Cour martiale

Informations sur la décision

Résumé :

Date de l’ouverture du procès : 24 septembre 2012.

Endroit : BFC Valcartier, édifice 534, l’Académie, Courcelette (QC).

Chefs d’accusation
•Chef d’accusation 1 (subsidiaire au chef d’accusation 2) : Art. 114 LDN, vol.
•Chef d’accusation 2 (subsidiaire au chef d’accusation 1) : Art. 115 LDN, recel.
•Chef d’accusation 3 : Art. 116b) LDN, a volontairement vendu de façon irrégulière un bien appartenant à un autre justiciable du code de discipline militaire.

Résultats
•VERDICT(S) : Chef d’accusation 1: Coupable. Chef d’accusation 2: Une suspension d’instance. Chef d’accusation 3: Retiré.
•SENTENCE : Une réprimande et une amende au montant de 500$.

Contenu de la décision

COUR MARTIALE

 

Référence : R. c. Bérubé, 2012 CM 1011

 

Date : 20120924

Dossier : 201214

 

Cour martiale permanente

 

Garnison Valcartier

Québec (Québec) Canada

 

Entre :

 

Sa Majesté la Reine

 

- et -

 

Caporal J. Bérubé, contrevenant

 

Devant : Colonel M. Dutil, J.M.C.

 


 

MOTIFS DE LA SENTENCE

 

(Oralement)

 

[1]        Le caporal Bérubé a avoué sa culpabilité à l'accusation de vol aux termes de l'article 114 de la Loi sur la défense nationale. La cour a accepté et enregistré cet aveu de culpabilité et elle a ordonné une suspension d'instance à l'égard du chef d'accusation subsidiaire de recel qui, lui, avait été porté aux termes de l'article 115 de la Loi.

 

[2]        Les procureurs en présence ont formulé une suggestion commune, soit une réprimande assortie d'une amende de 500 dollars payable en deux versements égaux. Cette recommandation se situe au bas de l'échelle pour les infractions de même nature commises dans des circonstances relativement similaires.

 

[3]        Les faits de cette affaire sont simples. En bref, en fin septembre 2010, le caporal-chef Raymond, membre du 1er Royal 22e Régiment, a été avisé par deux militaires d'une situation inhabituelle, c'est-à-dire qu'un véhicule personnel était garé dans le stationnement de la bâtisse 314 situé sur la base des Forces canadiennes Valcartier et que cette voiture était sur des crics et que les roues avaient été enlevées. Après quelques recherches pour identifier le propriétaire, le caporal-chef Raymond a contacté le soldat Déry-Doiron était à ce moment-là en exercice à la base des Forces canadiennes Wainwright en Alberta. Après avoir été informé que son véhicule était dans le stationnement sur quatre crics sans jantes ni pneus, le soldat Déry lui a affirmé ne pas pouvoir expliquer la situation et lui a demandé de contacter la police militaire pour rapporter l'événement. Suite à cela, le caporal-chef Raymond a contacté la police militaire de la garnison Valcartier pour rapporter le vol de quatre jantes et les pneus d'un véhicule privé qui était situé près de la bâtisse 314. Quelques jours plus tard, le frère du soldat Déry-Doiron est allé installer des pneus d'hiver sur le véhicule de son frère et a rencontré la police militaire pour récupérer les clés du véhicule et leur remettre les crics qui soutenaient le véhicule. Suite aux informations fournies par le frère de la victime, la police militaire a fait des recherches sur un forum de discussion automobile sur Internet où étaient annoncées des jantes du même modèle que celles qui avaient été dérobées. Les démarches de la police militaire ont permis d'identifier l'accusé comme étant l'auteur de ces annonces ainsi que d'établir que les jantes en vente sur le site étaient du même modèle que ceux qui appartenaient à la victime. Soupçonné d'être l'auteur du vol, le caporal Bérubé a été interrogé par les enquêteurs à la mi-octobre. Lors de cette entrevue, il a initialement nié les faits. Lorsque confronté aux éléments de l'enquête, il a rapidement avoué que les jantes et les pneus en question étaient ceux qui avaient été pris sur le véhicule de la victime et qu'il était l'auteur de ce vol. Il a expliqué également avoir agi sur un coup de tête en raison de problèmes financiers qui l'accablaient à ce moment et il a accepté de faire une déclaration écrite à cet effet. Le jour même de l'entrevue avec les policiers militaires, les biens ont été remis à la police militaire de la garnison Valcartier. Cela résume les faits qui entourent cette affaire.

 

[4]        Évidemment, lorsqu'il s'agit de donner une sentence appropriée à un accusé pour les fautes qu'il a commises et à l'égard des infractions dont il est coupable, certains objectifs sont visés à la lumière des principes applicables qui varient légèrement d'un cas à l'autre. Il ne faut pas oublier que le prononcé de la sentence lors d'une cour martiale a pour objectif essentiel non seulement de contribuer au respect de la loi mais aussi de contribuer au maintien de la discipline militaire et ce par l'infliction de peines qui sont justes et qui sont toujours les peines minimales nécessaires pour atteindre ces objectifs essentiels.

 

[5]        Sans énumérer les objectifs et tous les principes qui s'appliquent en matière se sentencing qui sont très bien connus des procureurs, je suis d'accord avec les énoncés ou la description qui m'a été formulée par les procureurs en présence que dans ce cas-ci, l'objectif essentiel est celui de la dissuasion générale et de façon complémentaire de permettre ou à tout le moins de ne pas freiner la réhabilitation de l'accusé.

 

[6]        Lorsqu'on regarde les facteurs aggravants dans cette affaire, ils sont sérieux mais quand même peu nombreux. Premièrement, évidemment il y a la gravité objective de l'infraction de vol qui est passible d'une peine d'emprisonnement maximale de sept ans; donc c'est en soi objectivement, comme je l'ai dit, une infraction jugée sérieuse par le législateur. Je retiendrai deuxièmement comme facteur aggravant, le fait que le vol a été commis à l'égard d'une autre personne qui, elle aussi, était membre des Forces canadiennes et que l'accusé, je pense, savait ou aurait dû savoir que le fait que le véhicule était entreposé ou garé sur un établissement de défense, c'est-à-dire à l'édifice 314, faisait en sorte que ce véhicule appartenait à un militaire. Les tribunaux militaires ont toujours reconnu que le vol entre militaires doit être considéré comme étant extrêmement sérieux parce qu'il porte atteinte, comme l'a mentionné le procureur de la poursuite, au lien de confiance qui doit exister entre les militaires surtout lorsque ceux-ci sont déployés soit pour des missions de longue durée ou simplement lors d'exercices qui, eux aussi, peuvent être parfois de longue durée. Je suis d'accord avec le procureur de la poursuite relativement que les faits eux-mêmes doivent être considérés aggravants dans les circonstances en ce qui a trait au degré de planification et de préméditation qui était associé au vol des pneus et des jantes, et ce même si dans la perspective du caporal Bérubé les gestes posés l'ont été à la suite d'un coup de tête qui résultait de problèmes financiers. Ce sont là les facteurs aggravants qui sont présents dans cette affaire.

 

[7]        Or, les facteurs atténuants sont tout aussi importants. Il y a évidemment l'aveu rapide, lorsque confronté à la preuve, du caporal Bérubé fait aux enquêteurs et sa participation relativement à la restitution des biens et aussi le fait qu'il a avisé, par l'intermédiaire de son procureur, les procureurs de la poursuite qu'il entendait avouer sa culpabilité à la première opportunité. Donc, il ne fait aucun doute dans l'esprit de la cour que cet aveu de culpabilité aujourd'hui est un signe de remords et aussi d'acceptation sincère de ses responsabilités dans cette affaire. Je note également le délai de deux ans depuis les événements en question. Je n'ai pas été informé des circonstances qui ont fait en sorte que cette cause a pris deux ans avant de faire l'objet de ce procès mais il s'agit là également d'un facteur important dans l'acceptation de cette suggestion commune. Et finalement, le fait que le caporal Bérubé n'a ni dossier criminel ni fiche de conduite; donc, il avait jusqu'à ce jour un parcours tout à fait parfait et c'est dommage qu'il l'ait entaché de cette façon parce qu'il n'a pas pu trouver la bonne manière de gérer sa situation financière. Évidemment, ça explique le geste mais ça ne pardonne pas le geste et il en est parfaitement conscient. Autre facteur qui doit être pris en compte aux termes de l'atténuation de la sentence a trait au relatif jeune âge de l'accusé. Évidement il a aujourd'hui 24 ans, il en avait 22 à l'époque de la commission de l'infraction. Donc à 22 ans je pense que le manque de maturité et une grave erreur de jugement, si on se reporte à aujourd'hui, font en sorte qu'il va payer un prix quand même assez lourd parce qu'il aura dorénavant, comme l'a mentionné le capitaine de corvette Desbiens son procureur, un casier judiciaire et il ne s'agit pas d'une mince affaire comme son avocat lui a déjà expliqué. Et finalement, je retiens comme facteur atténuant la situation familiale et financière de l'accusé. Cette situation financière qui apparaît selon les documents qui ont été fournis à la cour quand même assez fragile. Donc j'accepte cette suggestion commune en pensant à la situation financière et également le fait que vous êtes, caporal Bérubé, le papa d'un jeune enfant de quatre ans. Donc ça aussi, la situation familiale, la situation financière est un facteur atténuant dans les circonstances.

 

[8]        Donc, ce sont pour toutes ces raisons que la cour n'a aucune difficulté à entériner la suggestion commune des procureurs qui a été particulièrement bien étoffée par les deux procureurs. Les motifs qui ont été formulés à son égard étaient convaincants et extrêmement bien préparés et je les félicite à cet effet.

 

POUR CES RAISONS, LA COUR

 

[9]        PRONONCE un verdict de culpabilité à l'égard du 1er chef d'accusation, soit le chef de vol contrairement à l'article 114 de la Loi sur la défense nationale et elle confirme la suspension d'instance à l'égard du deuxième chef d'accusation, et

 

[10]      CONDAMNE le contrevenant, le caporal Bérubé, à la réprimande et à l'amende au montant de 500 dollars payable en deux versements mensuels consécutifs égaux de 250 dollars et ce, à compter du 15 octobre 2012.

 


Avocats :

Major G. Roy, Service canadien des poursuites militaires

Avocat de la poursuite

Capitaine de corvette P.D. Desbiens, Service d'avocats de la défense

Avocat du caporal J. Bérubé

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.