Cour martiale
Informations sur la décision
Date de l’ouverture du procès : 6 novembre 2007.
Endroit : BFC Gagetown, édifice F-1, Oromocto (NB).
Chefs d’accusation
•Chef d’accusation 1 : Art. 130 LDN, voies de fait contre un agent de la paix (art. 270 C. cr.).
•Chef d’accusation 2 : Art. 116 LDN, a volontairement endommagé un bien public.
•Chef d’accusation 3 : Art. 97 LDN, ivresse.
Résultats
•VERDICTS : Chefs d’accusation 1, 2 : Retirés. Chef d’accusation 3 : Coupable.
•SENTENCE : Une amende au montant de 500$.
Contenu de la décision
Référence : R. c. Caporal J.A. Bahadur, 2007 CM 3023
Dossier : 200713
COUR MARTIALE PERMANENTE
CANADA
NOUVEAU-BRUNSWICK
BASE DES FORCES CANADIENNES GAGETOWN
Date : le 9 novembre 2007
SOUS LA PRÉSIDENCE DU LIEUTENANT‑COLONEL L-V. D'AUTEUIL, J.M.
SA MAJESTÉ LA REINE
c.
CAPORAL J.A. BAHADUR
(Délinquant)
SENTENCE
(Prononcée de vive voix)
[1] Caporal Bahadur, après avoir accepté et enregistré votre plaidoyer de culpabilité pour la seule accusation restant sur votre acte d’accusation, à savoir la troisième accusation, la cour vous déclare maintenant coupable de celle-ci.
[2] Le système de justice militaire constitue l’ultime recours pour faire respecter la discipline au sein des Forces canadiennes, la discipline constituant une dimension essentielle de l’activité militaire. Le but de ce système est de prévenir toute inconduite ou, de façon plus positive, de veiller à promouvoir la bonne conduite. C’est au moyen de la discipline que les forces armées s’assurent que leurs membres rempliront leurs missions avec succès, en toute confiance et fiabilité.
[3] Comme le déclare le Major Jean-Bruno Cloutier dans sa thèse sur l’utilisation des infractions prévues par l’article 129 de la Loi sur la défense nationale dans le système de justice militaire canadien, et je cite, « en bout de ligne, pour promouvoir au maximum les chances de succès de la mission, la chaîne de commandement doit être en mesure d’administrer la discipline afin de contrôler les inconduites qui mettent en péril le bon ordre ». Le système de justice militaire veille aussi au maintien de l’ordre public et s’assure que les personnes justiciables du Code de discipline militaire sont punies de la même façon que toute autre personne vivant au Canada.
[4] Il est reconnu depuis longtemps que le but d’un système de justice ou de tribunaux militaires distinct est de permettre aux Forces armées de s’occuper des questions qui relèvent du Code de discipline militaire et qui touchent directement à l’efficacité et au moral des troupes. Ceci étant dit, toute peine imposée par un tribunal, qu’il soit civil ou militaire, doit être la moins sévère possible tout en étant appropriée aux circonstances de l’espèce. Ce principe est conforme au devoir du tribunal de prononcer une sentence proportionnée à la gravité de l’infraction et aux antécédents du contrevenant, comme le prévoit l’alinéa 112.48(2)b) des ORFC.
[5] En l’espèce, les avocats de la poursuite et de la défense se sont entendus pour faire une recommandation conjointe quant à la peine. Ils recommandent que la cour vous condamne à une amende. Cependant, ils ne sont pas parvenus à s’entendre sur le montant de l’amende, même si leurs positions ne sont pas si éloignées.
[6] La cour a pris en considération la recommandation commune à la lumière des faits pertinents exposés dans le sommaire des circonstances et de leur importance. Elle a également examiné cette recommandation en fonction des principes applicables à la détermination de la peine, notamment ceux qui sont énoncés aux articles 718, 718.1 et 718.2 du Code criminel, dans la mesure où ils ne sont pas incompatibles avec le régime des peines prévu par la Loi sur la défense nationale.
[7]. Ces principes sont les suivants : premièrement, la protection du public, et le public comprend, en l’occurrence, les intérêts des Forces canadiennes; deuxièmement, la sanction du contrevenant; troisièmement, l’effet dissuasif de la peine non seulement sur le contrevenant, mais aussi sur toute personne qui pourrait être tentée de commettre de telles infractions, quatrièmement, l’amendement et la réadaptation du contrevenant. La cour a également tenu compte des dépositions des témoins, des documents qui ont été déposés en preuve, et des arguments avancés par les avocats, et notamment la jurisprudence qu’ils ont présentée à la cour.
[8] En l’espèce, la protection du public suppose de prononcer une peine qui mette l’accent sur la dénonciation et l’effet dissuasif général. Il est important de préciser que l’effet dissuasif général vise à faire en sorte que la peine infligée ait non seulement pour effet de dissuader le délinquant de récidiver, mais aussi toute autre personne qui, se trouvant dans une situation analogue, serait tentée de se livrer aux mêmes actes illicites.
[9] En l’espèce, la cour est saisie d’une infraction d’ivresse en dehors des heures de service. Il ne s’agit pas d’une infraction grave en soi, au sens de la Loi sur la défense nationale. En outre, elle peut être considérée comme une infraction mineure lorsqu’elle satisfait aux critères énoncés au paragraphe 108.17(1) des ORFC; cependant, il s’agit d’une infraction purement militaire qui caractérise bien la discipline militaire. Par conséquent, la cour prononcera tout de même la peine qu’elle considère être la moindre possible dans les circonstances.
[10] Pour en arriver à ce qu’elle croit être une peine juste et appropriée, la cour a pris en comte les circonstances aggravantes et les circonstances atténuantes décrites ci-après. La cour considère comme aggravants les facteurs suivants : la gravité objective des infractions. Vous avez été accusé d’une infraction aux termes de l’article 97 de la Loi sur la défense nationale, pour ivresse. Dans les circonstances, cette infraction est punissable d’une peine de détention ou d’une peine moins sévère; la gravité subjective de l’infraction. Compte tenu de votre conduite antérieure en ce qui concerne la consommation d’alcool, comme le révèle votre fiche de conduite, et le fait que vous suiviez des consultations et que vous aviez reçu un avertissement pour ce problème en particulier, vous avez démontré un mépris total pour l’autorité en agissant de la sorte la nuit de l’incident; la conduite répréhensible qui a découlé de votre comportement cette nuit-là; le fait que vous ayez décidé de contester l’autorité de la police militaire en ayant recours à un langage offensant et injurieux dans un lieu public, alors que vous étiez entouré de nombreuses personnes, y compris certains de vos pairs, a ajouté à la gravité de cet incident.
[11] La cour considère comme atténuants les facteurs suivants : D’après les faits qui lui ont été présentés, la cour en déduit que votre plaidoyer de culpabilité traduit un véritable signe de remords, et que votre désir de demeurer un atout pour la collectivité canadienne et les Forces canadiennes est sincère. La cour ne veut pas compromettre vos chances de succès, la perspective d’une réinsertion constituant toujours un aspect important de la détermination d’une peine; Les faits et les circonstances de l’affaire, y compris les mesures que vous avez prises pour trouver du soutien afin de résoudre votre problème de consommation d’alcool, et votre comportement au cours des 16 derniers mois. La cour reconnaît que vous avez finalement compris le message et elle vous encourage à persévérer en ce sens; Vos états de service à titre de soldat d'infanterie. Il apparaît clairement à la cour et à ceux qui travaillent avec vous que votre professionnalisme dans l’exécution de vos taches est excellent. Cependant, comme l’a exprimé votre SMR, il vous incombe de prouver que vous aurez la même conduite en dehors de votre environnement de travail. Vous avez réussi jusqu’ici, et il semble que vous soyez déterminé à ce qu’il en soit ainsi.
[12] Le fait que votre comportement ait déjà eu une incidence sur votre carrière militaire. D’après le Sergent Buick, en raison de votre conduite, votre candidature n’a pas été prise en compte pour le cours de QEL; La confiance que vous témoigne votre hiérarchie, en dépit de votre conduite. Il vous a été permis d’être déployé, et vous avez prouvé que cette confiance était justifiée. Vous devez continuer à agir ainsi au cours de votre service et en dehors de celui-ci si vous comptez devenir un leader au sein des Forces canadiennes; Le retard à traiter cette affaire. La cour ne veut blâmer personne dans la présente cause, mais plus les questions disciplinaires sont réglées rapidement, et plus la peine imposée est pertinente et efficace pour le moral et la cohésion des membres de l’unité. Le temps écoulé depuis que l’incident est survenu est un facteur qui réduit la pertinence d’envisager une sanction plus sévère.
[13] Compte tenu des facteurs et des circonstances de l’espèce, la cour estime que la recommandation conjointe des avocats sur la nature de la peine n’est pas déraisonnable. Par conséquent, la cour accepte la recommandation commune formulée par les avocats et vous condamne à une amende, étant donné que cette peine n’est pas contraire à l’intérêt public et qu’elle n’aura pas pour effet de déconsidérer l’administration de la justice.
[14] Caporal Bahadur, veuillez vous lever. Par conséquent, la cour vous condamne à une amende d’un montant de 500 $. L’amende doit être payée en deux versements mensuels de 250 $ à compter du 1er décembre 2007.
[15] La présente décision met fin à l’instance devant la cour martiale permanente relativement au Caporal Bahadur. Officier de justice, veuillez escorter le Caporal Bahadur.
LIEUTENANT-COLONEL L-V. D'AUTEUIL, J.M.
AVOCATS
Major S.D. Richards, Procureur militaire régional, région de l’Atlantique
Procureur de Sa Majesté la Reine
Lieutenant-Colonel D.T. Sweet, Direction du service d'avocats de la défense
Avocat du Caporal J.A. Bahadur