Cour martiale
Informations sur la décision
Résumé :
Date de l’ouverture du procès : 19 juillet 2005.
Endroit : BFC Petawawa, édifice S-118, Petawawa (ON).
Chef d’accusation :
• Chef d’accusation 1 : Art. 90 LDN, s’est absenté sans permission.
Résultats:
• VERDICT : Chef d’accusation 1 : Coupable.
• SENTENCE : Une réprimande et une amende au montant de 800$.
Contenu de la décision
Page 1 de 5 Intitulé : R. c. Soldat Khosho, 2005CM33 Dossier : F200533 COUR MARTIALE PERMANENTE CANADA ONTARIO 3 E BATAILLON DU RÉGIMENT ROYAL CANADIEN Date : 20 juillet 2005 PRÉSIDENT : COMMANDANT P.J. LAMONT, J.M. SA MAJESTÉ LA REINE c. SOLDAT M.M. KHOSHO (Accusé) CONCLUSIONS (Rendues verbalement) TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE [1] Soldat Khosho, cette cour vous déclare coupable de l’accusation portée contre vous. [2] Le soldat Khosho est accusé d’absence sans permission en violation de l’article 90 de la Loi sur la défense nationale. Les renseignements laissent croire que, le 10 novembre 2004, il s’est absenté de l’appel de noms du cours de conduite donné à l’immeuble S-118, à la base militaire de Petawawa, de 9 h 25 jusqu’à 10 h sans autorisation. [3] Les parties s’entendent sur le fait que le soldat Khosho devait assister à l’appel de noms et qu’il ne l’a pas fait. La question à régler est celle de savoir si son
Page 2 de 5 absence est justifiée parce qu’il avait l’obligation de se trouver ailleurs au moment de son absence de l’appel de noms. [4] Dans une poursuite devant la cour martiale, comme dans toute poursuite pénale devant un tribunal canadien, il incombe à la poursuite de prouver la culpabilité de l’accusé hors de tout doute raisonnable. Dans un contexte juridique, il s’agit d’un terme technique ayant une signification consacrée. Si la preuve ne permet pas d’établir la culpabilité de l’accusé hors de tout doute raisonnable, celui-ci ne doit pas être déclaré coupable de l’infraction. Le fardeau de la preuve incombe toujours à la poursuite. L’accusé n’a jamais le fardeau de prouver son innocence. En fait, l’accusé est présumé innocent à toutes les étapes de la procédure, jusqu’à ce que la poursuite ait prouvé sa culpabilité hors de tout doute raisonnable, compte tenu de la preuve admissible. [5] Le doute raisonnable ne signifie pas une certitude absolue, mais il n’est pas suffisant de prouver seulement une culpabilité probable. Si la cour est plutôt convaincue que l’accusé est plus probablement coupable que non coupable, cela ne suffit pas pour le déclarer coupable hors de tout doute raisonnable; dans ce cas, l’accusé doit être acquitté. De fait, la norme « hors de tout doute raisonnable » est beaucoup plus proche de la certitude absolue qu’elle ne l’est de la « culpabilité probable ». [6] Cependant, le doute raisonnable n’est pas un doute futile ou imaginaire. Il ne se fonde pas sur la sympathie ou les préjugés. C’est un doute fondé sur la raison et le bon sens, qui découle de la preuve présentée ou de l’absence de preuve. [7] La preuve hors de tout doute raisonnable s’applique à chacun des éléments de l’infraction reprochée. En d’autres termes, si la preuve ne permet pas de prouver chacun des éléments de l’infraction hors de tout doute raisonnable, l’accusé doit être acquitté. [8] Le principe du doute raisonnable s’applique également à la crédibilité des témoins dans une affaire comme la présente alors que la preuve révèle différentes versions des faits importants ayant une incidence directe sur les questions. La démarche permettant d’arriver à établir ce qui s’est passé n’a rien à voir avec la préférence pour l’une des versions données par un témoin. La Cour peut considérer qu’un témoin dit la vérité ou qu’il n’en est rien; elle peut aussi conclure que seules certaines parties du témoignage sont véridiques et exactes. [9] Si les éléments de preuve présentés par l'accusé concernant le litige ou les éléments importants de l’affaire sont accueillis, il s'ensuit que l'accusé est acquitté de l'accusation. Par contre, si la preuve n'est pas accueillie, mais que la cour conserve néanmoins un doute raisonnable, l'accusé doit être acquitté. Même si le témoignage de l'accusé ne suscite pas un doute raisonnable, la Cour doit quand même tenir compte de
Page 3 de 5 tous les éléments de preuve qu'elle juge plausibles et fiables pour déterminer si la culpabilité de l'accusé est établie hors de tout doute raisonnable. [10] Quels sont les éléments de l’infraction d’absence sans permission en violation de l’article 90 de la Loi sur la défense nationale? La Cour d’appel de la cour martiale a fermement établi ces éléments dans l’affaire R. c. Gauthier, [1998] C.M.A.J. N 0 4, lesquels ont été formulés comme suit par le juge Létourneau : 1. une obligation pour l’accusé d’être présent à un endroit déterminé à un moment précis; 2. une omission de sa part d'y être; 3. une absence d'autorisation pour cette omission; et 4. un élément mental, à savoir la connaissance par l'accusé de son obligation d'être présent à un endroit déterminé à un moment précis. [11] L’adjudant Duggan a témoigné pour la poursuite. Il a affirmé que, le 10 novembre 2004, il était le commandant adjoint lors du cours de conduite de véhicules à roues 04. Conformément à la procédure établie, les participants au cours, dont l’accusé, le soldat Khosho, ont été rassemblés à 9 h 30 avant d’accomplir les tâches qui leur avaient été confiées pour la journée. Ce jour-là, l’absence du soldat Khosho a été portée à l’attention de l’adjudant Duggan qui a lui-même vérifié que l’accusé était absent alors qu’il s’attendait à ce que celui-ci assiste à la formation. Fidèle à son habitude, l’adjudant Duggan avait demandé la veille aux participants du cours, y compris sans doute au soldat Khosho, de se présenter le lendemain matin à 9 h 30. [12] J’accepte le témoignage de l’adjudant Duggan et conclus donc que l’accusé était tenu de prendre part au rassemblement du 10 novembre et qu’il ne l’a pas fait. Je suis également convaincu que l’accusé était conscient de son obligation de participer au rassemblement, étant donné qu’il aurait entendu les instructions données en ce sens la veille par l’adjudant Duggan. En outre, en contre-interrogatoire, l’accusé a admis avoir été au courant au moment de son absence qu’il était tenu de prendre part au rassemblement. [13] La question principale en litige en l’espèce a trait au troisième élément que j’ai mentionné, en l’occurrence établir si la poursuite a prouvé hors de tout doute raisonnable que l’accusé n’avait pas l’autorisation de s’absenter du rassemblement. [14] Le sergent Arevalo a témoigné qu’on lui avait confié le poste de sergent de service du bataillon le 9 novembre 2004 pendant 24 heures, à compter de 9 h 30. L’une des fonctions de son poste consistait à surveiller les contrevenants et c’est à ce
Page 4 de 5 titre que l’accusé, le soldat Khosho, lui a été confié. Le soldat Khosho s’est présenté devant lui le 9 novembre 2004, à 17 h 30. Il a assigné des tâches au soldat Khosho durant la soirée, jusqu’à ce qu’il le libère peu avant minuit, en lui donnant pour instructions de se présenter de nouveau devant lui à 6 h 30 le lendemain matin, ce qu’a fait le soldat Khosho. Après avoir dit à celui-ci d’aller manger son petit déjeuner, le sergeant Arevalo lui a demandé de terminer une tâche de nettoyage qu’il avait commencée la veille et de lui en faire rapport à 9 h, demande à laquelle a obtempéré le soldat Khosho. Avant de donner à son remplaçant un compte rendu sur les fonctions de sergent de service du bataillon, le sergeant Arevalo a libéré le soldat Khosho pour lui permettre de retourner au sein de sa compagnie. Son remplaçant a commencé son quart de travail le 10 novembre 2004, à 9 h 30. Le sergent Arevalo n’a pas pris en note le moment où il a libéré le soldat Khosho, mais il a consigné le moment où il a donné son compte rendu à son remplaçant au poste de sergent de service du bataillon. [15] Le soldat Khoso a affirmé qu’après le petit déjeuner du 10 novembre, le sergent Arevalo lui avait donné pour instruction de terminer la tâche de nettoyage et qu’il s’en est occupé jusqu’à 9 h 40, au moment où celle-ci a été achevée. Il s’est ensuite présenté devant le nouveau sergent de service qui a remplacé le sergent Arevalo. Presque au même moment, il a vu le sergent Arevalo et lui a dit que la tâche avait été accomplie. Le sergent Arevalo lui a ensuite dit de retourner au sein de sa compagnie. Le soldat Khosho a dit au sergent Arevalo qu’il avait un rendez-vous à 10 h avec un capitaine dénommé Luhning et qu’il avait l’autorisation d’arriver à ce rendez-vous à 9 h 50. [16] Je n’accepte pas le témoignage du soldat Khosho quant au moment où il a terminé la tâche de nettoyage et celui où il s’est présenté devant le sergent Arevalo le 10 novembre, en avant-midi. Les heures qu’il donne quant à la séquence des événements sont incompatibles avec celles mentionnées dans le témoignage du sergent Arevalo à ce sujet, et c’est la version que je retiens. Le sergent Arevalo a surveillé de près l’accusé durant la période au cours de laquelle ce dernier était sous ses ordres. Le sergent Arevalo me semble s’être acquitté de ses responsabilités avec soin et avoir fait preuve d’autant de soin lors de son témoignage. Il a admis sans hésiter des erreurs relativement mineures qui ont été portées à son attention en contre-interrogatoire, mais il se rappelle clairement du moment où il a libéré le soldat Khosho pour lui permettre de retourner auprès de sa compagnie. [17] Je ne saurais accepter que le sergent Arevalo, si l’accusé ne s’était pas présenté devant lui le 10 novembre, à 10 h, comme il le lui avait ordonné, n’aurait pas pris des dispositions immédiates pour trouver l’accusé avant la fin de son quart de travail à titre de sergent de service du bataillon. Le long quart de travail du sergent Arevalo tirait à sa fin et celui-ci avait des bons motifs de prêter beaucoup d’attention à l’heure; il devait notamment confier ses fonctions de sergent de service du bataillon à son remplaçant.
Page 5 de 5 [18] La défense ne laisse pas entendre que le sergent Arevalo a menti à propos des heures en question, mais elle prétend qu’il s’est trompé au sujet de l’heure à laquelle il a libéré le soldat Khosho. Il est allégué que le soldat Greer a vu l’accusé entrer dans l’immeuble S-118 le 10 novembre, à 9 h 45, au moment où il partait pour la livraison du courrier. Je ne juge pas le témoignage du soldat Greer incompatible avec celui du sergent Arevalo quant à l’heure où celui-ci a eu des échanges avec l’accusé. [19] La preuve produite par la défense ne suscite pas chez moi un doute raisonnable quant au moment où l’accusé a été libéré du rassemblement des consignés pour retourner auprès de sa compagnie. Je suis convaincu que l’accusé était en mesure d’assister au rassemblement du matin. Par conséquent, sur le fondement de l’ensemble de la preuve, je suis convaincu montre à ma satisfaction hors de tout doute raisonnable que l’accusé n’avait pas l’autorisation de s’absenter du rassemblement de 9 h 30, le 10 novembre. [20] Il s’ensuit que l’accusé est coupable de l’infraction d’absence sans permission dont il est inculpé. COMMANDANT P.J. LAMONT, J.M. Avocats : Major J.-B. Cloutier, procureur militaire régional, région du Centre Avocat de Sa Majesté la Reine Lieutenant-commandant J.A. McMunagle, Direction du service d’avocats de la défense Avocat du soldat Khosho
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