Cour martiale

Informations sur la décision

Résumé :

Date de l’ouverture du procès : 29 janvier 2008.
Endroit : BFC Gagetown, édifice F-1, Oromocto (NB).
Chefs d’accusation:
• Chefs d’accusation 1, 2, 3, 10 : Art. 83 LDN, a désobéi à un ordre légitime d’un supérieur.
• Chefs d’accusation 4, 6 : Art. 90 LDN, s’est absenté sans permission.
• Chef d’accusation 5 : Art. 85 LDN, a insulté verbalement un supérieur.
• Chef d’accusation 7 : Art. 86 LDN, a adressé des propos provocateurs à un justiciable du code de discipline militaire, tendant ainsi à créer une querelle.
• Chefs d’accusation 8, 9 : Art. 85 LDN, a menacé verbalement un supérieur.
Résultats:
• VERDICTS : Chefs d’accusation 1, 2, 3, 4, 5, 7, 10 : Coupable. Chefs d’accusation 6, 8, 9 : Non coupable.
• SENTENCE : Détention pour une période de 21 jours.

Cour martiale disciplinaire (CMD) (est composée d’un juge militaire et d’un comité)

Contenu de la décision

Référence : R. c. Caporal M. Sarganas, 2008 CM 2003

 

Dossier : 200743

                                                                      

 

 

 

COUR MARTIALE DISCIPLINAIRE CANADA

NOUVEAU-BRUNSWICK

BASE DES FORCES CANADIENNES GAGETOWN

 

 

 

 

Date : 5 février 2008

 

 

 

 

SOUS LA PRÉSIDENCE DU CAPITAINE DE FRÉGATE P. J. LAMONT, J. M.

 

 

 

 

SA MAJESTÉ LA REINE

c.

CAPORAL M. SARGANAS

(accusé)

 

 

 

SENTENCE

(Prononcée de vive voix)

______________________________________________________________________

 

 

[1]                   Caporal Sarganas, le présent comité de la cour martiale disciplinaire vous a reconnu coupable de quatre chefs d’accusation de désobéissance à un ordre légitime et d’un chef d’accusation de chacune des infractions suivantes : s’être absenté sans permission, avoir insulté verbalement un supérieur et avoir adressé à un autre justiciable du code de discipline militaire des propos provocateurs de nature à susciter une querelle.

 

[2]                   Il m’incombe maintenant de déterminer votre peine. Pour ce faire, la cour a tenu compte des principes de la détermination de la peine qu’appliquent les cours ordinaires de juridiction criminelle du Canada ainsi que les cours martiales. La cour a également pris en compte les faits de l’espèce, tels qu’ils ont été révélés par la preuve produite au procès ainsi que par les témoignages entendus et les éléments de preuve reçus au cours de l’audience de détermination de la peine, ainsi que les plaidoiries des avocats de la poursuite et de la défense.

 

[3]                   Les principes de la détermination de la peine guident la cour dans l’exercice de son pouvoir discrétionnaire en vue de déterminer une peine adéquate et adaptée à chaque cas. En règle générale, la peine doit correspondre à la gravité de l’infraction, au degré de responsabilité de son auteur et à sa moralité. La cour se fonde sur les peines prononcées par les autres tribunaux dans des affaires similaires, non parce qu’elle respecte aveuglément les précédents, mais parce que son sens commun de la justice veut qu’elle juge de façon similaire les affaires similaires. Néanmoins, lorsqu’elle détermine la peine, elle tient compte des nombreux facteurs qui distinguent chaque affaire dont elle est saisie, tant des circonstances aggravantes susceptibles de justifier une peine plus sévère que des circonstances atténuantes susceptibles de justifier une peine moins sévère.

 

[4]                   Les buts et les objectifs de la détermination de la peine ont été exposés de diverses manières dans de nombreuses affaires antérieures. En règle générale, ils concernent la nécessité de protéger la société, y compris, bien entendu, les Forces canadiennes, en favorisant le développement et le maintien d’une collectivité juste, paisible, sûre et respectueuse de la loi. Fait important, dans le contexte des Forces canadiennes, ces objectifs incluent le maintien de la discipline, cette habitude d’obéir si nécessaire à l’efficacité d’une force armée. Ces buts et objectifs comprennent aussi un volet dissuasion individuelle, pour éviter toute récidive du contrevenant, et un volet dissuasion générale, pour éviter que d’autres ne soient tentés de suivre son exemple. La peine a aussi pour objet d’assurer la réinsertion du contrevenant, de promouvoir son sens des responsabilités et de dénoncer les comportements illégaux.

 

[5]                   Il est normal qu’au cours du processus permettant d’arriver à une peine juste et adaptée à chaque cas, certains de ces buts et objectifs l’emportent sur d’autres. Toutefois, il incombe à la cour chargée de déterminer la peine de les prendre tous en compte; une peine juste et adaptée est une sage combinaison de ces buts, adaptée aux circonstances particulières de l’espèce.

 

[6]                   L’article 139 de la Loi sur la défense nationale prévoit les différentes peines qu’une cour martiale peut infliger. Ces peines sont limitées par la disposition de la loi qui crée l’infraction et qui prévoit une peine maximale, et aussi par la compétence que peut exercer la présente cour. Un contrevenant reçoit une seule sentence, qu’il ait été déclaré coupable d’une ou de plusieurs infractions, mais cette sentence peut prévoir plusieurs peines. Un principe important veut que la cour inflige la peine la moins sévère permettant de maintenir la discipline.

 

[7]                   Pour déterminer la sentence, dans cette affaire, j’ai tenu compte des conséquences directes et indirectes de la déclaration de culpabilité ainsi que de la peine que je vais infliger.

 

[8]                   Voici les faits de l’infraction, tels qu’ils ressortent de la preuve que le comité doit avoir accepté. En septembre et en octobre, vous, Caporal Sarganas, avez défié à quatre reprises  et de manière flagrante l’autorité de militaires du rang plus anciens et dans des grades plus élevés dans votre chaîne de commandement du 2e Bataillon, The Royal Canadian Regiment (2 RCR), non seulement en ne faisant pas ce qui vous était ordonné, mais en refusant, par vos paroles et vos gestes, de remplir votre devoir de soldat. Ainsi, par vos paroles, vous avez démontré que vous pleinement conscient de la nature des ordres et des conséquences disciplinaires qui découleraient de votre inconduite. Donc, à une occasion, vous avez  omis de participer à l’exercice de votre unité et, par la suite, à deux reprises – à neuf jours d’intervalle – vous n’avez pas rejoint votre unité à Wainwright pour l’aider à assumer ses responsabilités en matière d’instruction en vue de la rotation en Afghanistan.

 

[9]                   Malgré des demandes répétées, les ordres et les avertissements relatifs aux conséquences, vous avez simplement refusé d’accomplir votre devoir pour des raisons qui, d’après l’ensemble de la preuve, ne me semblent pas évidentes. Au cours de ces occasions répétées d’insubordination, il est arrivé que vous vous soyez absenté de votre lieu de service pendant des heures, jusqu’à ce qu’on vous retrouve et vous arrête, et qu’à ce moment-là, votre unité était partie sans vous. Enfin, deux jours avant la dernière occasion, vous deviez partir pour Wainwright et vous avez verbalement insulté le sergent Simmons et, par vos paroles, tenté de provoquer une querelle avec l’adjudant Collins.

 

[10]                 La poursuite demande une peine allant de la rétrogradation à une période de détention de 30 jours. L’avocat de la défense, au nom du Caporal Sarganas, indique qu’un blâme et une amende seraient appropriés; si la détention est imposée, il demande la suspension de l’exécution de la peine de détention.

 

[11]                 À l’exception du fait que les infractions n’ont pas été commises sur un théâtre des opérations, bien peu dans la preuve atténue la gravité de ces infractions. En ce qui concerne la situation personnelle du contrevenant, il est dans la vingtaine et a six années complètes de service au sein des Forces canadiennes. Il est divorcé et n’a personne à sa charge. La cour n’accorde pratiquement aucun poids aux inscriptions de sa fiche de conduite puisqu’il semble qu’elles n’ont rien à voir avec son service. La cour accepte le témoignage du conseiller en toxicomanie, M. Jones, mais elle n’accepte pas l’observation de l’avocat selon laquelle le Caporal Sarganas est atteint d’un syndrome de stress post-traumatique (SSPT) par suite de son service. La cour estime que les éléments d’information n’appuient ni le diagnostique ni la conclusion; ils indiquent seulement que, selon M. Jones, le Caporal Sarganas devrait être examiné pour vérifier s’il souffre d’un SSPT et que le Dr Rogers est du même avis.

 

[12]                 La cour reconnaît que le Caporal Sarganas a de sérieux problèmes de maîtrise de sa colère, de dépression et d’abus de drogues, peut-être par suite d’expériences vécues dans son enfance. La cour convient que, si un stress post-traumatique est diagnostiqué chez le contrevenant, la réussite d’un programme comme celui qui est offert à Homewood lui serait bénéfique, mais elle est également convaincue que la peine à laquelle elle en arrive ne l’empêchera pas de suivre ce programme ou tout autre traitement que ses conseillers professionnels peuvent suggérer.

 

[13]                 La cour estime qu’un blâme accompagné d’une amende ne constitue tout simplement pas une peine suffisante pour refléter la gravité des infractions en l’espèce. Elle est consciente, bien entendu, qu’on ne peut infliger une peine d’emprisonnement que lorsque aucune autre peine ou combinaison de peines ne peut atteindre les buts de la détermination de la peine qui sont indiqués dans les circonstances. Néanmoins, elle est convaincue qu’une période de détention est manifestement nécessaire non seulement en raison des circonstances liées aux infractions, mais également en raison de la situation du contrevenant. La cour n’est pas convaincue qu’il y a lieu de suspendre l’exécution de la peine de détention.

 

 

[14]                 Corporal Sarganas, veuillez vous lever. La cour vous condamne à 21 jours de détention. La sentence est prononcée à 10 h 25, le 5 février 2008.

 

 

                                                                       CAPITAINE DE FRÉGATE P.J. LAMONT, J.M.

 

AVOCATS :

 

Le Capitaine T.D. Bussey, Poursuites militaires régionales, région de l’Ouest

Procureur de Sa Majesté la Reine

Le Lieutenant-colonel D.T. Sweet, Direction du service d’avocats de la défense

Avocat du Caporal M. Sarganas

 

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