Cour martiale

Informations sur la décision

Résumé :

Date de l'ouverture du procès : 30 septembre 2008

Endroit : BFC Petawawa, Édifice L-106, Petawawa (ON)

Chefs d'accusation
•Chefs d'accusation 1, 2 : Art. 124 LDN, a exécuté avec négligence une tâche militaire.

Résultats
•Verdicts : Chef d'accusation 1 : Non coupable. Chef d'accusation 2 : Coupable.
•SENTENCE : Un blâme et une amende au montant de 4000$

Contenu de la décision

Référence : R. c. Le Capitaine J.D. Leslie, 2008 CM 2015

 

Dossier : 200813

 

COUR MARTIALE PERMANENTE

CANADA

ONTARIO

BASE DES FORCES CANADIENNES PETAWAWA

 

Date : Le 30 septembre 2008

 

SOUS LA PRÉSIDENCE DU COMMANDANT P.J. LAMONT, J.M.

 

SA MAJESTÉ LA REINE

c.

LE CAPITAINE J.D. LESLIE

(contrevenant)

 

SENTENCE

(prononcée de vive voix)

 

 

TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE

 

[1]                    Capitaine Leslie, ayant accepté et inscrit votre plaidoyer de culpabilité à l’égard du deuxième chef d’accusation ‑ avoir exécuté avec négligence une tâche militaire ‑, la cour vous déclare maintenant coupable de cette accusation.

 

[2]                    Il m’incombe à présent de déterminer et de vous infliger une peine. Pour ce faire, j’ai tenu compte des principes de la détermination de la peine qu’appliquent les tribunaux ordinaires de juridiction criminelle au Canada, ainsi que les cours martiales. J’ai également tenu compte des faits de l’espèce tels qu’ils sont décrits dans le sommaire des circonstances (pièce 6), ainsi que des éléments de preuve recueillis au cours de la phase préliminaire et des arguments du procureur de la poursuite et de l’avocat de la défense.

 


[3]                    Les principes de la détermination de la peine orientent la cour dans l’exercice de son pouvoir discrétionnaire de prononcer une peine adéquate et adaptée à chaque cas. De façon générale, la peine doit être proportionnée à la gravité de l’infraction et au caractère répréhensible de celle‑ci, ainsi qu’au degré de responsabilité et aux antécédents du contrevenant. La cour se fonde également sur les peines prononcées par les autres tribunaux dans des affaires similaires, non pas par souci d’adhérer aveuglément aux précédents, mais parce qu’il nous semble juste et logique que des affaires similaires soient traitées de façon semblable. Lorsqu’elle inflige une peine cependant, elle tient compte des nombreux facteurs qui distinguent l’affaire dont elle est saisie des autres causes, qu’il s’agisse des circonstances aggravantes pouvant justifier une peine plus sévère ou des circonstances atténuantes pouvant militer en faveur d’une peine réduite.

 

[4]                    Les buts et objectifs de la détermination de la peine ont été exprimés de diverses façons à maintes reprises dans le passé. Généralement, ils ont trait à la protection de la société, qui comprend évidemment les Forces canadiennes, en veillant à promouvoir une société juste, sûre, paisible et respectueuse des lois. Fait important à souligner, ces objectifs comprennent, dans le contexte des Forces canadiennes, le maintien de la discipline, cette habitude d’obéissance qui est indispensable à l’efficacité d’une force armée.

 

[5]                    Les buts et objectifs comprennent également la dissuasion, soit l’effet dissuasif produit sur le contrevenant ainsi que l’effet dissuasif général produit sur toute personne qui pourrait être tentée de suivre l’exemple de celui‑ci. Les objectifs comprennent aussi la réinsertion sociale du contrevenant, la prise de conscience par celui‑ci de ses responsabilités et la dénonciation du comportement illégal. La cour attribuera inévitablement une importance prédominante à au moins un de ces buts et objectifs pour déterminer la peine juste et appropriée dans un cas donné. Elle doit cependant examiner chacun de ces objectifs et arriver à la peine juste et appropriée après avoir judicieusement soupesé l’ensemble de ces objectifs, compte tenu des circonstances particulières de l’affaire dont elle est saisie.

 

[6]                    Comme je vous l’ai expliqué lorsque vous avez inscrit votre plaidoyer de culpabilité, l’article 139 de la Loi sur la défense nationale prescrit les peines qu’une cour martiale peut infliger. Ces peines sont limitées par la disposition législative qui crée l’infraction et qui prévoit la peine maximale. Une seule sentence est prononcée à l’endroit d’un contrevenant, que celui‑ci soit déclaré coupable d’une seule infraction ou de plusieurs, mais la sentence peut prévoir plusieurs peines. Selon un principe important, la cour doit infliger seulement la peine qui est nécessaire pour maintenir la discipline.

 

[7]                    Pour en arriver à la sentence en l’espèce, j’ai examiné les conséquences directes et indirectes que la déclaration de culpabilité et la peine que je suis sur le point d’infliger pourraient entraîner pour le contrevenant.

 


[8]                    Les faits concernant l’infraction en l’espèce sont exposés de manière très détaillée mais succincte dans la pièce 6, le sommaire des circonstances. En résumé, à la date alléguée dans l’accusation, le contrevenant était l’officier du poste de commandement et l’officier technique supérieur d’artillerie à une position d’artillerie qui appuyait une compagnie de soldats canadiens qui, avec leurs alliés afghans, combattaient les insurgés talibans dans la province de Kandahar, en Afghanistan.

 

[9]                    Lorsque les combattants talibans ont commencé à se retirer, des tirs d’artillerie ont été utilisés pour leur barrer la route. À cause d’une série d’erreurs commises par le contrevenant, notamment des erreurs de jugement, les tirs de l’une des armes utilisées ont été mal dirigés et trois projectiles sont tombés près des soldats canadiens. Aucun d’entre eux n’a été grièvement blessé. Le contrevenant, qui a immédiatement fait enquête, a déterminé la cause de l’incident et a aussitôt reconnu sa responsabilité.

 

[10]                  La poursuite prétend que la perte d’une année d’ancienneté assortie d’une amende de 4 000 $ serait une peine appropriée en l’espèce. Pour sa part, l’avocat de la défense soutient, pour le compte du Capitaine Leslie, qu’une perte d’ancienneté ne convient pas. Il recommande plutôt une réprimande et une amende de 2 000 $.

 

[11]                  À mon avis, il ne convient pas d’infliger une perte de l’ancienneté. Cette peine est demandée en grande partie en raison de sa valeur symbolique car il s’agit d’une peine plus sévère que le blâme, selon le barème des peines prévu à l’article 139 de la Loi sur la défense nationale, mais moins sévère que la rétrogradation, une peine qui, selon la poursuite, n’est pas appropriée. Je considère cependant que les objectifs de dissuasion générale et de dénonciation ‑ qui sont, à mon avis, les plus importants en l’espèce ‑ ne seraient tout simplement pas atteints si j’infligeais une perte de l’ancienneté.

 

[12]                  Capitaine Leslie, il ne fait aucun doute à mes yeux que vous êtes un officier d’artillerie doué et très compétent. Vous avez servi dans les Forces canadiennes avec distinction et vous continuez de jouir de la confiance de la chaîne de commandement, malgré l’incident qui a entraîné l’accusation en cause en l’espèce. Je crois que vous méritez cette confiance et qu’il est très peu probable que vous commettiez de nouveau un autre incident de ce genre. Vous avez rapidement reconnu votre responsabilité à l’époque et vous continuer à le faire en plaidant coupable aujourd’hui. Votre réinsertion sociale et l’effet dissuasif que la peine devrait avoir sur vous ne sont pas des facteurs importants en l’espèce.

 

[13]                  Je dois aussi, toutefois, tenir compte des faits concernant l’infraction. Ces faits mettent en lumière une série d’inactions ou d’omissions de votre part qui ont directement mis sérieusement en danger la vie et la sécurité de membres des Forces canadiennes engagés dans une opération de combat. Lors de cet incident isolé et sous la pression, vous avez négligé de prendre une série de précautions visant, en partie à tout le moins, à protéger vos compagnons d’armes contre précisément le type de risque de préjudice auquel ils ont été exposés.

 


[14]                  Veuillez vous lever, Capitaine Leslie. La cour vous condamne à un blâme et à une amende de 4 000 $. L’amende est payable en versements mensuels de 400 $ à compter du 1er novembre 2008 et pendant les neuf mois suivants. Si vous êtes libéré des Forces canadiennes pour quelque raison que ce soit avant le paiement complet de l’amende, le solde impayé sera exigible la veille de votre libération.

 

[15]                  La présente décision met fin à l’instance du Capitaine J.D. Leslie devant la cour martiale permanente.

 

 

 

COMMANDANT P.J. LAMONT, J.M.

 

Avocats :

 

Le major A.M Tamburro, Poursuites militaires régionales, région du Centre

Procureur de Sa Majesté la Reine

 

Le Capitaine de corvette J.A. McMunagle, Direction du service d’avocats de la défense

Avocat du Capitaine J.D. Leslie

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