Cour martiale
Informations sur la décision
CACM 492 - Appel accordé
Date de l’ouverture du procès : 5 avril 2005.
Endroit : 14e Escadre Greenwood, édifice Annapolis, Greenwood (NÉ).
Chefs d’accusation
• Chef d’accusation 1 (subsidiaire au chef d’accusation 2) : Art. 114 LDN, a commis un vol, étant, par son emploi, chargé de la garde ou de la distribution de l’objet volé ou d’en avoir la responsabilité.
• Chef d’accusation 2 (subsidiaire au chef d’accusation 1) : Art. 129 LDN, comportement préjudiciable au bon ordre et à la discipline.
• Chef d’accusation 3 (subsidiaire au chef d’accusation 4) : Art. 114 LDN, a commis un vol, étant, par son emploi, chargé de la garde ou de la distribution de l’objet volé ou d’en avoir la responsabilité.
• Chef d’accusation 4 (subsidiaire au chef d’accusation 3) : Art. 129 LDN, comportement préjudiciable au bon ordre et à la discipline.
• Chef d’accusation 5 : Art. 129 LDN, comportement préjudiciable au bon ordre et à la discipline.
Résultats
• VERDICTS : Chefs d’accusation 1, 3, 4, 5 : Non coupable. Chef d’accusation 2 : Coupable.
• SENTENCE : Une réprimande et une amende au montant de 2000$.
Contenu de la décision
Référence : R. c. Caporal R.D. Parsons, 2006cm3004
Dossier : 200516
COUR MARTIALE PERMANENTE
CANADA
NOUVELLE-ÉCOSSE
BASE DES FORCES CANADIENNES GREENWOOD
Date : 3 février 2006
SOUS LA PRÉSIDENCE DU CAPITAINE DE FRÉGATE P.J. LAMONT, J.M.
SA MAJESTÉ LA REINE
c.
CAPORAL R.D. PARSONS
(Accusé)
SENTENCE
(Prononcée oralement)
TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE
[1] Caporal Parsons, vous avez été déclaré coupable du chef d’accusation de conduite préjudiciable au bon ordre et à la discipline, parce que vous avez bien eu en votre possession des biens publics, savoir un appareil photo numérique Nikon, sans avoir eu une autorisation appropriée.
[2] Il m’incombe à présent de déterminer et de prononcer votre peine.
Pour ce faire, j’ai tenu compte des principes de la détermination de la peine
qu’appliquent les cours ordinaires de juridiction criminelle du Canada, ainsi que les
cours martiales. J’ai également tenu compte des faits de l’espèce, comme ils ressortent
des éléments de preuve recueillis au cours du procès, des témoignages entendus au cours de la phase préliminaire, ainsi que des plaidoiries du poursuivant et de l’avocat de la
défense.
[3] Les principes de la détermination de la peine orientent la cour dans
l’exercice de son pouvoir discrétionnaire de prononcer une peine adéquate et adaptée à
chaque cas. En règle générale, la peine doit correspondre à la gravité de l’infraction, à la
culpabilité ou au degré de responsabilité de son auteur et au caractère de celui-ci.
[4] La cour se fonde également sur les peines prononcées par les autres tribunaux dans des affaires similaires, non parce qu’elle respecte aveuglément les précédents, mais parce que son sens commun de la justice veut que l’on juge de la même manière les affaires similaires. Néanmoins, lorsqu’elle détermine la peine, la cour tient compte des nombreux facteurs qui distinguent chaque affaire dont elle est saisie, aussi bien des circonstances aggravantes susceptibles de justifier une peine plus lourde que des circonstances atténuantes susceptibles d’en diminuer la sévérité.
[5] Les buts et les objectifs de la détermination de la peine ont été formulés de diverses manières dans de nombreuses affaires passées. En règle générale, ils visent à protéger la société, y compris, bien entendu, les Forces canadiennes, en favorisant le développement et le maintien au sein de cette société d’un climat de justice, de paix, de sécurité et de respect des lois. Fait important dans le contexte des Forces canadiennes, ces objectifs incluent le maintien de la discipline, cette habitude d’obéir si nécessaire à l’efficacité d’une force armée. Ces buts et objectifs comprennent également un volet de dissuasion individuelle, pour éviter toute récidive du contrevenant, et un volet de dissuasion générale, pour éviter que d’autres ne soient tentés de suivre son exemple. La peine a aussi pour objet d’assurer la réhabilitation du contrevenant, de susciter un sentiment de responsabilité chez lui et de dénoncer les comportements illégaux. Il est inévitable qu’au cours du processus permettant d’arriver à une peine juste et adaptée à chaque cas, certains de ces buts et objectifs l’emportent sur d’autres. Toutefois, il ne faut pas perdre de vue que la cour chargée de déterminer la peine doit tenir compte de chacun de ces buts et les combiner à bon escient afin de prononcer une peine juste et adaptée aux circonstances particulières de l’espèce.
[6] L’article 139 de la Loi sur la défense nationale prévoit les différentes peines qu’une cour martiale peut infliger. Ces peines sont limitées par la disposition de la Loi créant les infractions et prévoyant les peines maximales et aussi par la compétence susceptible d’être exercée par la Cour. Une seule peine peut être infligée au délinquant, qu’il soit déclaré coupable d’une seule infraction ou de plusieurs. Mais la peine peut comporter plus d’une sanction. Un principe important veut que le tribunal inflige la peine la moins sévère qui permettra de maintenir la discipline.
[7] Pour déterminer la peine dans la présente affaire, j’ai tenu compte des
conséquences directes et indirectes qu’aura la déclaration de culpabilité et la peine que
je m’apprête à infliger.
[8] J’ai traité les faits de l’espèce avant d’en arriver à un verdict et je ne répéterai pas ce que j’ai dit alors. La poursuite fait valoir que, selon les principes de détermination de la peine que sont la dissuasion générale et la dénonciation, il faudrait infliger une peine de rétrogradation assortie d’une amende de l’ordre de 4 000 à 6 000dollars. L’avocat a fait référence à la formation et à l’expérience du contrevenant dans son poste de technicien en approvisionnement comme étant une circonstance aggravante, ainsi qu’à la valeur de l’appareil photo, et au motif du contrevenant comme étant tout simplement la cupidité.
[9] L’effet, sur l’unité de la perte de biens publics de cette nature, ce dont a fait état le Lieutenant-Colonel Ross dans son témoignage, constitue aussi une circonstance aggravante parce qu’il montre les conséquences négatives du comportement du contrevenant sur son unité.
[10] Le procureur de la poursuite demande à la cour de considérer comme une circonstance aggravante le témoignage fait par le contrevenant dans le cadre de sa défense et dont j’ai conclu qu’il était faux. Ce témoignage s’étend à la production devant la cour de ce que j’ai estimé être un reçu falsifié. Dans la détermination de la peine qu’il convient d’infliger, je ne devrais pas, à mon avis, accorder de poids à la manière dont le contrevenant a mené sa défense et je n’en accorde pas.
[11] Je souscris à la conclusion de la Cour d’appel de l’Ontario dans l’arrêt R. c. Kozy (1990), 58 C.C.C. (3d) 500, savoir que l’intérêt de l’administration de la justice, le droit à une défense pleine et entière et le droit de ne pas être puni pour un crime dont un accusé n’a pas été déclaré coupable exigent de ne pas tenir compte de la conduite de la défense au procès dans la détermination de la peine qu’il convient d’infliger, sauf peut-être pour écarter tout autre témoignage de remords qui autrement aurait pu atténuer une peine adaptée.
[12] La défense plaide qu’une réprimande et une amende devraient être infligées en l’espèce. L’avocat fait valoir les bons états de service du contrevenant en 16 ans dans les Forces canadiennes. Le contrevenant est marié et a un enfant à charge et, bien qu’il ait fait l’objet d’une condamnation devant le tribunal civil, je conviens avec la défense que l’affaire est assez ancienne et elle est donc, selon moi, dénuée d’intérêt pour ma décision sur la peine en l’occurrence.
[13] Je tiens aussi compte de la stigmatisation causée par une condamnation pour ce genre d’infraction dans la collectivité militaire, en général, et peut-être plus précisément dans le métier de technicien en approvisionnement.
[14] Compte tenu de tous ces facteurs qui sont liés, tant à l’infraction commise qu’aux circonstances du contrevenant, je ne suis pas convaincu qu’une peine comportant une rétrogradation soit appropriée en l’espèce. La jurisprudence à laquelle m’a renvoyé le poursuivant ne favorise pas une peine de rétrogradation.
[15] Levez-vous, caporal Parsons. La Cour vous condamne à une réprimande et à une amende de 2 000 $ qui devra être payée à raison de 100 $ par mois, et ce, à partir du 1er mars 2006 et pendant les 19 mois suivants. Si, pour une raison ou pour une autre, vous étiez libéré des Forces canadiennes avant d’avoir fini de payer cette amende, le montant total impayé devrait être soldé la veille de votre libération.
CAPITAINE DE FRÉGATE P.J. LAMONT, J.M
Avocats :
Major J.J. Samson, Procureur militaire régional, Atlantique
Major S.D. Richards, Procureur militaire régional, Atlantique
Procureurs de Sa Majesté la Reine
Major A.E. Appolloni, Direction du service d’avocats de la défense, Ottawa
Avocat du caporal R.D. Parsons