Cour martiale
Informations sur la décision
Résumé :
CACM 493 - Appel accordé
Date de l’ouverture du procès : 26 avril 2006.
Endroit : BFC Kingston, théâtre Knowlton, édifice E-30, Kingston (ON).
Chef d’accusation:
• Chef d’accusation 1 : Art. 130 LDN, agression infligeant des lésions corporelles (art. 267b) CCC).
Résultats:
• VERDICT : Chef d’accusation 1 : Coupable.
• SENTENCE : Détention pour une période de 30 jours. L’exécution de la peine de détention a été suspendue.
Contenu de la décision
Page 1 of 4 Référence : R. c. Caporal R.D. Grant, 2006 CM 11 Dossier : S200611 COUR MARTIALE PERMANENTE CANADA ONTARIO BASE DES FORCES CANADIENNES KINGSTON Date : le 2 juin 2006 SOUS LA PRÉSIDENCE DU CAPITAINE DE FRÉGATE P.J. LAMONT, J.M. SA MAJESTÉ LA REINE c. CAPORAL R.D. GRANT (Accusé) SENTENCE (Prononcée de vive voix) TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE [1] Caporal Grant, vous avez été déclaré coupable d’une infraction de voies de fait causant des lésions corporelles en contravention de l’alinéa 267b) du Code criminel, infraction qui constitue également une infraction d’ordre militaire selon l’article 130 de la Loi sur la défense nationale. [2] Il incombe maintenant à la présente cour de déterminer la peine qu’il convient de vous infliger et de prononcer la sentence. Ce faisant, la cour a tenu compte des principes de détermination de la peine qui s’appliquent devant les tribunaux ordinaires de justice pénale au Canada et devant les cours martiales. Elle a également tenu compte des faits de l’espèce, tels qu’ils ressortent de la preuve recueillie au procès, des témoignages entendus et des documents acceptés à l’étape de la détermination de la peine ainsi que des plaidoiries du poursuivant et de l’avocat de la défense. [3] Les principes de la détermination de la peine servent à guider la cour dans l’exercice de son pouvoir discrétionnaire de fixer une peine juste et appropriée dans un cas particulier. En règle générale, la peine doit correspondre à la gravité de l’infraction, au degré de responsabilité de son auteur et au caractère de celui-ci. Dans cet exercice, la cour est aussi guidée par les peines prononcées par les autres tribunaux dans des affaires semblables, non parce qu’elle respecte aveuglément les précédents,
Page 2 of 4 mais parce que son sens commun de la justice veut qu’elle juge de façon similaire les affaires similaires. Cela dit, lorsqu’elle détermine la peine, la cour tient compte de nombreux facteurs qui distinguent l’affaire dont elle est saisie, tant les circonstances aggravantes susceptibles de justifier une peine plus lourde que les circonstances atténuantes susceptibles d’en diminuer la sévérité. [4] Les buts et les objectifs de la détermination de la peine ont été formulés de diverses manières dans de nombreuses affaires antérieures. En général, ils visent à protéger la société, y compris, bien sûr, les Forces canadiennes, en favorisant le développement et le maintien d’une collectivité juste, paisible, sûre et respectueuse de la loi. Dans le contexte des Forces canadiennes, il est important de souligner que ces objectifs comprennent le maintien de la discipline, cette habitude d’obéir aux ordres si nécessaire à l’efficacité d’une force armée. Ces buts et objectifs comprennent aussi un volet dissuasion individuelle, afin d’éviter toute récidive du contrevenant, et un volet dissuasion générale, pour faire en sorte que d’autres ne soient pas tentés de suivre l’exemple du contrevenant. La peine a aussi pour objet d’assurer la réinsertion du contrevenant, de développer son sens de la responsabilité et de dénoncer les comportements illégaux. [5] Il est inévitable qu’au cours du processus permettant d’arriver à une peine juste et adaptée à chaque cas, certains de ces buts et objectifs l’emportent sur d’autres. Toutefois, il incombe à la cour chargée de déterminer la peine de les prendre tous en compte; une peine juste et adaptée est une sage combinaison de ces buts, adaptée aux circonstances particulières de l’espèce. [6] L’article 139 de la Loi sur la défense nationale indique les différentes peines qu’une cour martiale peut infliger. Ces peines sont limitées par les dispositions des lois qui ont créé ces infractions et qui prévoient une peine maximale, et également par la compétence que peut exercer la présente cour. Une seule sentence est prononcée à l’égard du contrevenant, qu’il ait été déclaré coupable d’une seule infraction ou de plusieurs, mais cette sentence peut prévoir plusieurs peines. Un principe important veut que la cour inflige la peine la moins sévère qui permettra de maintenir la discipline. Pour déterminer la peine, dans la présente affaire, la cour a tenu compte des conséquences directes et indirectes qu’auront la déclaration de culpabilité et la peine que la cour s’apprête à infliger. [7] Les faits de la présente affaire ont été exposés dans la décision menant au verdict de culpabilité prononcé à votre égard et la cour n’entend pas revenir sur ce qui a déjà été dit. [8] Les membres des Forces canadiennes sont entraînés à ne faire usage de violence que de façon contrôlée et disciplinée, dans la poursuite des intérêts nationaux du Canada. La cour estime que l’utilisation, par un membre des Forces canadiennes, de violence gratuite et non provoquée, à des fins personnelles, contre un autre membre des Forces constitue une affaire sérieuse. Lorsqu’un tel comportement entraîne des blessu-
Page 3 of 4 res graves, les principes de dissuasion individuelle et de dissuasion générale exigent très souvent que la cour inflige une peine d’emprisonnement. La cour ne constate la présence d’aucun facteur atténuant la gravité de l’infraction en l’espèce. Plus précisément, elle ne souscrit pas à l’observation de l’avocat de la défense selon laquelle il n’existe aucune preuve de l’intention de blesser. Elle est plutôt convaincue par les témoignages entendus qu’étant donné son entraînement et ses talents de boxeur, le contrevenant avait l’intention d’estropier une personne qu’il considérait, pour une raison inexplicable, comme étant son adversaire. [9] Il existe plusieurs circonstances atténuantes qui viennent pondérer l’évaluation de la cour dans cette affaire. Plus particulièrement, la cour remarque que le contrevenant a servi avec distinction depuis 1995, sans qu’on ait d’infraction disciplinaire à lui reprocher. Il possède un grand nombre de compétences dont les Forces canadiennes tirent grand avantage. Ses supérieurs pensent le plus grand bien de lui et son rendement est toujours excellent. D’après les documents dont elle a pu prendre connaissance et les témoignages qu’elle a entendus, la cour est convaincue que le supérieur du contrevenant a parfaitement raison lorsqu’il décrit celui-ci comme « l’incarnation du parfait soldat ». La cour tient compte aussi du fait que le contrevenant souffrait apparemment de dépression à l’époque de l’infraction, même si on ne lui a présenté aucune preuve l’amenant à croire que cet état aurait pu contribuer d’une façon ou d’une autre à l’infraction. La cour est d’accord avec l’avocat de la défense qui prétend que le délai écoulé depuis la perpétration de l’infraction, près de deux ans maintenant, constitue une circonstance qui devrait atténuer la peine qu’elle aurait autrement infligée dans cette affaire. [10] Le poursuivant demande une ordonnance d’interdiction de possession d’arme prévue par l’article 147.1 de la Loi sur la défense nationale, tout en essayant de faire exempter de l’ordonnance tous les objets se trouvant en la possession du contrevenant dans l’exercice de ses fonctions au sein des Forces canadiennes. La cour a le pouvoir discrétionnaire de prononcer une telle ordonnance. En l’absence de toute preuve des fonctions exercées par le contrevenant et de l’importance, s’il y a lieu, d’une exigence professionnelle de posséder des armes, la cour refuse de rendre l’ordonnance que lui demande le poursuivant. [11] Le poursuivant demande aussi que la cour prononce une ordonnance obligeant le contrevenant à fournir des échantillons d’ADN conformément à l’article196.14 de la Loi sur la défense nationale. Comme le contrevenant a été déclaré coupable de voies de fait causant des lésions corporelles, la cour est tenue de rendre l’ordonnance que demande le poursuivant, sauf si elle est convaincue que l’intéressé a établi que cette ordonnance aurait, sur sa vie privée et la sécurité de sa personne, un effet nettement démesuré par rapport à l’important intérêt public énoncé à l’article 196.14(2) de la Loi sur la défense nationale. La cour estime que cet effet démesuré n’a pas été prouvé et rendra donc une ordonnance contraignant le caporal Grant à fournir les échantillons convenables d’ADN.
Page 4 of 4 [12] Levez-vous, Caporal Grant. Vous êtes condamné à 30 jours de détention. Conformément à l’article 215 de la Loi sur la défense nationale, l’exécution de votre peine de détention est suspendue. [13] L’instance de la présente cour martiale relative au Caporal Grant est maintenant terminée. LE CAPITAINE DE FRÉGATE P.J. LAMONT, J.M Avocats : Le Major A.M. Tamborro, Direction des poursuites militaires Procureur de Sa Majesté la Reine Le Capitaine N.H. Weigelt, Direction du service d’avocats de la défense Avocat du Caporal R.D. Grant Le Lieutenant-colonel D. T. Sweet, Direction du service d’avocats de la défense Avocat adjoint du Caporal R.D. Grant
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