considérés comme des facteurs atténuants. Bien que la doctrine puisse être mitigée à cet égard, cette approche n’est généralement pas perçue comme allant à l’encontre du droit au silence et du droit à ce que le ministère public prouve hors de tout doute raisonnable l’accusation portée contre l’accusé, mais est plutôt perçue comme un moyen pour les tribunaux d’infliger des peines plus légères. En effet, l’aveu de culpabilité signifie généralement que les témoins n’auront pas à témoigner, ce qui réduit grandement les coûts associés à la procédure judiciaire. De plus, l’aveu de culpabilité signifie généralement que l’accusé désire assumer la responsabilité de ses actes illégaux.

 

[15]           L’accusé qui plaide non coupable ne peut espérer recevoir le même traitement par les tribunaux. Cela ne veut pas dire que la peine sera plus sévère parce que l’accusé a été déclaré coupable après avoir plaidé non coupable, mais bien seulement que la circonstance atténuante que représente un plaidoyer de culpabilité ne pourra pas jouer favorablement sur la détermination de sa peine.

 

[16]           Vous étiez âgé de 26 ans à la date de perpétration des infractions. Vous avez joint les rangs des Forces canadiennes en août 2007. Vous avez obtenu le titre de policier militaire, votre NQ3, en septembre 2008. Vous avez été promu caporal (grade effectif) en juin 2010, bien que vous déteniez ce grade depuis septembre 2007. Vous étiez un policier militaire relativement inexpérimenté puisque vous n’aviez agi en qualité de patrouilleur qu’environ 17 mois avant de commettre l’infraction en cause. Par conséquent, je considérerais ce manque d’expérience comme un facteur atténuant.

 

[17]           J’ai examiné attentivement la pièce 19, soit votre rapport d’appréciation du rendement pour la période du 1er avril 2010 au 31 mars 2011. Votre rendement a été coté comme « qualifié » et votre potentiel comme « normal ». Il s’agit d’un bon rapport d’évaluation qui indique que vous avez gagné le respect de vos pairs et de vos supérieurs par vos efforts constants. Votre commandant, le Capitaine Neufeld, s’attend à ce que vous soyez promu au grade suivant [traduction] « plus rapidement que la normale ». La pièce 18, votre revue du développement du personnel pour la période du 1er avril 2010 au 15 août 2010 est également plutôt positive. Cela démontre donc que vous avez tenté de devenir un policier militaire compétent depuis la perpétration de l’infraction en cause et que vous avez bien accompli votre travail comme patrouilleur et vos tâches de policier.

 

[18]           La pièce M1-2 a été présentée dans le cadre de la requête pour fin de non‑recevoir et fait partie de la preuve soumise dans le présent procès. La pièce M1-2 est constituée des notes de l’entrevue téléphonique avec le Major Ethier qui a été menée par le Major Rawal, le procureur de la poursuite. Le Major Ethier est le commandant de la 3e unité de police militaire (PM). Je comprends de ces notes ce qui suit.

 

[19]           Seul le poste de garde de Gagetown aurait été au courant de cet incident ([traduction] « seule Gagetown aurait été touchée », selon les notes). Le Major Ethier a déclaré que le système de justice est censé être rapide. Un processus trop étiré pourrait avoir une incidence négative. Sauf dans le cas de cet incident, le Major Ethier a formulé des commentaires favorables au sujet du Caporal Hunter. Celui‑ci était un policier militaire efficace et un excellent soldat. Il serait dommage de le perdre. Le Major Ethier n’avait pas l’intention de lancer des procédures de libération et souhaiterait que le Caporal Hunter garde son insigne.

 

[20]           Le Major Ethier croyait que le Caporal Hunter s’est présenté devant sa chaîne de commandement à la suite des pressions exercées par ses camarades, qu’il a admis ses fautes et a appris sa leçon. Le Major Ethier pensait qu’il s’agissait d’un incident relativement mineur dans l’ordre général des choses, un petit problème qu’on pouvait facilement régler par rapport à d’autres infractions.

 

[21]           Le Caporal Hunter ne porte plus son insigne depuis environ un an et demi. Le processus administratif associé à l’écusson devrait débuter après le procès. Le Major Ethier ne savait pas si les autorités provinciales étaient au courant de la situation, mais il estimait qu’elles seraient contentes de constater que des mesures appropriées ont été prises, et qu’elles ne refuseraient pas l’accès à la base de données pour les véhicules automobiles.

 

[22]           Je partage les préoccupations du Major Ethier au sujet du retard à porter cette affaire devant la justice. La cour martiale ne dispose d’aucun renseignement au sujet du retard à tenir audience. Le Caporal Hunter a été interrogé en avril 2010 et a admis avoir utilisé le terminal de la base des données pour les véhicules automobiles afin d’aider son beau‑père (voir la pièce 12). Le Major Rawal a signé un acte d’accusation le 31 mai 2011 et les mises en accusation ont été prononcées le 9 juin 2011. L’ordre de convocation a été signé le 9 novembre 2011. Le procès a commencé le 10 janvier 2012.

 

[23]           L’avocat de la défense a formulé des commentaires sur l’effet de ce retard sur la discipline, la justice militaire, les Forces canadiennes et le contrevenant.  La Cour suprême du Canada a statué qu’une conduite répréhensible des représentants de l’État qui ne viole pas la Charte peut constituer un facteur atténuant pour l’établissement de la peine. Dans les cas où la conduite répréhensible de ces derniers se rapporte aux circonstances liées à la perpétration de l’infraction ou à la situation du délinquant, le juge qui prononce la peine peut tenir compte des faits pertinents lorsqu’il établit une sanction juste, sans devoir invoquer le par. 24(1) de la Charte (voir par. 3 de l’arrêt Nasogaluak).

 

[24]           Je ne conclus pas à l’existence d’une conduite répréhensible du procureur de la poursuite ou de toute autre personne responsable d’avoir porté la présente affaire devant la justice. Mais il s’agit d’un dossier relativement simple. Le Caporal Hunter a admis avoir utilisé l’ordinateur en avril 2010. Le Caporal Hunter s’est vu retirer les titres de créance de la police militaire depuis un an et demi. Il n’a plus la possibilité de suivre des cours et d’être évalué à titre de policier militaire. Une accusation portée aux termes du code de discipline militaire est traitée avec toute la célérité que les circonstances permettent (voir art. 162 de la Loi sur la défense nationale).

 

[25]           De longs délais nuisent autant aux fins disciplinaires qu’aux fins de la justice militaire. De plus, ils ont souvent une incidence négative sur le contrevenant. Bien que je ne dispose d’aucun élément de preuve qui expliquerait le retard des procédures, j’estime effectivement que ce retard a eu une incidence négative sur le Caporal Hunter. Par conséquent, je prendrais en considération ce délai comme un facteur atténuant important.

 

[26]           Le Caporal Hunter s’est vu imposer une sanction par le sergent‑major de son unité pour l’utilisation non autorisée de l’ordinateur de la base de données pour les véhicules automobiles. Il s’est vu accorder deux jours de tâches supplémentaires. Le premier jour, il a exécuté des travaux manuels consistant à déménager des classeurs et des meubles, et le deuxième jour, il a effectué un quart de patrouille de 12 heures. Ces tâches supplémentaires ont été effectuées pendant des journées de congé. Bien qu’il ne soit pas question d’une procédure et d’une punition pouvant appuyer une requête pour fin de non‑recevoir, la cour prendra en considération cette sanction pour l’établissement de la peine.

 

[27]           J’ai examiné les deux affaires présentées par le procureur de la poursuite. L’affaire concernant l’Adjudant (à la retraite) MacLellan est très peu utile puisque le procureur de la poursuite ne s’est rapporté qu’aux paragraphes 3 et 4 qui portent sur les principes généraux de l’imposition des peines et le rétablissement de la discipline dans la collectivité militaire.

 

[28]           Le procureur de la poursuite s’appuie principalement sur la décision Caporal‑chef Morrell rendue par la Cour martiale permanente en 2006 pour indiquer l’échelle des peines en l’espèce. Le Caporal‑chef Morrell était membre de la police militaire et faisait l’objet de deux accusations en vertu de l’article 125 de la Loi sur la défense nationale (fausse déclaration volontaire dans un document officiel établi de sa main) et d’une accusation en vertu de l’article 129 de la Loi sur la défense nationale. Au procès, la poursuite a retiré l’une des accusations portées en vertu de l’article 125 et le Caporal‑chef Morrell a plaidé coupable d’avoir fait par négligence une déclaration dans un document officiel établi de sa main ainsi que de l’accusation portée en vertu de l’article 129.

 

[29]           Voici les faits de cette affaire :  Le Caporal‑chef Morrell était en service dans sa voiture de patrouille lorsqu’il a été rejoint par une amie qui est montée avec lui dans la voiture. Contrairement à la politique de la police militaire, le Caporal‑chef Morrell s’est servi de l’ordinateur de bord pour vérifier le dossier de son amie au moyen du système informatique du Centre d’information de la police canadienne (CIPC) et lui a fait connaître les résultats de la recherche. Plus tard dans la soirée, un taxi s’est approché du véhicule du Caporal‑chef Morrell et le chauffeur lui a donné un sac de plastique qui aurait contenu de la marihuana. Le Caporal‑chef Morrell a consigné l’incident dans son carnet de notes de la police militaire, mais a omis d’inscrire les renseignements fournis par le chauffeur de taxi. Le Caporal‑chef Morrell a collaboré avec le SNE et a fait une déclaration après mise en garde admettant ses actes répréhensibles lorsque le SNE a communiqué avec lui pour la première fois.

 

[30]           L’accusation portée en vertu de l’article 125 dans l’affaire Morrell énonce ce qui suit :

 

[traduction] Le 21 août 2004, ou vers cette date, à la BFC Borden, ou à proximité de celle‑ci, l’accusé a fait une inscription incomplète dans le carnet de notes de la police militaire selon laquelle le chauffeur de taxi n’avait « aucune idée » de la provenance du sac qui aurait contenu de la marihuana, sachant que ledit chauffeur de taxi lui avait fourni des renseignements à cet égard.

 

L’accusation portée en vertu de l’article 129 énonce ce qui suit :

 

[traduction] Le 20 août 2004, ou vers cette date, à la BFC Borden, ou à proximité de celle‑ci, l’accusé a divulgué sans autorisation à une autre personne des renseignements provenant du système informatique du Centre d’information de la police canadienne.

 

[31]           Le Caporal‑chef Morrell était un réserviste âgé de 35 qui avait joint les rangs des Forces canadiennes en 1991 et qui bénéficiait de nombreuses années d’emploi comme réserviste de classe B. Il a entièrement collaboré avec les enquêteurs du SNEFC.

 

[32]           Le juge chargé de la détermination de la peine a accepté la proposition conjointe des avocats qui recommandaient une réprimande et une amende de 700 $. Dans la sentence, le juge a dit que l’affaire constituait [traduction] « un excellent exemple de manque d’intégrité et de jugement ». Il a également conclu que les faits de l’espèce étaient objectivement graves « dans le contexte du travail normal d’un policier militaire pour lequel il a été formé, et qu’il a enseigné à ses pairs, c’est‑à‑dire effectuer des patrouilles et des enquêtes ».

 

[33]           Je conclus que l’affaire Caporal‑chef Morrell portait sur une situation plus grave que celle de l’espèce. Le procureur de la poursuite a raison lorsqu’il affirme que le Caporal‑chef Morrell avait plus d’expérience que le Caporal Hunter. L’infraction visée à l’article 125 est plus grave que l’infraction visée à l’article 129 puisqu’elle fait l’objet d’une peine maximale (emprisonnement de trois ans) plus sévère dans l’échelle des peines que la peine maximale (destitution ignominieuse) dont fait l’objet l’infraction visée à l’article 129.

 

[34]           Le Caporal‑chef Morrell a fait une fausse inscription dans son carnet de notes de la police militaire. Tout policier connaît l’importance des inscriptions correctes dans un carnet. Le Caporal‑chef Morrell possédait également de nombreuses années d’expérience. Les faits de l’affaire Morrell sont très différents des faits de l’espèce, tout comme les infractions visées.

 

[35]           J’estime que la peine à infliger en l’espèce doit être axée principalement sur la dénonciation de la conduite du contrevenant et sur sa réadaptation.

 

[36]           Pour déterminer la peine appropriée, la cour a tenu compte des circonstances entourant la commission de ces infractions, des circonstances atténuantes et des circonstances aggravantes mises en avant par votre avocat et par le poursuivant, des observations tant de la poursuite que de l’avocat de la défense ainsi que des principes applicables en matière de détermination de la peine.

 

[37]           La court imposera une peine en tenant compte des nombreux facteurs atténuants que j’ai examinés. Je me fonde surtout sur le témoignage de votre chaîne de commandement, le Major Ethier, l’Adjudant‑maître Murphy, l’Adjudant Cochrane et l’Adjudant Canonaco, en tant que personnes qui vous connaissent mieux que moi. Il semble, selon les témoignages de vos superieurs et votre rapport d’appréciation du rendement, que vous avez appris de vos erreurs et que vous pouvez devenir un membre productif des Forces canadiennes.

 

POUR CES MOTIFS, LA COUR :

 

[38]           CONDAMNE le Caporal Hunter à une amende de 200 $.


 

Avocats :

 

Major P. Rawal et Lieutenant de vaisseau C.J. Colwell, Direction des poursuites militaires

Procureurs de Sa Majesté la Reine

 

M. D. Bright, Direction du service d’avocats de la défense

Avocat du Caporal D.D. Hunter

 



[1] L.C., 1985, ch. C‑46

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