Cour martiale
Informations sur la décision
CACM 501 - Appel rejeté
Date de l’ouverture du procès : 13 mars 2007.
Endroit : 6080 rue Young, 5e étage, salle d’audience, Halifax (NÉ).
Chefs d’accusation
•Chef d’accusation 1 : Art. 116 LDN, a volontairement endommagé un bien public.
•Chef d’accusation 2 : Art. 97 LDN, ivresse.
Résultats
•VERDICTS : Chefs d’accusation 1, 2 : Coupable.
•SENTENCE : Une réprimande et une amende au montant de 1500$.
Contenu de la décision
Référence: R. c. Matelot de 1re classe W.K. Freudenreich, 2007 CM 3010
Dossier: 200677
COUR MARTIALE PERMANENTE
CANADA
NOUVELLE-ÉCOSSE
BASE DES FORCES CANADIENNES D’HALIFAX
Date:16 mars 2007
SOUS LA PRÉSIDENCE DU LIEUTENANT-COLONEL L.-V. d'AUTEUIL, JM
SA MAJESTÉ LA REINE
c.
MATELOT DE 1RE CLASSE W.K. FREUDENREICH
(Contrevenant)
SENTENCE
(Rendue oralement)
TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE
[1] Dans les Forces canadiennes, le système de justice militaire représente le moyen ultime de faire respecter la discipline, élément essentiel de l’activité militaire. Le système vise à prévenir l’inconduite ou, de façon plus positive, à promouvoir la bonne conduite. C’est grâce à la discipline qu’une armée veille à ce que ses membres accomplissent leurs missions avec succès, de manière sûre et fiable.
[2] Comme le dit le Major Jean-Bruno Cloutier, avocat militaire, dans sa thèse sur l’application de l’article 129 de la Loi sur la défense nationale, selon le système de justice militaire « ... [e]n bout de ligne, pour promouvoir au maximum les chances de succès de la mission, la chaîne de commandement doit être en mesure d'administrer la discipline afin de contrôler les inconduites qui mettent en péril le bon ordre, l'efficacité militaire et finalement la raison d'être de l'organisation, la sécurité nationale.» Ce système veille également à maintenir l’ordre public et à punir ceux qui sont assujettis au Code de discipline militaire de la même manière que n’importe quelle autre personne vivant au Canada.
[3] Il est admis depuis longtemps qu’un système indépendant de justice et de tribunaux militaires permet aux Forces armées de traiter les affaires qui se rapportent au Code de discipline militaire et de maintenir l’efficacité et le moral des Forces canadiennes. Cela étant dit, la sanction infligée par un tribunal, qu’il soit militaire ou civil, devrait correspondre à l’intervention minimale nécessaire adaptée aux circonstances de l’espèce. Cette notion est également conforme au devoir de la Cour de
« prononce[r] une sentence proportionnée à la gravité de l’infraction et aux antécédents du contrevenant», comme le prévoit l’alinéa 112.48(2)b) des ORFC.
[4] Dans la présente affaire, le procureur et l’avocat de la défense ont soumis des observations conjointes quant à la peine. Ils ont suggéré que la Cour vous inflige une réprimande et une amende de 1500$. Même si la Cour n’est pas liée par ces observations conjointes, on ne peut généralement y déroger que dans les cas où il serait contraire à l’intérêt du public de les accepter et que cela aurait pour effet de déconsidérer l’administration de la justice.
[5] La Cour a examiné les observations conjointes à la lumière des faits pertinents énoncés au cours du procès et de l’exposé conjoint des faits et leur signification. Elle a également tenue compte des principes de détermination de la peine, notamment ceux énoncés aux articles 718, 718.1 et 718.2 du Code criminel, lorsque ceux-ci ne sont pas incompatibles avec le régime de détermination de la peine prévu à la Loi sur la défense nationale. Ces principes reposent sur les éléments suivants : premièrement, la protection du public, lequel comprend les Forces canadiennes; deuxièmement, la peine applicable au contrevenant; troisièmement, l’effet dissuasif de la peine, non seulement sur le contrevenant, mais aussi sur ceux qui seraient tentés de commettre les mêmes infractions; quatrièmement, la réadaptation et la réhabilitation du contrevenant. La Cour a aussi tenu compte des plaidoiries des avocats et de la documentation présentée sur le processus de détermination de la peine.
[6] Je dois dire que je suis d’accord avec le procureur lorsqu’il dit que la protection du public exige une peine qui met l’accent sur l’effet dissuasif individuel et général. Il est important de préciser que l’effet dissuasif général implique que la peine infligée doit dissuader non seulement le contrevenant de récidiver, mais aussi toute personne dans une situation semblable de commettre la même infraction, quelle que soit la raison. La Cour est saisie ici d’une infraction ayant trait à l’endommagement volontaire de biens publics et à un cas d’ivresse. La consommation d’alcool était en cause. Il s’agit de deux infractions relativement graves; cependant, la Cour imposera ce qu’elle considère être la peine minimale nécessaire compte tenu des circonstances.
[7] Pour en arriver à ce qu’elle croit être une peine juste et appropriée, la
Cour a également pris en compte les facteurs aggravants et atténuants suivants. La Cour considère comme aggravants les facteurs suivants :
a. premièrement, la gravité objective de l’infraction. Vous avez été accusé de deux infractions aux termes des articles 116 et 97 de la Loi sur la défense nationale. Ces infractions sont passibles d’une peine d’emprisonnement de moins de deux ans et dans le cas de l’ivresse, d’une peine d’emprisonnement ou de détention pour une période maximale de 90 jours ou d’une peine moindre;
b. deuxièmement, la gravité subjective de l’infraction; le fait que vous soyez un marin et un commis instruit et chevronné, inscrit à un cours de leadership et matelot de 1re classe depuis plus de 10 ans vous impose le devoir additionnel de prêcher par l’exemple, ce que vous avez omis de faire par votre conduite répréhensible;
c. troisièmement, le fait que vous avez sérieusement endommagé des biens publics à cause de votre état d’esprit et de vos émotions du moment, ce qui ne constitue pas une raison valable et rationnelle en soi.
[8] La Cour considère comme atténuants les facteurs suivants:
a. la Cour prend en compte le fait que votre comparution devant la présente Cour martiale a déjà eu un effet dissuasif, non seulement sur vous, mais aussi sur les autres. La Cour est convaincue que vous ne comparaîtrez plus en cour à l’avenir pour ce même genre d’infraction, ni aucune autre infraction. Elle est convaincue que vous êtes un bon marin et un bon commis et que vous aurez rapidement la possibilité de mettre à profit les leçons apprises lors de ce procès;
b. le fait que vous n’avez pas terminé votre QEL (Qualification élémentaire en leadership) et que vous avez été renvoyé dans votre unité à cause de cet incident;
c. vos états de service dans les Forces canadiennes, comme l’indiquent plusieurs lettres, pièces 19 à 21, et votre dernier RAP (Rapport d’appréciation du personnel), pièce 22;
d. mis à part cet incident, vous avez une très bonne feuille de route dans les Forces canadiennes. La Cour est d’avis que vous êtes un marin et un commis d’expérience qui s’est impliqué dans un incident qui ne lui correspond pas et pour qui les chances de récidive sont faibles, étant donné votre personnalité;
e. le fait que vous n’ayez pas de fiche de conduite ou de casier judiciaire en rapport avec des infractions similaires;
f. le dédommagement que vous avez proposé aujourd’hui, à savoir rembourser en totalité les Forces canadiennes;
g. l’absence de toute autre conséquence sur votre emploi et votre carrière dans les Forces canadiennes depuis l’incident;
h. le fait que la légère commotion que vous avez subie ait pu, dans une certaine mesure, altérer votre jugement. Comme l’a déclaré le DrKing, ce facteur, associé à la consommation d’alcool, ne vous a pas aidé, dans une certaine mesure (inconnue) à contrôler votre colère au moment de l’incident.
[9] Cela étant dit, étant donné les facteurs et les circonstances de la présente affaire, la Cour estime que les observations conjointes ne sont pas déraisonnables. Par conséquent, la Cour accepte les observations conjointes présentées par les avocats et vous condamne à une réprimande et à une amende de 1500$, étant donné qu’elle n’est pas contraire à l’intérêt public et n’aura pas pour effet de déconsidérer l’administration de la justice.
[10] Matelot de 1re classe Freudenreich, veuillez vous lever. La Cour vous condamne donc à une réprimande et à une amende de 1500$. L’amende doit être payée par versements mensuels consécutifs de 125$ à partir du 1er avril 2007 et pendant les onze mois suivants. Si, pour une raison ou pour une autre, vous êtes libéré des Forces canadiennes avant le paiement intégral de l’amende, le solde dû devra être payé le jour précédant votre libération.
[11] Officier de justice, veuillez escorter le Matelot de 1re classe Freudenreich. L’instance de la présente Cour martiale concernant le Matelot de 1re classe Freudenreich est terminée.
LIEUTENANT-COLONEL L.-V. D'AUTEUIL, JM
Avocats :
Le Major S.D. Richards, procureur militaire régional (Atlantique)
Procureur de Sa Majesté la Reine
le Major L. D'Urbano, Direction du service d’avocats de la défense
Avocat du Matelot de 1re classe W.K. Freudenreich