Cour martiale

Informations sur la décision

Résumé :

Date de l’ouverture du procès : 18 mars 2013.

Endroit : BFC Gagetown, édifice F-1, Oromocto (NB).

Chefs d’accusation
•Chefs d’accusation 1, 2 : Art. 130 LDN, trafic de substances inscrites à l’annexe IV LRCDAS (art. 5(1) LRCDAS).
•Chef d’accusation 3 : Art. 130 LDN, vente illicite de substances contenant une drogue inscrite à l’annexe F contrairement à l’article C.01.041(1.1) des règlements sur les aliments et drogues (art. 31 Loi sur les aliments et drogues).

Résultats
•VERDICTS : Chefs d’accusation 1, 3 : Coupable. Chef d’accusation 2 : Retiré.
•SENTENCE : Une réprimande et une amende au montant de 2000$.

Contenu de la décision

COUR MARTIALE

 

Référence : R c Hannah, 2013 CM 2013

 

Date : 20130515

Dossier : 201276

 

Cour martiale permanente

 

Base des Forces armées Gagetown

Oromocto (Nouveau-Brunswick), Canada

 

Entre : 

 

Sa Majesté la Reine

 

- et -

 

Soldat M.B.A. Hannah, contrevenant

 

 

En présence du capitaine de frégate P.J. Lamont, J.M.

 


 

TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE

 

SENTENCE

 

(Prononcée de vive voix)

 

[1]               Soldat Hannah, vous avez été reconnu coupable de deux infractions en vertu de la Loi sur la défense nationale, une accusation de trafic de la substance connue sous le nom de « méthyltestostérone » dans le premier chef d’accusation et une accusation de vente illicite d’une substance connue sous le nom de « clenbuterol » dans le troisième chef d’accusation.

 

[2]               Il m’incombe à présent de déterminer et de prononcer votre peine. Pour ce faire, j’ai tenu compte des principes de détermination de la peine qu’appliquent les cours ordinaires de juridiction criminelle au Canada et les cours martiales. J’ai également tenu compte des faits de l’espèce décrits dans le sommaire des circonstances, soit la pièce 3, et des autres documents présentés en preuve au cours de l’audience, ainsi que des observations des avocats de la poursuite et de la défense.

 

[3]               Les principes de détermination de la peine guident la cour dans l’exercice de son pouvoir discrétionnaire afin que celle-ci prononce une sentence appropriée et adaptée à chaque cas. La sentence doit généralement être proportionnelle à la gravité de l’infraction, à l’attitude blâmable ou au degré de responsabilité du contrevenant,  ainsi qu’à son caractère. La cour se fonde sur les peines infligées par les autres tribunaux dans des affaires similaires, non par respect servile des précédents, mais parce que notre sens commun de la justice veut que les affaires similaires soient traitées de façon similaire. Néanmoins, lorsqu’elle inflige une peine, la cour tient compte des nombreux facteurs qui caractérisent l’affaire particulière dont elle est saisie, qu’il s’agisse des circonstances aggravantes pouvant justifier une peine plus sévère ou des circonstances atténuantes permettant de réduire la peine.

 

[4]               Les buts et objectifs de la détermination de la peine ont été exposés de différentes façons dans de nombreuses affaires antérieures. En règle générale, ils ont trait à la protection de la société, qui comprend, bien sûr, les Forces canadiennes, en favorisant le développement et le maintien d’une collectivité juste, paisible, sûre et respectueuse des lois. Fait important, dans le contexte des Forces canadiennes, ces objectifs comprennent le maintien de la discipline, cette habitude d’obéir absolument indispensable à l’efficacité d’une force armée. Les buts et objectifs de la détermination de la peine comprennent aussi la dissuasion individuelle, pour éviter toute récidive du contrevenant, et la dissuasion générale, pour éviter que d’autres ne soient tentés de suivre son exemple. La peine vise également à assurer la réadaptation du contrevenant, à favoriser son sens des responsabilités et à dénoncer les comportements illégaux. Il est normal que, au cours du processus permettant d’arriver à une peine appropriée, certains de ces buts et objectifs l’emportent sur d’autres, mais il importe de les prendre tous en compte; une peine appropriée doit témoigner d’un mélange judicieux de ces buts qui soit adapté aux circonstances particulières de l’espèce.

 

[5]               L’article 139 de la Loi sur la défense nationale prévoit les différentes peines qu’une cour martiale peut infliger. Ces peines sont limitées par la disposition de la loi qui crée l’infraction et prescrit la peine maximale. Une seule sentence est prononcée, que le contrevenant soit déclaré coupable d’une ou de plusieurs infractions, mais la sentence peut comporter plus d’une peine. Un principe important veut que la cour inflige la peine la moins sévère permettant de maintenir la discipline.

 

[6]               Pour déterminer la peine applicable en l’espèce, j’ai tenu compte des conséquences directes et indirectes sur le contrevenant de la déclaration de culpabilité et de la sentence que je m’apprête à prononcer.

 

[7]               Les faits de la présente affaire ont été énoncés brièvement dans ma décision à l’issue des témoignages et des plaidoiries. Essentiellement, l’accusé a réussi à obtenir, à la demande d’un collègue de sa formation, deux substances : le méthyltestostérone et le clenbuterol. Il a obtenu ces substances à London (Ontario), apparemment pour un montant de 400 $, qui lui avait été remis à cette fin par son collègue. Le contrevenant s’est fait livrer les substances par la poste à la Base des Forces canadiennes Gagetown et, peu après les avoir reçues, il a donné le méthyltestostérone et le clenbuterol à son collègue, un autre militaire.

 

[8]               On m’a informé que ces substances sont des « stéroïdes anabolisants ». Je dispose de certains éléments de preuve, bien qu’ils soient limités, selon lesquels ces substances pourraient être populaires auprès de ceux qui fréquentent régulièrement les centres de conditionnement physique. On ne m’a présenté aucun élément de preuve me permettant de tirer des conclusions de fait précises à propos de la nature préjudiciable de ces substances ou autre. Je ne sais pas à quoi elles servent. Je ne sais pas en quelles quantités elles sont utilisées. Je ne sais pas s’il est dangereux de les utiliser, peu importe la quantité. Je ne sais pas s’il est dangereux de les utiliser en grande quantité. Je ne connais pas les effets de ces substances sur le corps humain. Je ne sais pas s’il est possible de développer une dépendance à ces substances ou si des quantités de plus en plus importantes sont utilisées au fil du temps. Je ne sais pas si la consommation de ces substances entraîne des effets psychotropes, si elles provoquent des hallucinations, de la rage ou de la colère et je ne sais pas si ces substances peuvent être utilisées à des fins thérapeutiques. Je dois malgré tout prononcer une sentence appropriée pour les infractions dont vous avez été reconnu coupable.

 

[9]               Les avocats recommandent conjointement une sentence consistant en une réprimande et une amende de 2 000 $.

 

[10]           Il revient évidemment à la cour de prononcer la sentence; cependant, lorsque les deux parties conviennent d’une recommandation conjointe, comme c’est le cas en l’espèce, cette recommandation revêt une grande importance pour la cour. Les tribunaux d’appel canadiens, y compris la Cour d’appel de la cour martiale, ont conclu que la cour devrait retenir la recommandation conjointe des avocats au sujet de la sentence, à moins que celle-ci ait pour effet de déconsidérer l’administration de la justice ou soit d’une autre façon contraire à l’intérêt public.

 

[11]           Les avocats qui ont comparu devant moi ont mentionné au moins quelques-unes des circonstances aggravantes et atténuantes en l’espèce. J’estime que la circonstance la plus aggravante est que ces infractions se rapportent au trafic ou la distribution de substances à un autre militaire.

 

[12]           Comme je l’ai remarqué au cours de l’argumentation et comme l’ont souligné les avocats, quand un individu achète des substances illicites de sources inconnues, il ne sait pas ce qu’il reçoit. S’il connaît déjà la substance, il peut avoir une bonne idée de ce qu’il devrait recevoir, mais à moins que la substance soit prescrite par un médecin praticien, le consommateur doit simplement se méfier.

 

[13]           Je tiens compte de plusieurs circonstances atténuantes :  

 

(a)                relatives à votre situation personnelle Soldat Hannah, notamment votre état de santé et les répercussions possibles de votre état de santé sur votre service dans les Forces canadiennes;

 

(b)               vous êtes un subalterne qui a joint les Forces canadiennes en 2011 et qui, à ce que je sache, n’a aucune fiche de conduite et n’a commis aucune autre infraction disciplinaire.

 

[14]           Aux dires de tous, vous avez le potentiel pour être un bon soldat canadien et un atout pour les Forces canadiennes. Si c’est le cas, vous y arriverez seulement si vous observez de manière stricte la politique des Forces canadiennes en matière de drogues dont on vous a informée bien avant aujourd’hui, j’en suis sûr.

 

[15]           Compte tenu des circonstances de l’infraction et de la situation du contrevenant, je ne peux pas dire que la recommandation conjointe des avocats est de nature à déconsidérer l’administration de la justice ou qu’elle est par ailleurs contraire à l’intérêt public. Par conséquent, j’accepte la recommandation conjointe des avocats.

 

POUR CES MOTIFS, LA COUR

 

[16]           Vous DÉCLARE coupable à l’égard du premier chef d’accusation, relativement à une infraction prévue à l’article 130 de la Loi sur la défense nationale, et coupable à l’égard du troisième chef d’accusation, relativement à une infraction prévue à l’article 130 de la Loi sur la défense nationale.

 

[17]      Vous CONDAMNE à une réprimande et à une amende de 2 000 $ payable en dix versements mensuels de 200 $, le premier étant exigible le 15 juin 2013. Si vous étiez, pour quelque raison, libéré des Forces canadiennes avant le paiement complet de l’amende, le solde en sera exigible le jour précédant votre libération.

 


 

Avocats :

 

Capitaine de corvette D. Reeves, Service canadien des poursuites militaires

Procureur de Sa Majesté la Reine

 

Major C.E. Thomas, Direction du service d’avocats de la défense

Avocat du soldat Hannah

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