Cour martiale

Informations sur la décision

Résumé :

Date de l’ouverture du procès : 6 novembre 2012.

Endroit : 4050 – 4e avenue ouest, Vancouver (CB).

Chef d’accusation

•Chef d’accusation 1: Art. 129 LDN, acte préjudiciable au bon ordre et à la discipline.


Résultats
•VERDICT : Chef d’accusation 1: Coupable.
•SENTENCE : Une amende au montant de 150$.

Contenu de la décision

COUR MARTIALE

 

Référence : R c Chu, 2012 CM 1017

 

Date : 20121106

Dossier : 211262

 

Cour martiale permanente

 

4050, 4e Avenue Ouest

Vancouver (Colombie-Britannique), Canada

 

Entre :

 

Sa Majesté la Reine

 

- et -

 

Caporal-chef Chu, contrevenant

 

 

Devant : Colonel M. Dutil, J.M.C.

 


TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE

 

MOTIFS DE LA SENTENCE

 

(Prononcés de vive voix)

 

[1]               Le Caporal-chef Chu a reconnu sa culpabilité relativement à un chef d’accusation fondé sur l’article 129 de la Loi sur la défense nationale. Les circonstances entourant l’infraction révèlent que le 1er octobre 2011, il participait à un exercice d’entraînement d’unité sur le terrain dans un champ de tir à Chilliwack (Colombie-Britannique). Alors qu’il s’apprêtait à présenter l’exercice à certains membres de son unité, il a demandé au Sergent Gray, sergent quartier-maître régimentaire de l’unité, de lui fournir une grenade inerte M67 pour les besoins de l’entraînement.

 

[2]               Son supérieur lui a fourni trois grenades inertes; cependant, le Sergent Gray craignait qu’elles ne se perdent, et a donc enjoint au contrevenant de ne pas s’en servir, en lui rappelant que l’unité devait lancer des grenades le lendemain. Environ vingt minutes plus tard, le Sergent Gray a aperçu le Caporal-chef Chu et quelque quatre autres membres de l’unité effectuer des recherches dans une zone proche de l’endroit où le Caporal-chef Chu donnait son cours.

 

[3]               Le supérieur a appris qu’ils recherchaient une grenade inerte égarée durant la première des quatre séances de lancer de grenade inerte menées par le Caporal-chef Chu. Ce dernier et ses étudiants avaient donc lancé les grenades durant ces séances, en contravention de l’ordre donné. Il avait mené les séances d’entraînement de cette façon parce qu’il croyait fermement qu’un tel exercice était nécessaire, et que le lancer de grenade était, comme il l’a indiqué, un élément requis en vue d’une instruction adéquate.

 

[4]               À la fin de la journée d’exercice, vers 15 h, le Caporal-chef Chu a rapporté deux des grenades inertes qui lui avaient été fournies. Le lendemain, au terme de l’exercice d’entraînement de l’unité, tous les membres disponibles se sont mis à la recherche de la grenade inerte égarée avant de regagner leur secteur. Après une battue de près de quinze minutes, la grenade inerte a été retrouvée. Bien entendu, cet incident a mécontenté les membres de l’unité. Il ne fait aucun doute que le non-respect des ordres du Sergent Gray par le Caporal-chef Chu a gravement sapé l’autorité du premier à l’égard des subordonnés du second.

 

[5]               Les avocats de la poursuite et de la défense ont formulé une recommandation conjointe relativement à la peine à infliger. Ils proposent que la Cour le condamne à une amende de 150 $. Bien qu’elle ne soit pas liée par la recommandation conjointe formulée par les avocats, la Cour ne peut la rejeter que si elle va à l’encontre de l’intérêt public ou qu’elle a pour effet de jeter le discrédit sur l’administration de la justice; tel n’est pas le cas en l’espèce.

 

[6]               Dans le cadre de la détermination de la peine d’un contrevenant aux termes du Code de discipline militaire, la Cour martiale doit tenir compte des principes et objectifs appropriés en matière de sentences, y compris ceux énoncés aux articles 718.1 et 718.2 du Code criminel. Il faut garder à l’esprit que l’objectif fondamental de l’imposition d’une sentence en cour martiale est de contribuer au respect de la loi et au maintien de la discipline militaire en infligeant des peines qui répondent à une ou plusieurs des visées suivantes :

 

a)                  tout d’abord, la protection du public, y compris celle des Forces canadiennes;

 

b)                  deuxièmement, la dénonciation de la conduite illicite;

 

c)                  troisièmement, l’effet dissuasif de la peine, non seulement pour le contrevenant, mais aussi pour les autres personnes qui pourraient être tentées de commettre de semblables infractions;

 

d)                 finalement, l’amendement et la réadaptation du contrevenant.

 

[7]        La sentence doit également tenir compte des principes suivants :

 

a)                  la peine doit être proportionnelle à la gravité de l’infraction, à la réputation du contrevenant et à son degré de responsabilité;

 

b)                  la peine doit être analogue à celles qui ont été infligées à des contrevenants ayant commis de semblables infractions dans de semblables circonstances;

 

c)                  finalement, la peine doit être ajustée en fonction des circonstances aggravantes ou atténuantes liées à la perpétration de l’infraction et à la situation du contrevenant.

 

[8]        La Cour fera toujours preuve de retenue au moment de déterminer la sentence, et celle-ci doit donc toujours correspondre à l’intervention minimale requise pour maintenir la discipline. Les infractions au titre de l’article 129 de la Loi sont destinées à protéger et à préserver les valeurs essentielles de la discipline militaire. Je conviens avec les avocats que la peine imposée doit mettre l’accent sur la dissuasion générale et spécifique. Dans une organisation militaire, les jeunes meneurs doivent se comporter d’une manière qui ne sape pas l’autorité légitime de leurs supérieurs.

 

[9]        Les facteurs aggravants dans la présente affaire sont les suivants :

 

a)                  premièrement, la gravité objective de l’infraction au titre de l’article 129 de la Loi sur la défense nationale. Cette infraction est punissable de destitution ignominieuse du service de Sa Majesté, elle est donc grave;

 

b)                  deuxièmement, la gravité subjective de l’infraction telle que décrite dans le sommaire des circonstances. Les ordres issus de la chaîne de commandement doivent être obéis en tout temps. Si un ordre spécifique soulève une préoccupation, il est acceptable d’en faire part à un supérieur, mais inacceptable de ne pas en tenir compte surtout lorsque les subordonnés en ont connaissance.

 

[10]      Cependant, les circonstances atténuantes dans cette affaire sont décisives :

 

            a)         tout d’abord, le Caporal-chef Chu a assumé l’entière responsabilité de sa conduite en plaidant coupable devant la Cour et en informant la poursuite de son intention à cet égard à la première occasion. Il s’agit ici du facteur atténuant le plus significatif;

 

            b)         deuxièmement, le Caporal-chef Chu est un atout très précieux au sein de son unité et des Forces canadiennes. Ses états de service sont éloquents, bien qu’il ait rempli les fonctions d’assistant médical assez brièvement. Au cours des dernières années, il a reçu la médaille du Jubilé de diamant de la Reine Elizabeth et une mention élogieuse de son unité;

 

            c)         troisièmement, le Caporal-chef Chu n’a aucun antécédent criminel ou disciplinaire et il est très jeune. À 30 ans, c’est un jeune meneur.

 

[11]      D’après son dossier, il complète un programme de biochimie à la Simon Fraser University, et son avocat a informé la Cour qu’il avait l’intention de poursuivre une carrière dans le domaine de l’application de la loi, en médecine légale, ce qui est louable. Comme l’a déclaré l’avocat, le Caporal-chef Chu croyait honnêtement que le lancer de ces grenades inertes serait bénéfique à l’entraînement de ses subordonnés. Plutôt que de faire part de ses préoccupations à son supérieur, il n’a tenu aucun compte de l’ordre à l’effet contraire qui lui avait donné. Ses préoccupations étaient peut-être valides, mais là n’est pas la question. Son initiative était tout à fait inappropriée et a ébranlé l’autorité de son supérieur immédiat et la chaîne de commandement, c’est pourquoi ces éléments sont si aggravants dans les circonstances de la présente affaire. Cependant, comme je l’ai noté, son plaidoyer de culpabilité montre qu’il reconnaît lui-même avoir manqué de jugement ce jour-là, ce qui apparemment ne lui ressemble pas.

 

[12]      Je conviens avec la poursuite que la décision R v Finstad, 2009 CM 3007, est un précédent utile pour envisager la recommandation conjointe des avocats d’imposer une amende de 150 $ comme peine minimale dans les circonstances. Cette sentence est en accord avec l’éventail des peines imposées dans les affaires de moindre gravité concernant ce type d’infraction.

 

[13]      La peine proposée suffit à remplir les objectifs désirés, à savoir la dissuasion générale et spécifique. J’ajouterai aussi qu’elle ne fera certainement pas obstacle aux chances de réadaptation dans ce cas précis puisque le montant de l’amende est tel que l’impact de la condamnation s’effacera assez rapidement.

 

POUR CES MOTIFS, LA COUR :

 

[14]      Vous DÉCLARE coupable de la première accusation fondée sur l’article 129 de la Loi sur la défense nationale.

 

[15]      Vous CONDAMNE à verser une amende de 150 $.

 


 

Avocats

 

Capitaine de corvette S. Torani, Service canadien des poursuites militaires

Procureur de Sa Majesté la Reine

 

Major J.L.P.L. Boutin, Direction du service d’avocats de la défense

Avocat du Caporal-chef N.L.W. Chu

 

 

 

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